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Les conquérants de l'île verte

Les conquérants de l'île verte

Titel: Les conquérants de l'île verte Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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enfants de Lîr.
    Quant à Bobdh Derg et aux nobles des tribus de Dana, ils
s’en vinrent au Lac des Chênes et y établirent leur camp afin d’écouter le
chant des cygnes. Et les Fils de Milé, qui avaient remarqué la beauté de ces
chants, avaient également coutume d’y venir, des quatre coins de l’Irlande. Car
jamais, sur l’Île Verte, il n’y eut musique si délicieuse qui pût se comparer à
celle des quatre cygnes. Et les cygnes racontaient aussi des histoires et se
divertissaient à converser chaque jour avec les hommes et les femmes qu’ils
avaient autrefois connus, que ceux-ci fussent leurs anciens maîtres ou leurs
anciens compagnons de jeux. Et, chaque nuit, ils se reprenaient à chanter la
suave musique du pays féerique : quiconque entendait cette musique dormait
d’un profond et paisible sommeil, si vifs que fussent les tourments ou les
chagrins dont il se trouvait affligé. Au seul chant des quatre oiseaux, chacun
goûtait la plénitude du bonheur.
    Ces assemblées des tribus de Dana et des Fils de Milé se
perpétuèrent ainsi sur les rives du Lac des Chênes pendant trois cents longues
années. Mais, alors, Finula dit à ses trois frères : « Savez-vous que
nous avons achevé le temps que nous devions passer ici ? Demain, il nous
faudra partir. »
    À ces mots, les fils de Lîr furent saisis d’une grande
peine, car la possibilité de converser avec ceux qu’ils connaissaient, avec
leurs parents, leurs amis, les réconfortait chaque jour et leur permettait de
subir leur sort sans trop de souffrance. De plus, ils se savaient condamnés à
gagner des régions très rudes, battues par tous les vents qui viennent du nord.
Le lendemain matin, les trois frères et leur sœur vinrent une dernière fois
parler à leurs deux pères, à savoir Lîr, leur père naturel, et Bobdh Derg, leur
père adoptif. Ils leur dirent adieu, et Finula chanta un chant de tristesse
dans lequel elle déplorait de devoir quitter pour des parages inconnus des
lieux qu’elle aimait.
    Quand elle eut fini de chanter, les quatre cygnes prirent
leur essor et, d’une aile vive et légère, s’élancèrent dans le ciel vers la
Passe de Moyle, entre l’Irlande et l’Écosse. On les vit enfin disparaître, la
gorge serrée, à l’horizon, et de là date, en Irlande, l’interdiction de tuer
des cygnes.
    La Passe de Moyle était un endroit inhospitalier et terrible
à vivre. Quand les enfants de Lîr virent, devant eux, s’étendre la vaste côte,
ils se sentirent noyés de froid, d’humidité, de crainte et d’angoisse. Toutes
les misères qu’ils avaient déjà subies leur semblaient légères au regard de
celles qu’ils prévoyaient. Une nuit, alors qu’une grande tempête les assaillait,
Finula dit à ses frères : « Ce serait grande pitié que de ne pas nous
préparer à la nuit qui vient, car la tempête est si forte et si mauvaise que
nous risquons fort d’être séparés les uns des autres. Il convient donc de fixer
un lieu où nous puissions nous retrouver si le vent et l’orage nous
dispersaient. »
    Ils décidèrent de se donner rendez-vous à l’Île aux Phoques,
car ils en connaissaient tous quatre la position. À l’approche de la mi-nuit,
le vent redoubla de violence, la rumeur des vagues s’amplifia dans les éclairs
de l’orage, et l’ouragan déchaîné balaya si bien toute l’étendue des flots que
les enfants de Lîr furent dispersés sur le vaste océan, sans qu’aucun d’entre
eux pût savoir où la tempête avait jeté les autres. Mais, enfin, la tourmente
s’apaisa et un grand calme envahit le ciel et la terre. Finula se retrouva
seule sur la Passe de Moyle et, en voyant que ses frères avaient disparu, elle
chanta un chant de lamentation et de désespoir.
    Puis, elle se dirigea sans tarder vers l’Île aux Phoques et
y resta toute la nuit. Au lever du soleil, comme elle scrutait l’horizon, elle
aperçut son frère Conn qui approchait péniblement, la tête pendante et le
plumage détrempé. Elle lui fit bon accueil et le réconforta du mieux qu’elle
put. Peu après, survint à son tour, en aussi piètre état, Fiachra qui, à demi
noyé, grelottait de froid et de souffrance. Finula le prit sous son aile et
murmura : « Pourvu qu’Aedh puisse nous rejoindre, nous serions bien
aises… »
    De fait, peu après, leur apparut Aedh, la tête haute et le
plumage sec, car il avait trouvé une grotte où se mettre à l’abri. Finula lui
fit bon accueil et, de manière

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