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Les fils de la liberté

Les fils de la liberté

Titel: Les fils de la liberté Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Diana Gabaldon
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qu’à répéter Seigneur, je vous en supplie ! Il aurait aimé que Brianna soit avec lui mais il n’était pas question que Mandy approche des pierres. S’ils arrivaient à temps pour arrêter Cameron… si Cameron était vraiment venu ici… il était raisonnablement sûr que Buccleigh l’aiderait.
    Quelque part au fond de son esprit, il avait le mince espoir que Cameron se soit trompé de date et que, s’en étant rendu compte, il soit en train de ramener Jem à la maison, au moment même où ils fonçaient à toute allure sur une landerocailleuse, son bougre d’ancêtre et lui, se dirigeant droit vers la chose la plus terrifiante qu’ils aient jamais connue.
    Incapable de supporter ses propres pensées, il balbutia :
    — Cameron… il a lu le cahier lui aussi. C’était par accident. Il a fait semblant de croire que c’était un roman, un texte que j’avais écrit comme ça, pour rire. Mon Dieu, qu’est-ce que j’ai fait ?
    Buccleigh couvrit soudain son visage de ses bras en hurlant :
    — Attention !
    Roger pila, dérapa hors de la route et percuta un rocher, manquant d’un cheveu la camionnette bleue arrêtée au milieu du passage, moteur éteint et vide.
     
    Il grimpa la colline à toute vitesse, cherchant des prises à l’aveuglette, les cailloux roulant sous ses pieds. Les piquants des ajoncs lui écorchaient les mains et lui rentraient sous les ongles. Il savait William Buccleigh derrière lui, le suivant lentement mais sûrement.
    Il commença à les entendre avant d’atteindre le sommet. Il restait trois jours avant la Samhain et les pierres le savaient. Le son qui n’en était pas un vibrait dans la moelle de ses os, résonnait dans son crâne et ses mâchoires. Il serra les dents et continua de monter. Lorsqu’il arriva en vue des pierres, il avançait presque à quatre pattes.
    Mon Dieu, protégez-moi ! Gardez-moi en vie assez longtemps pour le retrouver !
    Il avait un mal fou à formuler ses pensées mais il se souvint de la torche. Il l’avait prise dans la voiture. Il l’extirpa de sa poche, la fit tomber, fouilla frénétiquement dans les herbes du cercle, la trouva enfin et dut s’y reprendre à quatre fois pour presser le bon bouton.
    Le faisceau lumineux jaillit et il entendit un juron étouffé dans son dos. Naturellement, William Buccleigh n’avait encore jamais vu de torche électrique. Le faisceau balaya lentement le cercle de pierres, d’un côté puis de l’autre. Que cherchait-il ? Des empreintes de pas ? Quelque chose que Jem aurait laissé tomber ?
    Il n’y avait rien.
    Rien que les pierres. Le son empirait. Il laissa tomber la torche et se prit la tête entre les mains. Il devait bouger… aller… aller chercher Jem.
    Il rampait dans l’herbe, aveuglé par la douleur, incapable de réfléchir. Puis des mains puissantes lui agrippèrent les chevilles et le traînèrent en arrière. Il crut entendre une voix mais elle se perdit dans le hurlement strident à l’intérieur de sa tête, de son âme. Il cria le nom de son fils de toutes ses forces pour tenter de couvrir ce bruit infernal mais, bien qu’il sente sa gorge se déchirer sous l’effort, il ne s’entendit pas.
    Puis la terre remua sous lui et le monde bascula.
     
    Quand il revint à lui un peu plus tard, il était aux côtés de William Buccleigh dans une petite dépression sur le flanc de la colline à une dizaine de mètres du cercle. Ils étaient tombés et avaient roulé jusque-là, il le devinait à ses membres douloureux et à l’allure de Buccleigh. L’aurore approchait et son parent, couvert de terre et d’égratignures, était assis le dos voûté, recroquevillé sur lui-même comme s’il avait mal au ventre.
    — Qu’est-ce… commença-t-il.
    Il se racla la gorge et fit un nouvel essai mais ne parvint qu’à émettre un murmure qui lui brûla la gorge.
    William Buccleigh marmonna quelque chose dans sa barbe et Roger comprit qu’il priait. Il se redressa péniblement en position assise, la tête lui tournant. Il réussit néanmoins à demander dans un râle :
    — Tu m’as traîné jusqu’ici ?
    Buccleigh garda les yeux fermés jusqu’à ce qu’il ait achevé sa prière. Puis il les rouvrit et son regard alla de Roger au sommet de la colline. Les pierres invisibles émettaient toujours leur chant épouvantable mais, Dieu merci, de là où ils étaient, ils ne percevaient qu’un gémissement sinistre qui donnait la chair de poule.
    — Oui, répondit Buccleigh.

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