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Les fleurs d'acier

Les fleurs d'acier

Titel: Les fleurs d'acier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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sérieux.
    — Tu n’avais qu’à me demander de la suivre.
    — Je ne demande rien, messire. J’obéis.
    Oui, Raymond avait peur. Cette peur, Ogier la sentit glisser sur lui et le contraindre à penser plus exactement encore à Adelis, à ce corps qu’il avait étreint, à cette ferveur qu’elle lui avait donnée. Une sorte d’amollissement descendit dans ses veines et sous le regard attristé de Raymond, il découvrit qu’il n’avait plus goût à rien.
    — Faut pas rester là, dit Thierry. Faut visiter la cité.
    C’était sagesse. Ils reverraient bientôt Adelis. Elle leur était devenue indispensable. D’une façon ou d’une autre, elle ne les pouvait quitter.

V
    — Voilà le château de l’évêque [299] …
    Gris clair sous le soleil, obscur en ses recoins, le colosse semblait dans sa jeunesse prime. Une mitre de tuiles roses exhaussait son donjon crénelé dans les embrasures duquel passaient parfois des lueurs éloquentes.
    — Bien haut, bien solide et bien défendu ! Ce prélat doit avoir des idées guerrières.
    Pour une fois, Champartel partagea l’opinion de Raymond :
    — Et quels serviteurs ! Hommes d’armes et servantes rieuses devant sa haute porte où n’entre pas qui veut.
    — Avançons, dit Ogier, indifférent à l’agitation de la gent domestique et aux protestations d’un clerc que deux huissiers refoulaient. J’ai grand-hâte de savoir si nos armes seront acceptées.
    — Messire, dit Thierry, baissant la voix, une chose est sûre : Blainville est à Chauvigny, donc Montfort ne vous a pas menti.
    — Pour écarter les soupçons, ce démon restera le plus possible en compagnie d’Alençon et d’Espagne. Sans doute sait-il déjà où, quand et comment rejoindre ses complices.
    — Et Harcourt ?
    — J’ai dû m’engeigner. Le Boiteux n’irait pas s’exposer aux regards d’anciens compagnons de bataille… À moins, si c’est lui, qu’il ne fasse qu’arriver… En ce cas, est-il venu seul ?
    « Et ce moine ! songea Ogier. Pas celui que les portiers repoussent sans ménagement. L’autre : celui qui est passé tout près de Marchegai… Dans l’état d’anxiété où je me trouve, j’ai cru voir notre ancien chapelain… Frère Isambert a fui Gratot depuis six ans. Que ferait-il en ces lieux ?… Il doit vivre à l’abri de quelque moutier… Pourtant, grossi, bouffi, ce presbytérien lui ressemblait. »
    — Messire, dit Thierry, levant la main, voici la demeure que nous cherchons.
    Bourrelée de gros contreforts cylindriques, l’enceinte du château de dame Alix d’Harcourt était défendue par des meurtrières en forme de niche voûtée, complétées d’archères coupées de coches transversales. Formant saillie sur l’extérieur, le châtelet d’entrée béait par sa porte ogivale dont une herse, incomplètement remontée, pouvait interdire l’accès.
    — Entrons.
    À la suite de Saladin, Ogier s’engagea sous la voûte.
    Sur la droite, un escalier tournait vers une salle haute dans laquelle s’ouvraient un assommoir et le passage de la herse. De là, on devait gagner le chemin de ronde. La cour, divisée en deux parties par un mur aux anneaux duquel des chevaux étaient à l’attache, bourdonnait des rires et conversations d’une vingtaine de seigneurs et d’écuyers, la plupart vêtus de mailles. Au fond s’élevait un donjon. Coiffé d’ardoise et d’apparence agréable, cet édifice avait été bâti en surplomb sur le versant abrupt de la colline. Au-dessus de son grand portail, dans une niche flamboyante à fond d’azur, un chevalier de bois ou de pierre, peint de sable, de sinople et d’or, brandissait une épée. S’en approchant, Ogier put lire sur son socle la devise des Harcourt :
    —  Gesta verbis praeveniant.
    —  Que dites-vous, messire ? demanda Champartel.
    — Le geste dépasse la parole.
    Les quatre archers de garde en cet endroit s’étonnèrent qu’il connût le latin. Il put même surprendre, sur le visage barbu de l’un d’eux, une sorte de déférence.
    — Pied à terre.
    Raymond, le premier, toucha le sol et s’occupa de Facebelle. Thierry détacha du troussequin de Veillantif le sac contenant les armes de tournoi.
    Avant de quitter sa selle, Ogier fut sensible à la curiosité que leur apparition avait provoquée autour d’eux. « Allons, tu ne vas pas t’inquiéter… Nul ne t’a jamais vu… Tous ces visages te sont inconnus. » Et tandis que son écuyer passait la bride

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