Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les fils de Bélial

Les fils de Bélial

Titel: Les fils de Bélial Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
Vom Netzwerk:
Oriabel naguère. Un regret l’envahit à cette pensée, mais il le rejeta comme incongru.
    –  Je suis ta guitarra. Ma rose est à toi si tu touches mes cordes. Je chanterai pour toi de tout mon corps.
    Ce n’était pas la première fois qu’elle employait ce langage : il paraissait trop apprêté. Elle en avait choisi les mots de longue date ; il choisirait les gestes, les attouchements, les arpèges et la mesure. Francisca n’étant point une ribaude, il s’étonnait que les prémices de leur aventure eussent été d’une aussi courte durée. Dehors, la pluie tintait sur les tuiles roses, bombées comme celles de la Langue d’Oc, sans que son chant eût la tristesse qui, un moment, s’était insinuée dans les prunelles de la danseuse. Elle ne parlait plus mais de son souffle émanait une sorte de bercement, l’accent d’une âme qui souffre, espère et se résigne. Il ne la comprenait pas. Cet enjouement puis cette attente assombrie par la pluie qu’elle devait détester.
    –  Ces gouttes, dit-elle. As-tu songé que ce sont les larmes de Dieu ?
    Non, il n’y songeait pas. Il n’y avait jamais songé. Il se dénudait sans qu’elle perdît un seul de ses mouvements. Son regard n’était pas appuyé. Il volait d’une partie de son corps à une autre, brillant, cligné, sans la moindre malice. Elle était suffisamment avertie sur les hommes pour ne point craindre le Francés.
    –  Tu es beau, fit-elle, pensive.
    Était-ce suffisant ? Il sourit. Ce n’était pas une vertu qu’il fût beau. Et d’ailleurs l’était-il ? Cependant, il lui était infiniment doux d’être reconnu et accueilli comme tel, de se sentir admiré lui aussi. « Beau, moi ? » Aucune femme ne le lui avait dit encore. Il -fallait que ce compliment fût le fait d’une étrangère pour qu’il prît, tout à coup, tant de saveur et d’importance. Elle ne l’examinait déjà plus avec la même admiration caressante, mais avec cette complicité, cette connivence et ce vacillement des yeux qui tout en récusant la convoitise ne la rendaient que plus véhémente. Il n’espérait plus, depuis longtemps déjà, qu’il pût exister une femme capable de le regarder ainsi.
    Elle se poussa vers le mur pour qu’il eût ses aises et prît une attitude alanguie, voluptueuse, afin que, patiemment, il l’admirât.
    –  Je te plais ?
    Ce n’était pas le langage qu’il attendait. Il eût aimé qu’elle fût silencieuse. Maintenant, ils semblaient se défier l’un l’autre. Il la surplombait et contournait d’un regard dont elle n’avait point coutume la courbe de la taille, le renflement des épaules, le modelé des seins sur lesquels elle apposa ses mains aux doigts écartés comme pour les soustraire à un examen qui leur serait défavorable tout en les lui laissant entrevoir.
    –  Tu me touches des yeux.
    –  Contempler, Francisca, c’est toucher du regard.
    Cette lenteur la déconcertait. Ses joues se teintaient sous l’afflux du sang qui la brûlait tout entière. Belle, attentive. Et lui qui s’enivrait de cette découverte : une femme ! Depuis le temps qu’il avait été privé de ce trésor vivant : la nudité, la vérité d’une femme, il pouvait, il allait en profiter de son mieux !
    Il effleura enfin d’une bouche tremblante, les hanches fermes, les cuisses, la touffe de mousse sombre différente d’autres broussailles qu’il avait imaginées parfois quand des envies le prenaient d’avoir un corps féminin près de lui et qu’il rêvait de voir cette amante inconnue devancer ses velléités. Or, ses songeries les plus hardies différaient de cette réalité qui s’exprimait avec Francisca, avec son corps, son regard, son attente, sa moiteur et le goût de sa chair d’ambre et de lait. Il la baisa sur la bouche, le cou, un sein. D’une torsion aussi vive que dans ses danses, elle se mit sur le ventre et il admira ses nasches 128 et ce potron fendu d’ombre courbe, doubles fruits soyeux dont ses lèvres errantes durcirent la pulpe, avant d’admirer les jambes fermes, étendues, épilées, d’une souple vigueur et qui, dès la vesprée, magnifieraient les airs de guiterne dans un étincellement de bracelets et de souliers aux reflets d’argent.
    Elle soupira quand une main douce l’ouvrit. Il vit sa chair frémir et son grain se durcir. Elle se tourna, anxieuse de ces commençailles. Sans doute, ceux qu’elle avait reçus s’étaient-ils contentés de la prendre et de la lâcher

Weitere Kostenlose Bücher