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Les fleurs d'acier

Les fleurs d'acier

Titel: Les fleurs d'acier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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d’armes… Votre époux n’est-il pas gentil homme dans toutes ses lignes ?
    Il employait un ton de confesseur, entraînant dame Berthe éplorée, tandis qu’Alix d’Harcourt, riant, demandait à Bellebrune et à Lonchiens :
    — Alors, messires, allez-vous défendre cette pauvrette ?
    Thierry saisit le bras d’Ogier, et de bouche à oreille :
    — Voilà ce qui vous pend au nez, messire !… Vous pensez bien que l’Isabelle se revanchera… Elle dira que vous vous réjouissiez d’être son chevalier, puis que vous y avez renoncé : elle peut vous accuser d’être faux et menteur de promesse. Étant reine, nul ne mettra sa parole en doute et tous s’empresseront à la servir… Si j’étais vous, je me contenterais de jouter… Je m’abstiendrais de prendre part au tournoi.
    Ogier ne put qu’approuver l’écuyer.
    Si les joutes, à un contre un, offraient une grande garantie de loyauté – encore qu’il s’y commît certaines tricheries –, les tournois, tout en demeurant l’affrontement de deux escadres de batailleurs, pouvaient devenir, par le fait des sentences prononcées contre les chevaliers indignes figurant dans leurs rangs, de rudes châtiments où s’expiaient diverses fautes. Un homme était-il brusquement dénoncé par une dame approuvée par la reine, à la justice des tournoyeurs ? Les deux compagnies opposées, aussitôt réconciliées, se ruaient sur le coupable dès que l’écuyer d’honneur assistant la « suzeraine » le désignait à leur attention. On accablait à coups de masse et d’épée l’usurier prêtant à intérêt manifeste ou celui qui s’était rabaissé par le mariage en épousant une roturière. Ces péchés-là étaient tenus pour véniels : une fois le fautif copieusement puni et son cheval capturé, on s’entre-bataillait de nouveau tandis qu’on emportait le malheureux hors du champ clos… Le parjure ou le criminel était frappé avec un acharnement sans limites jusqu’à ce qu’il ait chu dans l’herbe. Ensuite, comme lors d’une dégradation, on l’asseyait à califourchon sur la haute barre de la lice ; on l’y maintenait pendant que ses armes courtoises, rompues et jetées sous les fers des chevaux, connaissaient un sort indigne. Exposé aux regards et insultes, le condamné continuait de recevoir des coups, au passage des tournoyeurs, jusqu’à ce qu’on le laissât tomber, pâmé ou mort. On statuait plus tard sur son cas. Une atténuation de peine était d’ailleurs possible si quelques dames intervenaient auprès de la reine et, s’humiliant, plaidaient en faveur du maltraité.
    — Même si vous avez eu raison de renoncer à porter l’emprise d’Isabelle, elle omettra de dire pourquoi !
    — Je sais, Thierry. J’aviserai lundi matin.
    — Moi, à votre place…
    L’écuyer s’interrompit pour reprendre d’un ton neutre :
    — Tenez-vous bien : la voilà !
    Ogier se détourna croyant voir paraître Blandine. Or, c’était Isabelle, habillée de samit blanc, sa main posée sur l’avant-bras d’André de Chauvigny.
    Elle fronça le sourcil à la vue d’un écu dont le Roi d’armes, à sa demande, lui présenta le propriétaire. Elle sourit. Ses cheveux massés au-dessus de sa tête supportaient une couronne d’or aux pointes tréflées.
    — Elle doit se croire, messire, au palais royal !
    Tout ce blanc fluide, lumineux, mettait en valeur la souplesse d’Isabelle, la minceur de sa taille, l’aisance de sa démarche, la roseur de son corps exprimée par sa main posée devant sa poitrine comme pour amoindrir l’effet d’un décolleté téméraire tendu sur des rondeurs à demi révélées.
    — Méfiez-vous-en comme d’une sorcière !
    — J’en ai bien l’intention, dit Ogier sur un ton qu’il voulait rassurant.
    Peu lui importait de qui cette jouvencelle ambitieuse tenait sa « royauté », bien qu’il crût, sans trop savoir pourquoi, que c’était de Blainville. Et s’il ne s’abusait pas, il devait y avoir une raison solide à cette investiture : ce coquin dépourvu de complaisance et de sollicitude ne pouvait s’entremettre qu’en cas de nécessité absolue ou impure.
    « Et la voilà qui s’arrête devant nous ! Incline-toi, Ogier, mais point trop. »
    — Vous êtes belle, dit-il simplement.
    C’était un compliment de bonne foi dans lequel, cependant, ne palpitait aucun trouble. Déjà, il avait envie d’être loin d’elle, loin de ce Fontenay qu’il trouvait

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