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Les fils de Bélial

Les fils de Bélial

Titel: Les fils de Bélial Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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selle, quelqu’un venait de répandre une poignée de clous sinon des têtes de chardon. Un écart mit Villaines hors du rang, un autre l’enfonça parmi les chevaliers de devant qui protestèrent. Soudain privé d’un étrier, le prud’homme se sentit décollé de l’arçon par des reins chargés d’une fureur maligne sans pouvoir réintégrer son siège. Il bascula dans les cailloux du chemin en égrenant quelques jurons qui n’égayèrent qu’Audrehem tandis que Malaquin hennissait avec une joie profonde.
    Tristan mit pied à terre et saisit les rênes de son cheval dont l’œil étincelait de satisfaction.
    –  Que se passe-t-il ? demanda Calveley accouru au galop.
    –  Messire Villaines chevauchait un cheval qui m’appartint et que vous connaissez peut-être. Je l’ai prié de me le restituer en échange du mien. Sa réponse négative a courroucé Malaquin plus encore que moi-même.
    –  Échangez, dit l’Anglais.
    Debout, mais penché en avant, Villaines se frottait les reins. Tristan s’inclina devant lui en feignant, peut-être inutilement, un respect quelque peu émoussé.
    –  Messire, dit-il alors que Calveley s’éloignait, rien ne vaut la conciliation… Je ne vous demandais pas la lune… en plein soleil. Ce n’était point une impudence de ma part que de vouloir ce roncin… d’autant que celui que je vous proposais est plus jeune et bien soudé.
    Tristan monta sur Malaquin et rejoignit Paindorge.
    –  Vous vous êtes fait, messire, un ennemi.
    –  Ce voulenturieux 376 méritait une leçon… Pas vrai ? N’ai-je pas raison, Malaquin ?
    Le cheval hocha la tête. Tristan, qui caressait la crinière emmêlée, puis l’encolure palpitante, regarda ses doigts et sa paume couverts d’une poudre couleur de farine.
    –  Il sera temps que je te soigne !
    La longue file des prisonniers et des Anglais se remit en marche, et du sol desséché, sous les frappements des sabots et les pas traînants des piétons, monta une poussière qui se collait aux lèvres, aux cils et aux sourcils.
    –  Je commence à avoir soif, dit Paindorge. Quand boirons-nous ?
    –  Nous boirons le calice jusqu’à la lie… Quand nous ferons une halte, trouve un caillou et suce-le. N’oublie jamais, Robert, que nous sommes vaincus.
    Il fallut descendre dans la vallée de l’Arlanzôn et franchir un pont au-dessus d’une maigre rivière. Des Anglais ne résistèrent pas à l’envie d’aller boire quelques gorgées de cette eau rare, immobile entre des galets verdâtres, ce que réprouvèrent Chandos, Calveley, Matthieu de Gournay et quelques autres. Et l’on avança tandis que çà et là, sur les hauteurs, se dressaient des forteresses apparemment imprenables. Bien qu’il fît un temps d’or et d’azur, une mélancolie enveloppait tous ces hommes aussi étroitement que leurs vêtements sur leur peau en sueur. Les pentes qu’ils descendaient ne leur procuraient ni ombre ni fraîcheur. Parfois, des éboulements de pierres alentissaient la progression et levait-on la tête qu’on entrevoyait un château noir, hautain dans sa maussaderie écrasante, mordant le ciel de ses merlons pointus, asile de fraîcheur derrière les boursouflures de ses tours et de ses échauguettes percées d’archères minces comme des coups de couteau. Il semblait qu’il s’en exhalait une odeur de moisi sinon de pourriture. Puis ce fut une plaine et au milieu, blottie dans ses murailles, une cité dont le nom dansa de bouche en bouche :
    –  Palencia.
    On s’arrêta. La rumeur reprit : on n’irait pas à Valladolid. Le prince de Galles, cédant à l’instance de ses conseillers, s’installerait à Amusco, un village au nord de Palencia. Répartie entre Burgos et cette cité, son armée vivrait « sur le pays ». On sut ce que cela signifiait.
    –  Et nous ? demanda Tristan à Calveley.
    –  Certains à Palencia, d’autres à Amusco, d’autres encore je ne sais où. Tu es sauf. Que t’importe où tu iras.
    Cela signifiait : « N’en demande pas trop. » À midi, le groupe des prisonniers s’était scindé en plusieurs fragments. Tristan apprit, cette fois par Shirton, qu’il serait enfermé à Amusco avec son écuyer : quelque magnanime qu’il se fut montré, Édouard tenait à les avoir proches de lui. Cette proximité ne laissait pas d’être inquiétante.
    –  Il ne nous reste plus qu’à attendre, dit Paindorge.
    –  Attendre quoi, Robert ?
    –  La délivrance… Je ne sais

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