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Les fleurs d'acier

Les fleurs d'acier

Titel: Les fleurs d'acier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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pour s’apaiser :
    — Philippe a convoqué Clisson pour un tournoi, et celui-ci, malgré les pleurs de Jeanne qui, méfiante, le priait de rester près d’elle, s’en est allé à Paris avec ses compagnons habituels [285] … Penses-tu que s’il avait été le félon que tu crois, il se serait rendu à cette invitation ?
    La question déconcerta Ogier. Briatexte continua :
    — Il est parti confiant et gai… Et ses compagnons aussi… Ils ont chanté tout au long du chemin… Ils auraient dû se garder davantage de la duplicité de Philippe !
    — Pour parler ainsi, vous étiez avec eux !
    La remarque subtile émanait de Raymond. Estimant superflu d’y répondre, Briatexte continua :
    — Clisson a devancé ses amis sur l’échafaud. Le 2 août, on le traîna sur la claie jusqu’aux Halles. Il fut décollé… On accrocha son corps par les pieds au gibet de Montfaucon et, selon le désir du roi, un chevaucheur emporta sa tête à Nantes… On m’a dit que cet homme était un sergent de Blainville.
    — Ramonnet ?
    — Il se peut.
    — J’en suis sûr ! En procédant ainsi, Blainville se montrait une fois de plus dévoué au roi… Et peut-être est-ce à son instigation que tous ces Bretons furent décapités. Ainsi, aucun d’eux – s’ils étaient coupables – ne pouvait plus le dénoncer.
    Ogier se gardait de trop en dire. Il lui semblait inutile de révéler à Briatexte qu’il avait sauvé Jean de Montfort, à Gratot.
    — À Nantes, le duc Jean fit accrocher la tête de Clisson au-dessus de la porte Sauve-Tout…
    Là, Briatexte se tut, visiblement affligé.
    — Continuez ! Par Dieu, Enguerrand, quoi que vous puissiez nous dire, vos actes parmi les tenants des Montfort nous indignent moins que votre présence auprès de Robert Knolles !
    Une grimace tordit les lèvres de cet adversaire tout aussi exaspérant pour sa vanité mordante que pour son ténébreux passé.
    — J’ai vu Jeanne de Belleville, l’épouse de Clisson, et ses fils regarder cette boule d’os et de chair presque méconnaissable… Tous trois ont juré de se venger…
    — Alors, reprit Ogier, Jeanne a engagé une herpaille de malandrins. Ces Bretons à sa dévotion et à la solde des Anglais ont exterminé les garnisons des châteaux favorables à la cause de Charles de Blois… Ensuite, armant des navires pour la course avec l’assentiment et les écus d’Édouard, Jeanne a guerroyé contre les nefs de France… Elle ne sait plus qu’occire et que piller !
    Briatexte tortilla les crins d’Artus. À nouveau, il paraissait triste et amer :
    — Si Olivier était le félon que tu crois, jamais Jeanne n’aurait commis de telles actions après sa mort. Elle aurait accepté le trépas de son époux comme la conséquence même de sa trahison découverte : dans ce jeu-là, il y a toujours des perdants… Alors, crois-moi, Ogier : elle aurait pleuré, accusé la malechance, puis se serait enclose en son château… Mais elle nous a rejoints. Et par dépit et souffrance d’amour brisé, elle s’est montrée haineuse et sans pitié. Elle sait porter le haubergeon de fer aussi bien que ta cousine son armure… Et si tu la connaissais, tu l’admirerais autant que tu admires ta Tancrède… et autant que celle-ci l’admire, sans l’avoir vue !
    Ogier retint une imprécation. Moqueuse, Adelis remarqua :
    — Vous l’admirez aussi, messire Briatexte… puisque nous ignorons votre vrai nom !
    — Je m’ébahis de tout ce que fait Jeanne. On l’a surnommée la Lionne… Or, il y a, cousues en elle, la peau du renard et celle du lion. Il a fallu plus de vingt nefs pour couler ses vaisseaux…
    Ogier se demanda comment Blainville avait agi envers Clisson. Même faillible aux yeux du roi, un chevalier tel que le Breton méritait certains égards et, à défaut de rémission, la geôle et non la hache. Il soupira. Il se serait désintéressé de cet homme s’il n’avait imaginé sa veuve tapie en quelque lieu proche de Chauvigny, à moins qu’elle ne se trouvât en sécurité dans la cité même.
    — La bataille a eu lieu un soir de mars dernier, au large de Guernesey. Jeanne a pu s’enfuir de la nef capitane avec ses gars et deux mariniers. Sept jours de mer dans une coque de noix. Lorsqu’ils ont atteint l’Angleterre, le fils puîné d’Olivier était mort.
    — La mort, elle l’a semée. Il est juste qu’elle en souffre à son tour !
    D’un clin d’œil Ogier approuva Champartel.

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