Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les fleurs d'acier

Les fleurs d'acier

Titel: Les fleurs d'acier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
Vom Netzwerk:
et lui, Argouges, pour des truands…
    — Tiens les chevaux.
    L’écuyer réunit dans ses mains les deux rênes, puis fléchissant les genoux :
    — Voyez donc, messire.
    Ogier se pencha. L’herbe était piétinée. Des fers y avaient creusé une quadruple chaîne d’empreintes : elles s’en allaient en droite ligne vers l’entrée de l’ermitage.
    — Ils étaient au moins deux. C’est tout ce qu’on peut dire… Leur forfait accompli, ils sont partis sans doute à l’opposé du chemin que nous avons pris.
    — Oui, Thierry… Reste ici, je vais faire un tour.
    — Soyez prudent et hâtez-vous : Veillantif commence à s’effrayer !
    Le cheval hennit et rua. L’incendie lui faisait l’œil rouge et furieux. Ogier fut tenté de caresser son chanfrein mais y renonça, crainte d’être mordu. Marchegai reçut la flatterie.
    Herbes rouges, brandons, tout avait la couleur, l’odeur, la frainte [193] de l’enfer.
    « Si Blainville a occis Gerbold, qu’il soit damné ! »
    Tenant son épée à deux mains, le garçon s’écarta d’une muraille grésillante et suant des vapeurs vermeilles.
    — Tiens, qu’est-ce donc que ces formes ?
    Il s’en approcha et grogna : c’étaient deux chèvres. Égorgées. Plus loin, c’était un chien. Égorgé.
    — Mon Dieu, que lui ont-ils fait à lui ?
    Fouillant la nuit d’un regard larmoyant, il contourna le brasier d’aussi près que possible. Oppressé, angoissé, il rejoignit Thierry :
    — Rien… Ils s’en sont pris au chien et aux bestiaux…
    Il toussait et respirait péniblement. Comme Marchegai se cabrait, il rengaina Confiance et mena son destrier par la bride.
    — Nous ne pouvons rien, messire… Pensez-vous qu’ils ont occis ce saint homme ?
    — Ils en avaient envie depuis longtemps. Dans leur fureur d’avoir laissé partir Montfort, ils s’en sont pris à Gerbold… Mais qu’en ont-ils fait ?… Allons, viens ! Partons et méfions-nous…
    Thierry hésita. La lueur tremblée des flammes voilait de vermillon la pâleur de son visage d’où la fureur et l’indignation refluaient.
    — Viens ! insista Ogier. Par le sang du Christ, je les vengerai, lui et ses bêtes !
    Le remords et le découragement le gagnaient. Pourquoi s’était-il abstenu d’accomplir un détour par l’ermitage avant d’atteindre Gratot ? Il avait bien visité frère Peynel à Hambye… Il revoyait Gerbold tel qu’il l’avait quitté : barbe grise, sourcils de neige, chair rougeaude, sourire triste ; la bure ceinte de chanvre et les pieds nus…
    — Ses vieilles jambes l’ont empêché de fuir.
    Il toussa, la gorge irritée.
    — Viens. Hâtons-nous car Gratot est peut-être assailli !
    Or, son inquiétude était vaine : le château, paisible, semblait les attendre. Sitôt le pont-levis remonté, Aude courut au-devant de Thierry ; des ombres chuchoteuses la suivirent : les femmes. Ogier entrevit Guillemette et Bertine, éloignées l’une de l’autre, l’air innocent.
    — C’était bien chez Gerbold… Où est mon père ?
    — Je descends, annonça une voix dans l’obscurité de la machinerie. Je manœuvrais le treuil… C’était Blainville ?
    — Qui voulez-vous, Père, que ce soit d’autre ?… Auriez-vous dix hommes de plus que je serais allé ruiner ses murailles.
    — Bressolles m’a parlé de cette poudre noire à laquelle aucune paroi ne résiste. Si nous en faisions usage contre la demeure de ce démon, il saurait d’où vient le coup… Nous devrions subir sa fureur.
    — Et qui vous dit, Père, que nous ne la subirons pas ?
    Ogier mit pied à terre. Le visage inutilement contrit du vieillard le gêna au point que, tournant les talons, il se rendit à l’écurie. Champartel l’y suivit – sans Aude.
    Ils débridèrent et dessellèrent les chevaux puis gravirent l’escalier menant au corps de garde. Ogier se laissa choir sur son lit, imité par l’écuyer recru, lui aussi, de fatigue et de découragement.
    — Demain, nous reviendrons là-bas. Nous fouillerons les ruines. Je veux savoir si Gerbold est dedans !
    Ogier ferma les yeux et tomba mollement sur de brûlants rivages. Non loin de lui nageaient Guillemette et Berline. Il voulut les atteindre, décidé à se revancher d’il ne savait trop quoi, mais en riant, elles le distancèrent. Il les supplia de se laisser rejoindre… Dans quoi barbotaient-elles ? L’Isle ? L’Auvézère ? La mer ? Les douves ?… Qu’importait ! Hurlant

Weitere Kostenlose Bücher