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Les fils de Bélial

Les fils de Bélial

Titel: Les fils de Bélial Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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que je passerai mon chemin, mais pas avant que vous ne m’ayez dit où vous avez eu Malaquin et que vous ne l’ayez échangé contre le cheval qu’on m’a fourni.
    Le Bègue l’observait, une expression inquiète dans un regard aux aguets sous le mince bourrelet de sa coiffette d’emprunt, d’un rouge pâle, qui peut-être avait été coupée dans une vieille muleta. Poussant un long soupir où se dissolvaient les séquelles de ses remords ou de ses souvenances, le prud’homme se résigna :
    –  Puisque vous le voulez savoir, je suis parti… à pied… dans la bataille… après la félonie de Tello…
    C’était une révélation dont Tristan ne fut point trop surpris. Pour lui, soudain, le Bègue de Villaines devenait enfin ce qu’il avait pressenti depuis le passage en Espagne : tout bonnement un homme curial (531) . L’important, c’était qu’il apprît ce qu’étaient devenus ses deux  soudoyers, s’ils avaient été pris ou meurtris.
    –  Eh bien, soit, je fuyais, insista Villaines à l’intention d’Audrehem, attentif. Je fuyais ! insista-t-il, le visage fripé de colère et d’émoi et débégayant toujours.
    Deux garçons m’ont rejoint et m’ont dit me connaître… et qu’ils étaient à vous.
    –  Ah ! fit Tristan, soulagé mais dominant, cependant, un second remous d’indignation. Il fallait me le dire dès que vous vous êtes trouvé, messire, parmi nous dans les murs de Las Huelgas !
    –  J’avais autre chose à penser.
    Tristan sentit sa heuse frôler celle du Bègue et s’en écarta vivement comme s’il cheminait près d’un pestiféré.
    –  Quand vos garçons m’ont rejoint, j’étais seul. C’était avant que je rencontre Yanez… L’un d’eux m’a dit : « Messire, nous avons un cheval de trop. Prenez celui-ci et venez avec nous. » J’ai refusé… Je me sentais hors de danger et voulais traverser la Navarre… Nous nous sommes séparés. Ils vous croyaient morts, vous et votre écuyer.
    Il n’y avait aucune raison de s’appesantir sur l’attitude de Lebaudy et de Lemosquet. Ils avaient assisté à la fuite ignominieuse de Tello, ils avaient vu les compagnies anglaises percer celles du roi Henri et de Guesclin. Ils avaient dû passer sur l’autre berge de la rivière et galoper sachant la bataille perdue.
    –  Ils m’ont dit qu’ils allaient essayer de revenir en France… En Normandie.
    Cette confidence valait un bon prix. La Normandie, donc Gratot. Tristan souhaita qu’ils y parvinssent au moment où Villaines le menaçait :
    –  Si vous voulez ce cheval qui m’appartient, il vous faudra tirer l’épée.
    Tristan frémit en adressant au chevalier un sourire dont la moquerie et l’indulgence dissimulaient un mépris grandissant. Il connaissait la vivacité des impulsions qui commandaient à ses actes et la difficulté pour lui de tempérer toute ardeur suscitée par la fureur d’une injustice.
    –  Tirer l’épée, messire ? Vous savez que c’est interdit. Les Anglais ne seraient point marris, cependant, de voir deux d’entre nous se meshaigner pour la possession d’un cheval… Et qui vous dit que j’aurais le dessous ?… Échangeons nos montures… Je vous le demande en grâce.
    –  Je resterai sur la mienne.
    –  Allons, dit Audrehem soudainement agacé, lui aussi, par l’obstination de son compère. Allons, Pierre, c’est le cheval de Castelreng. Il vous faut le lui restituer. Celui qu’il monte a bonne mine… Il fait chaud. Cette chaleur vous essanne l’un et l’autre…
    Le maréchal laissa entendre une sorte de gémissement sur le destin des vaincus, sur l’accablement dont tous étaient victimes – soleil, lassitude, mystère aussi du lieu où on les emmenait ; sur la vanité des espérances qu’il avait partagées avec Guesclin lorsqu’ils étaient entrés en Espagne, sur le malheur d’avoir été trahis par Tello et Henri.
    –  Rendez-lui son cheval.
    –  Non, Arnoul, je resterai dessus.
    –  J’en doute, dit Tristan, car Malaquin, messire, m’a toujours obéi au doigt, à l’œil et au sifflet. Voyez !
    Un sifflement bref, impétueux, suffit pour réveiller l’humeur assoupie de Malaquin. Il se mit à ruer, à se cabrer, à mêler fa rouchement les pointes et les sauts de mouton. Jamais cheval n’avait, d’un seul coup, multiplié ainsi ses défenses.
    –  Il proteste, commenta Tristan. Il vous a toléré mais non point adopté.
    On eût dit que, sous la flanchière de la

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