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Les Fils de France

Les Fils de France

Titel: Les Fils de France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Franck Ferrand
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jamais liée à la puissance du dauphin ; or, tant que la princesse Catherine n’aurait pas donné d’héritier à la dynastie, cette puissance-là continuerait de manquer d’assise.
    Puisque l’on savait, maintenant, que le dauphin Henri n’était point stérile, la priorité de Diane pouvait s’énoncer en quelques mots : rendre féconde la petite Médicis !
    C’est la raison pour laquelle chaque soir – et souvent en dépit de ses sentiments propres – elle poussait son jeune amant vers le lit de son épouse. Elle lui recommandait de se montrer entreprenant, vaillant, tenace... Rien n’y faisait. La sénéchale priait, jeûnait et faisait dire des messes, tandis que la dauphine, elle-même obsédée par ce devoir dont elle ne pouvait s’acquitter, se lançait dans d’improbables pèlerinages à quelque saint local, à quelque pierre antique... Catherine s’entourait aussi d’astrologues, de mages et de guérisseurs qui, pas mieux que les herboristes missionnés par Diane, ne contribuaient à sa fertilité.
    On en vint, à force de tout essayer, aux procédés vils et sordides. Et la pauvre princesse se laissa couvrir la matrice d’un cataplasme fait de bouse et de vers de terre écrasés, avant de consentir, en désespoir de cause, à ingurgiter chaque jour une pleine timbale d’urine de mule encore chaude ! On n’ose imaginer jusqu’où serait allée la malheureuse si Mme de Poitiers, ramenant tout à la raison et mettant à profit son bon sens maternel, n’avait su dénicher la perle rare : un bon médecin.
    Jean Fernel, à première vue, ne payait pourtant pas de mine : à la fois maigre et rougeaud, le cheveu gris, rare et hirsute, il tenait plus du charlatan de foire que de l’archiatre 2 , et paraissait voué, par sa mise, à l’éradication des verrues malignes. Mais à la plus riche expérience, il alliait ce don du Ciel qu’est la mobilité d’un esprit ouvert. Aussi bien dès le premier examen, il lui parut que ce qui entravait le couple princier dans sa procréation, relevait d’un souci mécanique en tous points. En effet, si la malformation du dauphin était chose connue, Fernel révéla que son épouse aussi, par une malchance rare, présentait de ce côté une légère infirmité... De sorte que, féconds l’un et l’autre, ils formaient un couple stérile !
    Le médecin en savait assez dans l’art d’aimer pour livrer à Henri, en quelques mots discrets mais parlants, la façon de passer l’obstacle. Un peu de contorsion ne pouvait guère embarrasser un tel athlète – sans compter qu’elle offrirait à sa conjointe un peu de la variété qu’elle enviait à sa rivale...

    C’est l’apanage des solutions limpides que d’offrir des résultats clairs : quelques mois plus tard seulement, l’annonce que la dauphine était grosse faisait le tour de la Cour, du royaume, de l’Europe entière.
    Pour la joie de la sénéchale. Et le tourment de la duchesse.
    1 - La principale place de la Navarre septentrionale, à l’Ouest de Pau.
    2 - Médecin attitré d’un grand personnage.

Chapitre VIII
    Enfin !
    (Automne 1543 et Hiver 1544)

Château de Blois.
    L e cardinal de Tournon, plus prompt à garantir sur le papier le soutien de la France qu’exact à le prodiguer dans les faits, avait laissé le duc de Clèves se battre seul contre les Impériaux dans tout le Cercle de Bourgogne 1 . Charles Quint en avait bien évidemment profité ; et s’assurant le renfort de sa sœur, Marie de Hongrie, il s’apprêtait à faire subir à l’héritier de la Gueldre une défaite sur tous les fronts.
    Afin de calmer la colère de cet ami trompé, les Français avaient évoqué, en conseil, l’opportunité d’envoyer au malheureux duc cette épouse un peu forcée que son oncle avait instituée garante charnelle de l’alliance... Et Tournon, qui n’était plus à une vilenie près, soutint l’idée sans réserve.
    Il avait donc fait venir Jeanne à Blois, où se trouvait la Cour, et lui avait expliqué qu’elle devait se préparer à partir pour l’Allemagne rejoindre son époux... Outrée de cette infamie supplémentaire, mais courageuse et confiante dans son étoile, la jeune infante avait relevé le menton ; elle ne pouvait plus prétexter ni de la santé, ni de l’âge. Elle demanda donc que l’on préparât ses bagages. Une semaine durant, c’est elle qui avait dû consoler la pauvre Aimée de Lafayette, effondrée à l’idée de voir sa future reine de

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