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Les fils de Bélial

Les fils de Bélial

Titel: Les fils de Bélial Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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Bagerant, Calveley et le Bègue de Villaines demeurèrent en retrait de cette joie anticipée. Avaient-ils atteint la satiété ? Ce n’était assurément pas le cas de Sylvestre Budes qui demandait à son cousin où pouvaient bien se trouver les trois meurtriers de dame Blanche :
    –  Pour l’arbalétrier, on sait qu’il n’est pas loin. Mais pour les Juifs…
    –  Patience ! interrompit Guesclin. N’aie crainte, nous les chercherons à moins que la bonne chance ou la trahison ne nous les livre.
    Tout en méditant sur cette jubilation à laquelle il ne pouvait ni s’associer ni s’accoutumer, Tristan revint lentement vers ses hommes. Guesclin avait-il reçu, à propos des deux Juifs sévillans, un émissaire ? Daniel, Turquant : ces hommes étaient-ils dorénavant menacés ? Condamnés ? L’ambassaderie auprès de Pèdre, décidée par Guesclin seul, n’avait-elle été qu’une sorte de piège destiné à se débarrasser d’un compère décevant – Couzic – et de deux adversaires avérés ? Pèdre était cruel. C’était son surnom. Le Breton avait-il espéré qu’il châtierait les témoins de sa déchéance ?
    Paindorge qui marchait quelques pas en retrait, ne cacha point qu’il avait redouté qu’un commandement eût été donné d’envahir Séville coûte que coûte avant l’apparition, devant la cité, de celui qu’il appelait toujours le Tristemare.
    –  N’aie crainte, Robert. Guesclin veut offrir à son royal compère la satisfaction de se prendre pour un nouvel Alexandre. Aussi vrai que je suis Tristan !
    En revenant vers les murailles après avoir pris congé de Pèdre aussi cérémonieusement que possible, et tandis que Paindorge et Couzic chevauchaient devant, bannières hautes, il avait échangé quelques mots avec le fidalgo 92 qui les avait conduits jusqu’au palais du roi déchu : Franciso Olmedo. «  Le peuple semble être pour vous  », avait constaté l’Espagnol en découvrant sur la plupart des visages des expressions de bienveillance qui ne le concernaient pas. «  Je crains, cependant, qu’ils ne vous résistent férocement. » Et Olmedo de révéler que Fernand de Castro s’était rendu sur ses terres, au royaume de Galice, et qu’il allait y faire de son mieux pour amasser de l’argent et lever une grande armée afin de poursuivre la guerre, tandis que Pèdre quitterait nuitamment Séville pour aller demander le secours des Maures, sachant qu’un gros embarquement se préparait en Afrique et que les Grenadins n’attendaient que son arrivée pour entrer en campagne. «  Pe dro partira avec quelques fidèles hommes liges et quarante Sévillans pris dans la bourgeoisie 93 . Vous pouvez lui barrer le chemin. » Ces révélations et cette suggestion avaient disqualifié Olmedo dans l’estime que le Francés était près de lui accorder.
    Tristan soupira. Il s’était refusé de révéler cette fuite à Guesclin. Ce n’était pas au Breton de prendre Pèdre – il s’en fut trop jacté 94 -, mais à Henri. De plus, dans cette guerre qui ne le concernait pas, il n’était ni pour un roi ni pour l’autre.
    Soudain, la pluie tomba serrée, impétueuse, Tristan courut jusqu’à Serrano, Lemosquet et Lebaudy qu’il congratula pour avoir planté leur tref dans un bosquet où les chevaux et Carbo nelle se trouvaient en partie épargnés par la tourmente. Le jour devint une espèce de nuit rayée par quelques éclairs.
    –  Le ciel semble courroucé, dit Serrano. Reste à savoir contre qui !
    Depuis la destruction de sa guiterne, le trouvère avait perdu sa gaieté, sa faconde. Le rapt d’un enfant l’eût mis dans un pareil état. Tristan savait qu’il pensait constamment à Simon et à Teresa. Et lui donc !
    Après qu’il eut décidé des tours de veille, il ôta son armure avec l’aide de Paindorge auquel il rendit le même service. Il mangea et but peu : une tranche de lard sur du pain et deux gobelets de ce vin d’Espagne, bien meilleur que celui des vignes de la Langue d’Oc.
    Il se coucha sur l’herbe aplatie par les corps et les pieds de ses compagnons et ferma les paupières. Ce n’était pas qu’il eût envie de dormir. L’immobilité lui plaisait en même temps qu’elle reconstituait ses forces musculaires et nerveuses. L’eau crépitait à peine sur le cône pointu revêtu d’homespun 95 . Tout proches, les chevaux sabotaient : après tant de lieues parcourues sous les feux d’un soleil ivre de sa magnificence,

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