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Les fils de Bélial

Les fils de Bélial

Titel: Les fils de Bélial Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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voir ! »
    –  Point de bataille rangée, sire ! insista le Breton.
    –  La bataille sera ce que j’en ferai (472) .
    Guesclin se résigna. Audrehem vint à sa rescousse :
    –  Combattre les Anglais en bataille rangée, c’est leur donner, Henri, des armes contre nous !
    –  La bataille sera ce que j’en voudrai faire !
    Content de lui, le roi se répétait. Nullement ébahi par cet entêtement, Tristan se souvint de l’obstination de Jean II, dit plus tard « le Bon », peu avant l’affrontement des Français et des Anglais, commandés par le prince de Galles, dans les champs bossués de Poitiers-Maupertuis. Henri, en ce moment, ressemblait au défunt roi de France : même regard acéré entre des paupières pâlies, gonflées par des insomnies dont la nature importait peu ; même bouche en friche, dédaigneuse, même menton pelu soulevé par une témérité tellement quellement affectée que Guesclin, dans son coin, souriait sans respect.
    Le Bègue de Villaines, le maréchal d’Audrehem, Thibaut du Pont, le comte de Dénia, don Gil Bocanegra, l’amirante d’Espagne à l’avant des prud’hommes groupés autour de don Henri, sourcillaient de le voir s’emporter alors qu’en l’occurrence, il eût dû s’en remettre à Bertrand que sa singulière ardeur mécontentait.
    –  Sire, dit le Breton sans bouger de sa place, vous avez pu ouïr ce que vous a dit le dernier chevaucheur : le prince de Galles s’est entouré de la grande chevalerie d’Angleterre et de ses alliés les meilleurs. Je sais bien que vous pouvez avoir plus grand nombre de gens que lui, mais les siens ont toujours suivi les guerres plus que les gens de cette contrée. Je ne vous conseillerai nullement de combattre le prince en bataille à présent ; nequedent 213 , on peut garder les passages des rivières contre lui et le tenir si à dépourvu de vivres qu’il lui conviendra de répandre ses fourrageurs et ses hommes d’armes pour aller recouvrer des vitailles et du fourrage. Nous qui connaissons déjà le pays, nous trouverons bien avantage sur eux, et de fois à autre nous pourrons les battre. Vous pourrez ainsi abaisser leur armée sans crainte de préjudicier la vôtre. Alors par la suite, quand vous les verrez affaiblis, vous, pourrez bien combattre et déconfire aisément l’héritier d’Angleterre.
    Les chevaliers s’accordèrent à ce conseil. Henri têtu, n’y voulut point souscrire : une victoire sur le prince de Galles et sur Pèdre grossirait sa renommée dans toutes les Cours du monde.
    Tristan quitta le pavillon du roi. Il fut rejoint par Arnoul d’Audrehem emmitouflé dans une pelisse de mouton qu’un muletier lui avait cédée, sans doute contre une poignée de maravédis.
    –  Content de vous rattraper, Castelreng. Savez-vous ce que le Breton vient de me dire ? «  Maréchal, je dis et affirme qu’aussitôt qu’ils verront la bannière du roi Pedro et du vaillant prince, nos gens s’enfuiront. Je ne me fie en eux pas plus qu’en l’oiseau qui vole. Et je vous jure Dieu le père que j’aimerais mieux être pris en bataille que le roi Henri. Car si Pèdre le tient, il le fera mourir comme le plus fol traître, le plus fol mécréant qui soit au monde. Et si j’étais pris, j’aurais quelque garant qu’on s’accorderait avec moi pour or et pour argent. » Henri est fol et haustre (473) . Il tient à sa bataille. Elle m’inquiète comme il m’inquiète. Et vous ?
    –  Messire, dit Tristan, sachez-le : si je tombe au pouvoir du prince d’Aquitaine, il me pendra ou décollera.
    –  Tiens donc !… Et pourquoi, mon ami ?
    « Mon ami ! » Il y allait fort, le maréchal de France. Était-ce parce qu’il était inquiet, lui aussi ?
    –  Je ne puis, hélas ! vous en dire plus, messire. Quand le roi Charles n’était que le lieutenant de son père, il me confia une besogne qui me poussa dans la gueule du loup… ou du léopard… J’en pus sortir… Mais je puis vous avouer que monseigneur Édouard, qui sait ostoier 214 , me connaît et réprouve. On le sait : la haine est chez cet homme un désir incessant. Il jouira de me faire occire, – s’il ne m’occit pas lui-même.
    Eh bien, dit Audrehem en remontant le col de sa houppelande, je dois vous le confesser : il me réprouve aussi. C’est pourquoi nous allons devoir œuvrer pour la victoire… quelque ardue qu’elle nous paraisse.
    –  Eh oui, fit Tristan, morose, en s’enserrant plus fort dans la

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