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Les croisades vues par les arabes

Les croisades vues par les arabes

Titel: Les croisades vues par les arabes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Amin Maalouf
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deux feux, redoublent d'efforts.
Des deux tours mobiles construites par les Franj, racon- tera Ibn aI-Athir, l'une était du côté de Sion, au sud, et l'autre au nord. Les musulmans parvinrent a brûler la pre- mière en tuant tous ceux qui étaient dedans. Mais à peine avaient-ils fini de la détruire qu'un messager arriva en appelant à l'aide, car la ville était envahie de l'autre côté. De fait. elle a été prise par le nord, un vendredi matin, sept jours avant la fin de chaaban 492.
    En cette terrible journée de juillet 1099, Iftikhar est retranché dans la tour de David, une citadelle octogonale dont les fondations ont été soudées au plomb et qui constitue le point fort de l'enceinte. Il peut y tenir plusieurs jours encore, mais il sait que la bataille est perdue. Le quartier juif est envahi, les rues sont jonchées de cadavres, et on se bat déjà aux abords de la grande mosquée. Bientôt, lui et ses hommes seront encerclés de toutes parts. Pourtant, il continue à se battre. Que pourrait-il faire d'autre? Dans l'après-midi, les combats ont pratiquement cessé dans le centre de la cité. La bannière blanche des Fatimides ne flotte plus que sur la tour de David.
    Soudain, les assauts des Franj s'arrêtent et un messager s'approche. Il vient de la part de Saint-Gilles proposer au général égyptien et à ses hommes de les laisser partir sains et saufs s'ils acceptent de lui livrer la tour. Iftikhar hésite. Plus d'une fois déjà, les Franj ont trahi leurs engagements et rien ne dit que Saint-Gilles soit décidé à agir autrement. On le décrit pourtant comme un sexagénaire aux cheveux blancs que tout le monde salue avec respect, ce qui accréditerait chez lui un sens de la parole donnée. En tout cas, on sait qu'il a besoin de traiter avec la gamison, car sa tour de bois a été détruite et tous ses assauts ont été repoussés. De fait, il piétine sous les murs depuis le matin alors que ses frères, les autres chefs francs, sont déjà en train de piller la ville et de se disputer ses maisons. Pesant le pour et le contre, Iftikhar finit par se déclarer prêt à capituler à la condition que Saint-Gilles promette, sur l'honneur, d'assurer sa sécurité et celle de tous ses hommes.
    Les Franj respectèrent leur parole, et les laissèrent partir de nuit vers le port d'Ascalon où ils s'établirent, notera consciencieusement Ibn al-Athir. Avant d'ajouter : La population de la ville sainte fut passée au fil de l'épée, et les Franj massacrèrent les musulmans pendant une semaine. Dans la mosquée al-Aqsa, ils tuèrent plus de soixante-dix mille personnes. Et Ibn al-Qalanissi, qui évite de manipuler des chiffres invérifiables. précise : Bien des gens furent tués. Les juifs furent rassemblés dans leur synagogue et les Franj les y brûlèrent vifs. Ils détruisirent aussi les monuments îles saints et le tombeau d'Abraham - la paix soit sur lui! 
    Parmi les monuments saccagés par les envahisseurs se trouve la mosquée d'Omar, érigée à la mémoire du second successeur du Prophète, le calife Omar Ibn al-Khattab, qui avait pris Jérusalem aux Roum en février 638. Et, par la suite, les Arabes ne manqueront pas d'évoquer souvent cet événement dans l'intention de faire ressortir la différence entre leur comportement et celui des Franj. Ce jour-là, Omar avait fait son entrée sur son célèbre chameau blanc, tandis que le patriarche grec de la ville sainte s'avançait à sa rencontre. Le calife avait commencé par lui assurer que la vie et les biens de tous les habitants seraient respectés, avant de lui demander de lui faire visiter les lieux sacrés du christianisme. Pendant qu'ils se trouvaient dans l'église de la Qyama, le Saint-Sépulcre, l'heure de la prière étant arrivée, Omar avait demandé à son hôte où il pourrait étendre son tapis pour se prosterner. Le patriarche l'avait invité à rester sur place, mais le calife avait répondu : « Si je le fais, les musulmans voudront demain s'approprier ce lieu en disant : Omar a prié ici. » Et, emportant son tapis, il était allé s’agenouiller à l'extérieur. Il avait vu juste, car c'est à cet endroit même que l'on allait construire la mosquée qui porte son nom. Les chefs francs n'ont pas, hélas! cette magnanimité. Ils fêtent leur triomphe par une tuerie indescriptible, puis saccagent sauvagement la ville qu'ils prétendent vénérer.
    Leurs coreligionnaires eux-mêmes ne sont pas épargnés : l'une des premières

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