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Les croisades vues par les arabes

Les croisades vues par les arabes

Titel: Les croisades vues par les arabes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Amin Maalouf
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pour traverser le Nil et décimer l'armée de Chirkouh, qui se dirige désormais vers le sud. Un détachement ennemi, commandé par Amaury, se lance à ses trousses. L'oncle de Saladin veut donner l'impression qu'il est aux abois. Sachant que son principal handicap est d'être coupé de ses bases, il cherche à placer ses poursuivants dans la même situation. Arrivé à plus d'une semaine de marche du Caire, il ordonne à ses troupes de s'arrêter et leur annonce, dans une harangue enflammée, que le jour de la victoire est arrivé. 
    De fait, l'affrontement a lieu le 18 mars 1167, près de la localité d’El-Babein, sur la rive ouest du Nil. Les deux armées, épuisées par leur course interminable, se jettent dans la mêlée avec la volonté d'en finir une fois pour toutes. Chirkouh a confié à Saladin le commandement du centre, en lui ordonnant de reculer dès que l'ennemi aura chargé. De fait, Amaury et ses chevaliers marchent vers lui tous étendards dehors et, lorsque Saladin fait mine de s'enfuir, ils se lancent à sa poursuite sans se rendre compte que les ailes droite et gauche de l'armée syrienne leur coupent déjà toute retraite. Les pertes des chevaliers francs sont sévères, mais Amaury réussit à s'échapper. Il revient vers Le Caire où est resté le gros de ses troupes, fermement décidé à se venger au plus vite. Avec la collaboration de Chawer, il se prépare déjà à revenir à la tête d'une puissante expédition vers la haute Egypte, quand parvient une nouvelle à peine croyable : Chirkouh s'est emparé d'Alexandrie, la plus grande ville d'Egypte, située à l'extrême nord du pays, sur la côte méditerranéenne! 
    De fait, au lendemain de sa victoire d'El-Babein, l'imprévisible général kurde, sans attendre un seul jour et avant que ses ennemis aient le temps de se reprendre, a traversé, à une allure vertigineuse, tout le territoire égyptien, du sud au nord, et a fait une entrée triomphale à Alexandrie. La population du grand port méditerranéen, hostile à l'alliance avec les Franj, a accueilli les Syriens en libérateurs. 
    Chawer et Amaury, contraints de suivre le rythme infernal que Chirkouh impose à cette guerre, vont assiéger Alexandrie. Dans la cité, les vivres sont si peu abondants qu'au bout d'un mois la population, menacée de famine, commence à regretter d'avoir ouvert ses portes au corps expéditionnaire syrien. La situation semble même désespérée le jour où une flotte franque vient mouiller au large du port. Cependant Chirkouh ne s'avoue pas battu. Il confie le commandement de la place à Saladin, puis, rassemblant quelques centaines de ses meilleurs cavaliers, effectue avec eux une audacieuse sortie nocturne. A bride abattue, il traverse les lignes ennemies, puis chevauche, nuit et jour... jusqu'en haute Egypte. 
    A Alexandrie, le blocus devient de plus en plus rigoureux. A la famine s'ajoutent bientôt les épidémies, ainsi qu'un pilonnage quotidien par catapultes. Pour le garçon de vingt-neuf ans qu'est Saladin, la responsabilité est lourde. Mais la diversion opérée par son oncle va porter ses fruits. Chirkouh n'ignore pas que Morri est impatient d'en finir avec cette campagne et de rentrer vers son royaume constamment harcelé par Noureddin. En ouvrant un nouveau front dans le Sud, au lieu de se laisser enfermer à Alexandrie, le général kurde menace de prolonger indéfiniment le conflit. En haute Egypte, il organise même un véritable soulèvement contre Chawer, amenant de nombreux paysans en armes à se joindre à lui. Quand ses troupes sont suffisamment importantes, il s'approche du Caire et envoie à Amaury un message habilement libellé. Nous perdons tous deux notre temps ici, lui fait-il dire en substance. Si le roi voulait bien considérer les choses calmement, il s’apercevrait clairement qu'après m'avoir chassé de ce pays, il n'aura fait que servir l'intérêt de Chawer. Amaury en est convaincu. Très vite, on parvient à un accord : le siège d'Alexandrie est levé, et Saladin quitte la ville salué par une garde d'honneur. En août 1167, les deux armées repartent, comme trois ans auparavant, vers leurs pays respectifs. Noureddin, satisfait de récupérer l'élite de son armée, souhaite ne plus se laisser entraîner dans ces stériles aventures égyptiennes. 
    Et pourtant, dès l'année suivante, comme une sorte de fatalité, la course vers le Nil va reprendre. En quittant Le Caire, Amaury avait cru bon d'y laisser un

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