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Les fils de Bélial

Les fils de Bélial

Titel: Les fils de Bélial Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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trop… Je me réjouis que Lebaudy et Lemosquet s’en soient allés.
    –  Il nous faudra nous accoutumer à être traités en vaincus.
    –  C’est vrai. Ils n’useront pas pour nous des égards qu’ils prodigueront à Guesclin, Audrehem, Villaines et quelques autres. Le roi paiera leurs rançons… Mais nous, messire ?
    Tristan caressa l’encolure de Malaquin. Il allait certainement le perdre une fois de plus. Sa déception et son mécontentement grandissaient. Les journées d’attente qu’il allait devoir vivre en compagnie de Paindorge seraient pleines d’une lassitude et d’une oisiveté pernicieuses. Et puis attendre quoi ? Il l’ignorait mais il était certain que le moment viendrait où tout ce qui le retenait se dénouerait et le livrerait tout entier à de  nouvelles forces et de nouveaux devoirs. Ce n’était pas sur la divine providence qu’il comptait mais sur la forme même et l’opportunité des événements et des  choses. Il s’était battu pour le roi de France et pour un prince sans valeur aucune. Il avait été vaincu parce qu’il fallait qu’il en fut ainsi. Il crut nécessaire de rassurer son écuyer :
    –  Nous avons perdu, certes, mais on ne perd jamais les batailles qu’on se livre à soi-même. Un jour vient où les murs les plus épais s’effondrent, où la méchanceté disparaît, où la justice triomphe…
    Quand ils furent enfermés dans une sorte de cave d’où le jour tombait d’une lucarne haut placée, Tristan ne céda point, comme Paindorge, au découragement et à la colère. Il s’assit, le dos contre le mur, et se recueillit tan dis que l’écuyer marchait, marchait toujours, muet et accablé.
    Le temps s’éternisa. Dormir sur un peautre empli d’une paille insuffisante, manger peu – des lentilles, -souvent, et une viande bonne, mais hélas ! chiche, marcher trois fois par jour dans un champ sous la surveillance de trois ou quatre archers. Réintégrer un reclusoir d’où jamais l’ombre ne sortait complètement.
    Tristan s’accoutumait mieux que son compagnon. Des idées de paix éternelle hantaient son esprit. Il avait  souhaité entrer dans la Chevalerie et mener une vie  ardente, tumultueuse. Il avait rêvé d’aller de bataille en  bataille, de succès en succès. Il avait voulu connaître  le danger afin d’avoir conscience de sa valeur. Il avait, désormais, le sentiment de se déforcir. Il n’était pas le seul, sans doute, à ronger son frein. Parfois, une certitude édulcorait son amertume : l’oisiveté rongeait la gaieté des vainqueurs. Le soleil les exténuait. L’ivrognerie et la dysenterie frappaient mortellement une armée qui se conduisait aussi mauvaisement à l’égard des populations que les hordes conduites par Henri, Guesclin, Bourbon et tant d’autres. Le prince de Galles, disait Shirton, commençait à être excédé par les plaintes de ses capitaines qui ne pouvaient tenir leurs hommes en main, bien que des soudoyers eussent été pendus pour l’exemple. Il ne se passait plus un jour sans qu’Édouard ne voulût partir en guerre contre Pèdre. Il savait, cependant, que s’il demeurait en Espagne, les maux dont il souffrait, attisés par la chaleur, ne cesseraient d’empirer. Il avait gagné la bataille de Nâjera et perdu, en aidant Pèdre, une fortune dont l’immensité n’avait d’égale que sa déception. Un jour vint où Calveley, longtemps absent, déverrouilla la porte de la cave :
    –  J’étais en Aragon 377 . À l’aller comme au retour, j’ai chevauché jour et nuit sur des chevaux de relais. Je n’ai pas dormi depuis plus d’une semaine. Nous partons demain matin.
    –  Nous allons où ?
    –  Bordeaux. Édouard y est contraint par la maladie… L’Espagne est à feu et à sang. Pèdre fait régner la terreur partout où il passe. Plutôt que de se concilier ses sujets, il en fait ses ennemis… Édouard l’abandonne à son sort.
    –  Ah ! fit Paindorge. Quel jour sommes-nous ?
    –  Le 16 août. Nous allons chevaucher lentement », vers la Navarre et de là gagner l’Aquitaine 378 .
    –  Soit, dit Tristan.
    Il se résignait à tout. Il était toujours un otage. Il  n’avait aucun avenir. Il ne sentait en lui aucune joie,  aucune violence : rien d’autre que cette résignation, cette espèce d’avachissement qui succède aux longs efforts, bien qu’il n’en eût commis aucun depuis quatre mois.
    –  Shirton t’a conservé et soigné

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