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Les fils de Bélial

Les fils de Bélial

Titel: Les fils de Bélial Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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d’être là pour se faire voir du roi, fut-ce vélocement. Débordant des fourrures dont s’étaient parés les plus riches ou les présomptueux leurs brassières et jambières fourbies lançaient des lueurs nacrées quand elles ne rehaussaient les couleurs de leurs pannes 192 . Il y avait en présentation chez ces seigneurs tout ce qui se forgeait, se rivait, se bouclait ou s’accrochait pour la défense du corps : des cottes gambaisées, des cottes-à-plaques garnies de panthères (461) en émail, des armures de plates enjuponnées de mailles, des tabards rajeunis par des ailes de housse (462) , et la main qui tenait la lance disparaissait sous des anneaux, des écailles, des jointes (463) . Tous ces guerriers se sentaient prêts à livrer bataille et sans doute, certains, à mourir bellement.
    Tristan imagina les crochets d’assemblage des jambières et des brassards engagés inséparablement comme les siens – dans leurs œillets 193 tandis qu’il apercevait çà et là un passot 194 suspendu à une ceinture d’armes, un bran fixé au troussequin d’une selle, une hache attachée sur un dos, un poignard ou une masse à une hanche. L’écu aux formes diverses, grand ou petit, touchait soit la cuisse du cheval, ou remuait contre une épaule – à moins qu’il ne fut embrassé et tenu en chantel 195 par une senestre solide. Sous les visières relevées des bassinets à l’arrière desquels ventilait çà et là quelque timbre de crête, les yeux luisaient dans une ombre blême, et le peu de front ou de joue apparue dans l’orbite de fer avait la pâleur d’un suaire. Tous ces hutins souffraient de la même fièvre algide : sous leur écorce et le bourras qui en amortissait le poids et la fermeté, leur chair tremblait en exsudant du froid.
    « Et moi, Tristan ? »
    Eh bien, pareil aux autres, il transpirait aussi. Moins de froid que d’émoi. Il allait assister à quelque chose de solennel et de vain. Ce n’était assurément pas immobile et en arroi parfait – ou presque – qu’une armée prouvait sa force et son unité, mais dans l’incertaine âpreté d’une bataille. La leçon de Poitiers restait intacte en lui. Le roi Jean et ses fils se croyaient des élus de Dieu, lequel les avait envoyés en enfer. Henri quoique bâtard et usurpateur, se croyait béni de Mars et de Vulcain. Peut-être fuirait-il dès le premier désavantage, après qu’il eut fourni cinq ou six coups d’épée. Pour qu’il plantât quelques pouces d’acier dans le corps de Pèdre ou qu’il le tînt à sa merci, il lui faudrait un courage qui semblait lui faire défaut : jusqu’ici, on l’avait vu se tenir à table. Il allait maintenant devoir prouver qu’il savait se tenir à cheval, à l’avant d’une armée que Guesclin pensait mener à la victoire. 
    « Voire ! Il s’y connaît mieux en escarmouches qu’en vaste bataille. C’est la première fois qu’il affrontera le prince Édouard… qui n’est pas n’importe quel routier de grand chemin. »
    Il se sentait à l’aise dans son armure. Alcazar les supportait sans peine. Son écu, maintenu sur l’épaule senestre par la guige de cuir tressé, exposait aux regards les armes de sa famille : de gueules à deux tours d’argent. Il avait ceint Teresa et serrait dans sa dextre la seule lance au fer en feuille de saule qu’il possédait. Le talon de sa hampe s’appuyait sans remuer sur le faucre de l’étrier.
    « Je suis beau sans présomption. » Luciane eût été fière de le voir ainsi. Et Oriabel. Et pourquoi pas Francisca ?
    En soupirant tout en évoquant ces visages, il porta sa senestre au viaire 196 de son bassinet. « Bon, il n’a p oint bougé. » La calotte de fer pesait à peine sur les trois cales (464) dont il s’était coiffé précautionneusement, leur épaisseur amortissait toute contrainte. Paindorge, tête nue, et qui tenait un pennon aux armes des Castelereng, avait revêtu l’armure d’Ogier d’Argouges. Il menait fermement Tachebrun sans se départir d’une lippe boudeuse, comme s’il dédaignait tous ces guerriers de premier plan et surtout la piétaille alignée derrière eux. Les coiffes de fer des soudoyers et des routiers se mêlaient aux aumusses, camails et celadas des almogavares (465) arrivés depuis peu de Séville, Tolède, Cordoue – c’était du moins ce que prétendaient des rumeurs.
    –  Où est le Bègue ? dit Paindorge. Je ne vois pas son enseigne.
    –  Moi je la vois, juste

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