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Les croisades vues par les arabes

Les croisades vues par les arabes

Titel: Les croisades vues par les arabes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Amin Maalouf
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Caire! » Le roi faillit s'étrangler, puis il mit fin à l'entretien, mais il nous reçut peu de temps après pour conclure la trêve.
    De fait, les chevaliers francs n’inquiéteront plus Baibars. L'inévitable réaction à la prise d'Antioche, il le sait, ne viendra pas d'eux mais de leurs maîtres, les rois d’Occident. 
    L'an 1268 n'est pas achevé que des rumeurs persistantes annoncent le retour prochain en Orient du roi de France a la tête d'une puissante armée. Le sultan interroge fréquemment marchands ou voyageurs. Durant l'été 1270, un message parvient au Caire annonçant que Louis a débarqué avec six mille hommes sur la plage de Carthage, près de Tunis. Sans hésiter, Baibars rassemble les principaux émirs mamelouks pour leur annoncer son intention de partir, à la tête d'une puissante armée, vers la lointaine province d'Afrique pour aider les musulmans à repousser cette nouvelle invasion franque. Mais. quelques semaines plus tard, voici qu'un nouveau message parvient au sultan, signé d’al-Mustansir, émir de Tunis. annonçant que le roi de France a été retrouvé mort dans son camp et que son armée est repartie, non sans avoir été en grande partie décimée par la guerre ou la maladie. Ce danger écarté, il est temps pour Baibars de lancer une nouvelle offensive contre les Franj d'Orient. En mars 1271, il s'empare du redoutable « Hosn-el-Akrad », le Krak des chevaliers. que Saladin lui-même n'avait jamais pu réduire. Dans les années qui suivent, les Franj et surtout les Mongols, dirigés par Abaga, fils et successeur de Houlagou, organiseront plusieurs incursions en Syrie; mais ils seront invariablement repoussés. Et lorsque Baibars meurt empoisonné. en juillet 1277, les possessions franques en Orient ne représentent plus qu'un chapelet de cités côtières entourées de toutes parts par l'empire mamelouk. Leur puissant réseau de forteresses a été totalement démantelé. Le sursis dont ils ont joui du temps des Ayyoubides est bel et bien terminé; leur expulsion est désormais inéluctable. Pourtant rien ne presse. 
    La trêve concédée par Baibars est reconduite en 1283 par Oalaoun, le nouveau sultan mamelouk. A l'égard des Franj, celui-ci ne fait preuve d'aucune hostilité. Il se dit prêt à garantir leur présence et leur sécurité en Orient à la condition qu'ils renoncent, lors de chaque invasion, à jouer les auxiliaires des ennemis de l'islam. Le texte du traité qu'il pro- pose au royaume d-‘Acre constitue de la part de cet administrateur habile et éclairé une tentative unique de « régularisation » de la situation des Franj.
Si un roi franc partait d'Occident, dit le texte, pour venir s'attaquer aux terres du sultan ou de son fils, le régent du royaume et les grands maîtres d’Acre seraient tenus d'informer le sultan de sa venue deux mois avant son arrivée. S'il débarquait en Orient après que ces deux mois s'étaient écoulés, le régent du royaume et les grands maîtres d’Acre seraient déchargés de toute responsabilité en cette affaire. 
    Si un ennemi venait de chez les Mongols, ou d'ailleurs, celle des deux parties qui en aurait connaissance en premier devrait en avertir l'autre. Si un tel ennemi - à Dieu ne plaise! - marchait contre la Syrie et que les troupes du sultan se retiraient devant lui, les dirigeants d’Acre auraient le droit d'entrer en pourparlers avec cet ennemi dans le but de sauver leurs sujets et leurs territoires.
    Signée en mai 1283 pour dix ans, dix mois, dix jours et dix heures, la trêve couvre tous les pays francs du littoral, c'est-à-dire la ville d’Acre, avec ses vergers, ses terrains, ses moulins, ses vignes et les soixante-treize villages qui en dépendent; la ville de Haifa, ses vignes, ses vergers et les sept villages qui s'y rattachent... Pour ce qui est de Saïda, le château et la ville, les vignes et la banlieue sont aux Franj, ainsi que les quinze villages qui s'y rattachent, avec la plaine environnante, ses rivières, ses ruisseaux, ses sources, ses vergers, ses moulins, ses canaux et ses digues qui servent depuis longtemps a l'irrigation de ses terres. Si l'énumération est longue et minutieuse, c'est pour éviter tout litige. L'ensemble du territoire franc apparaît toutefois dérisoire : une bande côtière, étroite et effilée, qui ne ressemble en rien à l'ancienne et redoutable puissance régionale constituée autrefois par les Franj. Il est vrai que les lieux mentionnés ne représentent

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