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Les fleurs d'acier

Les fleurs d'acier

Titel: Les fleurs d'acier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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Guesclin s’exclamait :
    — Je fournirai trois courses contre toi… et même six pour te voir pâmé !
    — Nullement, intervint le Roi d’armes. Vous n’aurez droit qu’à trois courses d’ordonnance [400] comme tous les jouteurs. Cela nous suffira pour avoir quelque idée de votre savoir-faire.
    Il y avait de l’ironie dans ces propos mais, détestant cet homme du fait qu’il était le frère de Michel de Fontenay, Ogier y fut insensible. Le juge Augustin s’adressa au tabellion : « Enregistrez, Bérenger : Fenouillet et Guesclin. » Quittant dame Alix, souriante, l’évêque rejoignit Blainville, Alençon et Charles d’Espagne.
    — Ah ! ces joutes… dit-il. Pourquoi tant d’emportement ? Tout est pourtant si simple : hodie mihi, cras tibi : ce jourd’hui c’est à moi, demain c’est à toi…
    — Viens, Thierry.
    Mais le juge Augustin retint Ogier par sa manche et, l’air contrit :
    — Holà ! vous me devez huit livres parisis pour l’accrochage de votre écu et huit autres pour celui de Champartel.
    Ogier ouvrit son escarcelle ; le juge, la main tendue, continua :
    — Il vous faudra également payer demain les hérauts qui vous passeront les lances… Mais vous aurez le droit de les choisir vous-mêmes… Nous n’en sommes pas là…
    — Eh bien, grommela Thierry, il vous faut gagner l’un des prix, sans quoi ce sera la misère.
    Le juge glissa les pièces dans sa bourse :
    — À bientôt, Fenouillet… Dieu vous garde !
    Devançant son écuyer, Ogier se fraya un chemin dans la foule et atteignit avec satisfaction le seuil du sanctuaire. Il s’arrêta près d’un archer.
    — Il était temps que nous sortions de là ! Je suis tout picoté de sueur.
    — Ce n’est pas la sueur, dit Champartel. C’est les puces… En vérité nous sortons d’un pucier !
    L’archer se gratta vigoureusement la poitrine et sourit entre les jouées de sa barbute :
    — Ah ! là là, messires, faut le dire sans vouloir vous faire injure : c’est tout ce joli monde qui, chaque année, nous apporte ces bestioles… et des poux blancs… et d’autres, les morpoils qui se fourrent dans certains pelages, si vous voyez ce que je veux dire !… Les gratte-cul qu’on cueille dans les fourrés, c’est des douceurs à côté de ces vermines… Tiens, rien que d’en parler, voilà que la peau me chatouille !
     
    *
     
    Sitôt sorti, Ogier chercha Blandine dans la foule enfin clairsemée : sans qu’il s’en fût aperçu, la montre des heaumes et des targes devait être en voie d’achèvement. Des chevaliers et leurs dames confabulaient ici et là, des palefreniers retenaient les chevaux d’une dizaine de prud’hommes et quatre fienterons balayaient et amassaient les crottins qu’ils entassaient dans un chariot peint aux couleurs du sire de Chauvigny. Les ménestriers avaient abandonné leur échafaud. Les filles follieuses s’étaient dispersées. Il n’en restait qu’une, accroupetonnée à même le pavé, sans doute pour mettre en évidence deux citrouilles de chair dont nul ne voulait. À l’entrée d’une rue descendant au champ clos, deux dames se disputaient. Des riches, mais d’une richesse sans hautaineté. Elles n’avaient d’ostentatoire que leur jeunesse et leur fureur.
    — Ah ! si j’avais une armure de fer, se lamentait la plus âgée, je t’affronterais, Béatrix. Morte, tu serais bien réduite à me rendre mon époux !
    — Crois-tu, Mahaut, que je me laisserais mourir afin que tu me le reprennes ?
    Thierry sourit :
    — Il n’y a point que votre cousine, messire, à se vouloir adouber [401] .
    Tancrède. Ogier n’y songeait guère, ni même, présentement, à Adelis. Il cherchait du regard Blandine.
    « Elle aurait dû, si je lui plais, faire en sorte de m’attendre. »
    Elle lui manquait. Il essayait de se montrer à l’aise dans le but de rassurer Thierry. Cependant, si l’écuyer à l’esprit tranquille et pondéré n’était point dupe, il se méprenait peut-être sur la raison d’une feinte égalité d’âme : le deuil ou l’espérance ?
    — As-tu vu comme cette Poitevine est belle ?
    Grâce à cette pucelle et à cette rencontre, Ogier voulait croire que c’en était fini des avanies de toutes sortes. Avait-il découvert d’une façon inattendue toutes les harmonies complémentaires de son esprit ? Après la perte d’Adelis, la providence lui avait-elle offert d’autres sujets d’émotion pour le consoler

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