Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les conquérants de l'île verte

Les conquérants de l'île verte

Titel: Les conquérants de l'île verte Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
Vom Netzwerk:
autant de farine et de graisse. Et comme cela n’était pas suffisant,
on jeta dans le chaudron des chèvres, des moutons et des porcs que l’on fit
cuire avec la bouillie. Et comme Dagda ne pouvait manger tout cela à même le
chaudron brûlant, on creusa un trou dans le sol et on y versa tout ce qu’il
contenait [66] .
    Quand Dagda vit la nourriture qu’on lui avait préparée, il
commença par se plaindre et dit qu’il n’avait pas l’habitude d’être servi d’une
façon si fruste et si cavalière. Mais le roi des Fomoré vint le trouver et le
menaça de mort s’il ne mangeait tout ce que contenait la fosse. Ainsi,
ajouta-t-il, Dagda n’irait pas se plaindre que les Fomoré ne savaient pas
soigner leurs hôtes.
    Comprenant qu’il ne pouvait refuser, Dagda prit sa cuiller.
Elle était assez grande pour qu’un homme et une femme pussent se coucher au
fond. Et chaque cuillerée qu’il tirait de la fosse l’obligeait d’avaler un
demi-cochon, un cuissot de brebis ou de chèvre [67] .
    « Si j’en crois l’odeur de la viande, dit Dagda, cette
nourriture ne doit pas être mauvaise. » Il se mit donc à manger et trouva
très bonnes la bouillie et la viande. Les Fomoré le regardaient avec curiosité
engloutir le contenu de sa cuiller, et ils se moquaient de lui. Mais quand ils
virent que, non content d’avoir absorbé tout le contenu de la fosse, il en
raclait le fond pour n’y rien laisser, ils furent bien ébahis, car jamais ils
n’avaient vu d’homme manifester pareille gloutonnerie.
    Cependant, Dagda se sentait alourdi. Son ventre avait pris
la tournure du plus vaste chaudron qu’il y eut jamais en une maison de roi. Il
s’allongea sur le sol et s’endormit aussitôt, tandis que les Fomoré tournaient
autour de lui, riant et plaisantant. Ils disaient : « Si tous les
héros des tribus de Dana ressemblent à celui-ci, comment s’étonner qu’ils ne
veuillent pas livrer le blé et les troupeaux qu’ils nous doivent, en tant que
vassaux ? » Et ils ajoutaient : « Dans ces conditions, ce
sera pour nous un jeu d’enfant que de les vaincre par les armes ! »
    Dagda se réveilla enfin, ne sachant trop où il était. Mais
quand il vit les Fomoré se moquer de lui, la colère se ranima dans son cœur. Il
se sentait cependant si lourd qu’il préféra ne rien répondre à leurs
railleries. Après avoir pris congé, il alla rejoindre l’assemblée de Tara pour
y faire le récit de ce qu’il avait vu et entendu.
    Mais les dimensions de son ventre lui rendaient la marche
pénible, et il devait s’arrêter souvent, tant lui coûtait l’effort. Sa tenue
était indécente, car sa tunique brune était remontée jusqu’au renflement des
fesses, et son membre viril, qui était long, dépassait par-dessous. Il avait
ramassé une branche d’arbre et s’en servait comme d’une canne, mais il
l’appuyait avec tant de force sur le sol qu’il laissait derrière lui un sillon
assez large et profond pour tracer la frontière d’une province.
    Il arrivait dans une vallée quand il aperçut une jeune fille
qui se lavait dans le ruisseau. Elle était très belle, avec de belles tresses
sur sa tête et des formes si agréables qu’il fut saisi de désir pour elle. La
fille s’en aperçut et ne le repoussa point. Ils s’étendirent dans l’herbe, près
du ruisseau, mais Dagda était si lourd et si las qu’il ne put s’unir à elle.
Alors, la fille se releva et se moqua de lui.
    Une violente colère envahit Dagda qui voulut frapper
l’insolente, mais elle se déroba, bondit sur ses pieds et s’enfuit. Dagda se
leva, non sans peine, et, trop bien persuadé qu’il ne pourrait la rattraper,
lui lança des pierres, mais sans l’atteindre. Alors, dans sa fureur, il jura de
se venger en massacrant tous les Fomoré qu’il rencontrerait au cours de la
bataille, car c’est à eux qu’il devait sa honte. Sur ce, il reprit sa marche
vers la maison royale de Tara.
    Pendant ce temps, les Fomoré, après avoir préparé leurs
lances, leurs épées et leurs boucliers, s’étaient tous rassemblés autour de
leur roi, Indech, pleins de courage et de résolution, afin de gagner la plaine
de Tured où ils avaient convenu avec Dagda de livrer la bataille. « Les
hommes d’Irlande sont bien prétentieux de nous offrir le combat, dit Indech.
J’ai l’impression que leurs os seront tout petits ou réduits en poussière au
lendemain de la lutte qui se prépare. – Roi suprême, intervint alors

Weitere Kostenlose Bücher