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Les Fils de France

Les Fils de France

Titel: Les Fils de France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Franck Ferrand
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deviner la masse sombre, pour en apercevoir enfin les tours, les créneaux, les échauguettes...
    — Mon Dieu ! dit Montejehan quand ils atteignirent le pont-levis.
    Le grand maître ne bronchait pas, mais à son sourire mauvais, ses familiers comprirent que sa colère intérieure était vive. Car de part et d’autre du châtelet d’entrée, le dauphin avait fait pendre aux créneaux, comme de vulgaires bandits, quatre des défenseurs du fortin – sans doute le capitaine et ses officiers.
    Henri de France, entouré des jeunes Brissac, La Noue et Saint-André, attendait son cher maréchal dans la cour. Tous plastronnaient, la pose avantageuse et le sourire entendu. N’avaient-ils pas fait merveille en emportant le fort d’un seul mouvement ?
    — Mon cousin, lança le dauphin, je suis heureux de vous accueillir en cette place d’Avigliana, désormais acquise à la France !
    Le maréchal lui donna l’accolade et, restant à portée de l’oreille du prince, lui parla à mi-voix.
    — Vous avez fait là un joli travail. Voulez-vous donner des ordres pour que l’on détache ces pendus ; ils vont nous attirer les corbeaux. Ensuite, veuillez me suivre : j’ai à vous parler.
    L’élève rejoignit le maître dans la salle noble, au premier étage.
    — Avant tout, dit-il, je dois vous expliquer les...
    — C’est moi, monseigneur, qui vais vous expliquer pourquoi, dans cette rencontre, vous avez abusé de ma confiance.
    Plus massif, plus sanguin, plus imposant que jamais, le maréchal de Montmorency dispensa une grande leçon à son disciple princier. Tout y passa : l’honneur des armes, le respect de l’adversaire, l’adaptation aux fins, l’ouverture diplomatique, la clémence du vainqueur... Henri aurait eu beau jeu d’avancer mille occasions passées où Montmorency s’était montré bien plus cruel que lui, mais il n’osa pas. Le grand maître n’était guère, il est vrai, d’humeur à disputer.
    — Où est la noblesse de votre acte quand, laminant sans tactique une si petite place, vous en assassinez les hommes et punissez les chefs ? Où est-elle ?
    Le dauphin, s’attendant à ce qu’on lui tressât des lauriers, ne s’était en rien préparé à une telle volée de bois vert. Les larmes aux yeux, il tenta mollement de se défendre.
    — Je voulais donner exemple à ceux qui s’obstinent contre nous...
    — Et vous n’avez donné qu’une bonne raison de s’obstiner à ceux qui, peut-être, étaient sur le point de céder. Ne comprenez-vous pas, Henri, qu’en exterminant ici quarante soldats, vous venez d’en renforcer quarante mille ailleurs ? Mais quand cesserez-vous donc d’avoir les yeux fixés sur le petit, quand c’est le grand qui, en prince de France, devrait vous occuper ?
    Le jeune homme opinait du chef, autant pour apaiser Jupiter que par respect envers son ire céleste... À la fin, alors qu’il s’apprêtait, tout mortifié, à se retirer, le grand maître le prit paternellement par les épaules.
    — Il n’empêche, dit-il, vous êtes vaillant et brave.
    Le dauphin releva les yeux. Montmorency l’embrassa.
    — Et vous avez fait tout juste ce que j’aurais fait à votre âge...
    Le menton du jeune homme tremblotait.
    — À présent, conclut le grand maître, allez vous reposer. Car demain, nous irons mettre le siège devant Moncalieri. Ensemble.
    — Merci, monsieur le maréchal.
    — Bonne nuit, monseigneur.

    La place forte de Moncalieri, position maîtresse des Impériaux en Piémont, était défendue par le marquis del Vasto en personne. Ses environs s’étaient rendus, sans coup férir, aux Français. Cependant les approches de siège ne pouvaient se faire que par les marais du Pô où, toute une journée durant, de l’aube à la nuit tombée, sans manger ni souffler un instant, le dauphin Henri et ses compagnons menèrent les troupes, à portée de mitraille, avec de l’eau jusqu’aux genoux. À la fin, conformément aux plans du grand maître, des renforts détachés de l’armée du roi se présentèrent à point pour impressionner l’ennemi. Del Vasto donna l’ordre à ses troupes de se retrancher au-delà du fleuve ; et dès lors la victoire était acquise à Montmorency.
    — Vous ai-je déjà dit, Henri, que vous étiez un brave ?
    — Oui, mon cousin. Pas plus tard qu’avant-hier...
    Une complicité filiale s’était instaurée entre le maréchal et son chef officiel – en réalité son élève. Elle trouvait à s’épanouir

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