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Les fils de Bélial

Les fils de Bélial

Titel: Les fils de Bélial Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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tout en lui faisant honte aussi bien pour ceux qui les avaient montés que pour ceux qui les avaient frappés sans que parfois la nécessité s’en fût imposée. Des coustiliers couraient parmi ces innocentes victimes. Entre deux exécutions d’hommes à terre, ils les achevaient d’un coup de percemaille dans la gorge, et ces pitoyables bourreaux qui n’avaient peut-être meurtri aucun ennemi dans la mêlée se riaient de férir ces colosses vaincus. Ici, trois genets trempés de sang se mouraient avec des soubresauts brefs ; là dans un désordre affreux, cinq ou six roncins et coursiers étaient allongés. L’un d’eux, égarrotté 327 , une jambe rompue sans doute, essayait d’échapper à l’écrasement, et tout proche, un autre, debout, intact ou presque, tremblait des quatre membres, un tronçon de sagette enfoncé dans sa croupe. Plus loin, d’autres s’ébrouaient, contents de se savoir ingambes. Plus loin encore, d’autres morts ou mourants avaient dû être frappés en pleine course, en plein effort – en pleine vie. Ils ne méritaient pas ce sort funeste.
    « Pourvu qu’Alcazar soit sauf !… Et nos autres compères ! »
    Tristan ferma ses paupières.
    « Tout empunaise ! Tout ! »
    Les effluves de mort infectaient ses narines. Partout l’occision et la haine. Il en serait ainsi de l’Espagne tant que deux frères ennemis ne se départageraient point l’épée en main pour donner un vainqueur définitif à une ignoble querelle.
    –  Il n’y a pas que les morts qui puent. Cette guerre, elle aussi, empunaise !
    Cherchant un refuge pour ses pensées en déroute, Tristan ne trouva que Calveley :
    –  Tu vas devoir me rançonner.
    –  Bah ! fit le géant roux. Si nous étions seuls, maintenant, je te dirais : prends un cheval et galope… Mais le prince de Galles va vouloir regarder de près ses prisonniers avant que d’en laisser certains à la disposition de ceux à qui ils appartiennent. Bagerant n’osera revendiquer ta prise. Tu t’es targué de moi 328 . C’est du moins ce que je dirai.
    –  Édouard me hait, j’en suis sûr. Il faut que je te dise pourquoi…
    Calveley coupa court à toute explication.
    –  Regarde, dit-il, Pèdre revient à pied.
    Il précédait son cheval soulagé sans doute de n’être plus abroché. Parfois le demi-vainqueur de Nâjera s’arrêtait pour donner un fort coup de son soleret pointu dans les corps portant une écharpe et secouait ses épaules où le fer commençait à s’appesantir.
    –  Regarde-le !… Il donne des escafes 329 à des morts comme s’il pouvait ainsi les ressusciter.
    Pèdre avait dégainé son épée. Était-ce pour achever tout corps ennemi qu’un simple tressaillement dénoncerait comme vivant ? Dans le logis oblong du bassinet ouvert, son visage semblait une face de lune. Un de ses hommes liges, la bannière armoriée de Castille au poing, courut lui proposer, sans doute, d’aller la planter à proximité de celle du prince de Galles. «  Muy bien ! » lui dit-il, et il continua d’avancer vers son grand allié devant lequel, après avoir fiché son arme en terre, il ébaucha une genouillade, indignant ainsi le gros Anglais qui venait de se désheaumer.
    –  Allons, point de simagrée, reprocha Édouard en prenant la main de l’Espagnol et en tirant violemment dessus comme pour lui épargner de choir et déchoir devant ses hommes. Relevez-vous !
    –  Cher et beau cousin, s’obstina Pèdre, la voix vibrante, je vous dois moult de grâces et de louanges pour la bonne journée que j’ai eue et par vous !
    Plutôt que de s’évaporer, l’ire du prince prit plus d’aigreur sinon de volume. Il croisa les bras comme pour s’interdire de toucher derechef à cet allié dont l’humilité affectée tout autant que la reconnaissance lui donnait plus de mésaise que de satisfaction.
    –  Rendez grâces à Dieu, Pedro, et toutes louanges, car la victoire vient de Lui et non de moi. J’ai envoyé quelques-uns de mes hérauts sur le champ de bataille pour aviser quels gens sont pris et quelle quantité sont morts… et pour savoir également si Henri a survécu.
    –  Le fils de pute a fui !… C’est un chevalier indigne.
    –  Pas celui que voilà et qui me semble un preux.
    Le prince désignait, précédé d’un chevalier qui peut-être, songea Tristan, était le sire de Pincornet, un homme soutenu par deux archers, le long bow en bandoulière. Un vaincu à la cotte d’armes

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