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Les fils de Bélial

Les fils de Bélial

Titel: Les fils de Bélial Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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deux gestes prompts et habiles, elle dénoua ses cheveux dont les ondes roulèrent sur ses épaules, son dos, sa poitrine comme un sombre camail, et ses sourcils s’allongèrent, arcs minuscules au-dessus des regards qui décochaient des traits dont Tristan se sentit atteint.
    –  Tu es belle. Je friolais 127 de te revoir et c’est toi qui maintenant me brûles.
    Elle était debout, immobile dans la lumière avaricieuse d’un jour qui se mourait. Il voyait frémir sa taille élancée, ses épaules nobles, son profil tourné vers la fenêtre où venait de se poser un moineau. Tout ce qu’elle possédait d’indolence et de langueur se révélait à lui seul. En fait, elle craignait de procéder avec trop de hâte et se demandait, anxieuse : « Que va-t-il penser de moi ? » Mais elle fit un pas vers cet hôte qu’elle avait voulu et qu’elle avait obtenu sans user des artifices de la toilette, de la séduction, ni même de ces œillades satinées dont les Sévillanes sem blaient prodigues. Nul doute que son pucelage avait été cueilli lors de sa jeunesse prime et qu’elle aimait l’amour aussi bien que la danse.
    D’un geste, désignant les murs puis le lit couvert d’une courtepointe où se mariaient le noir, le blanc et le vert, il lui demanda si elle vivait toujours seule. D’un bref mouvement du cou, elle répondit affirmativement, et comme elle se penchait à la fenêtre, il comprit qu’elle était insoucieuse de ce qui se passait au-dehors, qu’elle regrettait de lui avoir menti et voulait qu’il la vît ainsi, dans ses vallonnements et ses rondeurs, de la tête au pied qu’elle dénudait en s’aidant des orteils. Ses sandales glissèrent vers le dessous du lit où l’une d’elles heurta quelque chose de sonore, – sans doute un tambourin.
    Alors, elle lui fit face. Il l’admira encore : le front haut, les lèvres roses, entre-closes sur les perles des dents. Le nez était petit, d’une stricte effilure, les joues à peine creuses, le menton hardi mais sans présomption, le cou long et gracile. De ses doigts ouverts, elle le dégagea des cheveux dont les boucles du devant sinuaient jusqu’à sa poitrine. Un seul regard, cette fois, renouvela le désir qu’elle avait du Francés.
    Elle levait les yeux sur lui comme elle l’eût fait devant un juge alors qu’elle n’ignorait rien d’une admiration qui progressait encore.
    « Bon sang ! » se dit Tristan.
    Le désir lui chauffait les reins et embrasait sa tête. La solitude et soudain ce joyau de la féminité. Soudain aussi, dans ce pays où les Compagnies avaient répandu la haine, cette espèce d’amour hors de l’espace et du temps. La violence des battements de son cœur, pour une fois, n’était due ni au chagrin ni à la malerage mais à une sorte d’ivresse. Il voyait Francisca au travers d’une indicible griserie : la même qu’il avait éprouvée et réprouvée la veille, et les torsions de son buste, tandis qu’elle enlevait sa robe par le haut, ne pouvaient qu’exaspérer des sens trop longtemps moroses – ou endormis. Il tira parti du peu d’espagnol appris le long des chemins et des haltes pour lui dire qu’elle était plus belle encore dans sa robe de dessous, noire, brillante – du satanin sans doute – et elle s’approcha, scruta ses yeux avec une insistance profonde comme pour y découvrir matière à suspicion sinon à mécontentement.
    –  Vas-tu rester longtemps à Séville ?
    Elle revenait sur cette question à laquelle, franchement, il ne pouvait répondre.
    –  Un jour viendra où je devrai partir.
    –  Dieu t’a placé sur mon chemin.
    Elle montrait la croix, une croix de chêne brun terni en son milieu par des baisers humides. Tristan s’interdit de parler davantage. À quoi bon révéler qu’il lui tardait de quitter l’Espagne. Les regards obliques ou directs que Francisca lui lançait, tandis qu’il déceignait son épée, rejetaient son personnage de guerrier pour ne laisser subsister qu’un homme hanté par des envies qu’elle savait pouvoir contenter.
    Il la prit dans ses bras et fit choir les derniers linges. Elle était près du lit et s’y laissa tomber pour s’allonger aussitôt sur le dos, pâle et tachée d’un brun profus, la tête reposant sur ses paumes et laissant ainsi paraître des aisselles aux goussets rasés. Il s’émerveilla tout autant de sa beauté que de la simplicité avec laquelle elle la lui avait révélée : sereine, naturelle – comme

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