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Les fils de Bélial

Les fils de Bélial

Titel: Les fils de Bélial Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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Pèdre t’a-t-il menacé de mort ainsi que les deux autres ?
    –  Il s’est conduit comme un prud’homme envers notre ambassaderie.
    –  Tu mens ! affirma Guesclin.
    Bien que son attitude lui coûtât, Couzic fut contraint de se ranger du côté de l’homme qu’il haïssait contre celui qu’il révérait :
    –  C’est vrai, Bertrand. Nous avons été dignement reçus. C’est vrai aussi que ce Pèdre est effrayant.
    « J’en connais d’autres », songea Tristan qui échangea un regard avec Paindorge.
    –  Comment sont les gens de Séville ? demanda Jean de Bourbon. Avez-vous senti à notre endroit la même haine que les gens de Briviesca ?
    C’était vraiment une question hideuse – autant qu’une question pût l’être. Les gens de Briviesca pouvaient légitimement abhorrer ces Français qui avaient occis une grande partie de leurs concitiens 88 . Ceux de Séville, pour le moment, ignoraient ce qui les attendait s’ils essayaient de résister à la fureur des Compagnies.
    –  Nous n’avons senti aucune haine, monseigneur, dit Paindorge. Seulement de l’indifférence. Les Sévillans voudraient être délivrés de Pèdre et de notre présence.
    –  Les Juifs sont-il nombreux ?
    L’obsession de Guesclin recommençait à s’enfiévrer. Sans doute imaginait-il à l’avance le grand treu 89 auquel on se livrerait une fois dans les murs de cette cité impure.
    –  Ils portent pas la rouelle, dit Couzic. On peut pas savoir qui est Juif et qui l’est point. Mais ils ont leur quartier et leur forteresse.
    –  Eh bien, broncha Guesclin, on les leur prendra.
    Il fallait, cependant, pour passer à l’action, attendre la venue du décideur suprême : le roi Henri.
    Il survint, soucieux, dans l’après-midi du lundi 25 de ce mois de mai où dans le ciel, depuis quelques jours, grondaient des orages secs dont Tristan redoutait l’imminente furie. À l’effervescence du ciel correspondait celle des hommes qu’une inactivité inattendue titillait. Il n’était pas rare qu’ils se cherchassent querelle pour en venir aux poings puis aux armes. Il y avait des morts. On les jetait dans le Guadalquivir.
    L’apparition du roi transforma la morosité en liesse et la hargne en bénignité. Plutôt que de s’entre-occire, on allait disposer de belles occasions pour châtier des manants à l’esprit tortueux. Car il fallait être corrompu corps et âme pour respirer le même air que des Juifs et des Mahomets.
    Henri tint conseil le soir même de son arrivée. Il y avait auprès de lui, revêtus de leurs mailles, leur bassinet à la hanche. Gomez Carillo, camarero-mayor du roi, Diego Garcia de Padilla, Grand Maître de Calatrava sous don Pèdre et frère de Marie de Padilla ; Garcia Alvarez, de Tolède, Grand Maître de Santiago sous don Pèdre 90 et qui, comme Padilla ne vergognait point 91 d’avoir changé de tyran.
    –  Nous sommerons demain les Sévillans de nous ouvrir leurs portes, déclara Guesclin en se frottant les mains. N’est-ce pas, mon roi ?
    Il n’eût pas parlé à sa maîtresse avec autant de ferveur sinon de dévotion.
    –  Certes ! Certes ! dit Henri. Mais avant que de commencer, il me faut vous annoncer une bonne nouvelle. Alors que nous cheminions à deux lieues de Séville, un chevaucheur est venu…
    –  Vous annoncer la présence, derrière vous, d’Olivier de Mauny, mon cousin !
    Le roi parut agacé. «  Tsitt, tsitt  », fit sa bouche... Guesclin baissa la tête.
    –  Ce chevaucheur, Paco Sotelo, m’a remis un bref de l’alcade de Jerez. Le 20 de ce mois de mai, messire Bourbon, c’est-à-dire, il y a cinq jours, les manants de sa bonne cité, qui se sont déclarés pour moi, ont appréhendé le ballestero, l’arbalétrier Juan Pérez de Rebolledo entre Jerez et Medina Sidonia… Ils doivent nous l’amener… Je pense que vous le pourrez voir et châtier demain.
    –  Faudrait savoir, dit Guesclin, si c’est lui ou si ce ne sont pas ces deux Juifs, Daniel et Turquant, les conseillers de Pèdre… En avez-vous ouï parler, vous tous ?… Non !… Moi si. Et innocents ou coupables, je les veux châtier du seul fait que Pèdre les aimait !
    Plutôt qu’occire un homme, on en occirait trois. Ainsi, Bourbon et lui, Bertrand, pourraient être contents.
    Quoique parent éloigné de la malheureuse princesse, Antoine, sire de Beaujeu, battit des mains. Il serait au premier rang pour la curée. Des sourires fleurirent sur la plupart des bouches.

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