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Les Fils de France

Les Fils de France

Titel: Les Fils de France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Franck Ferrand
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outre ; il ne s’attarda pas sur les captifs de plâtre, enchaînés de part et d’autre de la fresque – allusion transparente aux victoires encore fraîches du roi de France sur son adversaire éternel...
    — Mon cousin, compatit François, la route a dû vous épuiser ; laissez-moi vous conduire jusqu’à vos quartiers.
    Car en dépit du peu de temps dont avaient disposé ses architectes, François avait fait aménager pour Charles un pavillon entier, dans l’angle de la cour de la Fontaine. L’aigle impériale des Habsbourg, noire sur fond d’or, flanquée de la devise impériale : « Plus qu’oultre », sommait l’entrée monumentale d’appartements de grand confort, chauffés – attention plus que délicate – par toute une population de poêles de faïence à la mode allemande ; d’où ce nom qui devait rester de « pavillon des Poêles ».
    Charles Quint, toujours transi de froid, se précipita vers le plus proche d’entre eux et se frotta les mains à cette bonne chaleur. Les traits de son visage ingrat, prognathe, se détendirent enfin.
    — Votre hospitalité ne connaît point de limites, reconnut-il à son hôte.
    — Mon seul souci est de vous plaire, admit François.
    — En quoi vous réussissez à merveille !
    L’empereur Charles – après encore quelques présentations et des propos aimables, diplomatiques, attendus, répétés – put enfin jouir d’un peu de repos, retiré dans sa chambre avec quelques intimes. Il scruta en silence la soie cramoisie des cimaises, les aigrettes au sommet du baldaquin, la pyramide de fruits confits sur la table d’argent, et les bannières brodées et rebrodées... Il envisageait avec soulagement de sacrifier à une sieste réparatrice ; mais s’approchant du lit, ce fut pour constater que ces Français impénitents, ostentatoires, avaient été jusqu’à coudre des perles vraies et des pierreries sur le ciel de lit et la courtepointe de drap d’or !
    — Voyez cela, dit-il aux seigneurs espagnols qui l’accompagnaient. N’est-ce pas dément ?
    Ils partirent ensemble d’un bon rire libérateur – rire de défense contre une volonté si déplacée de les éblouir par tous les moyens.

    À l’issue de la messe de minuit, divinement chantée par la Chapelle royale, un banquet digne du Messie fut servi dans la galerie nouvelle. L’empereur était assis entre sa sœur, la reine Éléonore, épouse légitime du roi de France et... la duchesse d’Étampes, maîtresse officielle et déclarée ! Le souverain Très Catholique, de surcroît veuf inconsolable, trouvait in petto cette situation aberrante ; mais il n’en montra rien et, souriant même à la belle, alla jusqu’à en rajouter dans la prévenance à son égard. C’est alors que survint un de ces petits épisodes que la chronique, friande d’images fortes, s’empresse de consigner pour les livrer à la postérité.
    Des laquais en grande tenue présentaient, au début du festin, de vastes bassins de vermeil, fort travaillés et remplis d’eau parfumée pour les mains des convives. L’empereur, par précaution, retira l’énorme bague qu’il portait et, au moment de la repasser à son doigt, la laissa – peut-être de volonté délibérée – glisser dans la serviette de lin brodé que lui tendait, en personne, la duchesse d’Étampes. La jeune femme, habilement, se saisit du joyau avant qu’il ne tombât au sol et, dans un ravissant sourire, le rendit à son propriétaire.
    — Oh non, dit Charles à mi-voix.
    On le vit s’approcher de la favorite, pour lui parler tout bas.
    — Gardez-la, dit-il, je vous en conjure ! Elle sera trop heureuse d’orner une si jolie main.
    Sur quoi la duchesse, sans trop se faire prier, mit la bague à son doigt et, peu discrète, la montra au roi aussitôt. Celui-ci remercia l’empereur, et d’autant plus vivement qu’il regardait comme une grâce personnelle, la moindre gentillesse adressée à sa tendre amie.
    Un peu plus tard dans le cours du banquet, François I er – qui pourtant avait promis à Montmorency de n’aborder, de tout le séjour, aucune question territoriale avec son hôte – s’autorisa, le vin aidant peut-être, une légère entorse.
    — Mon cousin, dit-il en désignant Anne, cette dame me supplie d’évoquer avec Votre Majesté la question, certes préoccupante pour un père, du devenir d’un autre Charles...
    Le plus jeune fils du roi se prénommait Charles, en effet ; il était désormais

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