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Les fontaines de sang

Les fontaines de sang

Titel: Les fontaines de sang Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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Robert !… Tiercelet !
    L’écuyer accourut, essoufflé, précédant Tiercelet qui chancelait un peu :
    – Il faut vous soigner ainsi que cet homme. S’il méritait la mort, il l’aurait reçue. Occupe-t’en, Tiercelet. Il doit bien y avoir dans ce châtelet de l’eau propre, voire de l’eau-de-vie, de la charpie et de quoi confectionner des attelles. Les femmes connaîtront peut-être une médication… Comment t’appelles-tu ?
    – Gérait. Mais on me dit le Mantais.
    – Eh bien, voici mes amis… Ne les crains pas : Argouges abomine le Breton dont tu m’as dit deux mots.
    Tristan marcha vers l’entrée du châtelet.
    – Où allez-vous ? s’inquiéta Paindorge.
    – Revoir les prisonnières et m’assurer qu’elles vont bien.
    – Je viens avec vous, décida Ogier d’Argouges.
    – Non, dit Thierry, n’y va pas. Laisse-le retrouver seul ta fille.
    Tristan s’attendait à une protestation. Il n’en fut rien. Cependant, l’air contrit du seigneur de Gratot lui serra le cœur. Il eut, dans sa direction, un geste large :
    – Allez, dit-il, venez… et soyons bons amis.
    *
    Il avait peur. Une autre peur que celle de combattre : plus légère mais chargée, elle aussi, de pénibles incertitudes. Il allait devoir parler. Que dire à Luciane ? Évoquer le passé lui serait malaisé. Pourtant, c’était par là qu’il devrait commencer. À moins qu’elle n’y consentît point pour ne voir en lui, définitivement, qu’un homme neuf, accompli, pétri d’un limon grossier que l’amour qu’elle lui vouait finirait par épurer. Un tel raisonnement correspondait-il au caractère de la pucelle ? Non, certes. À moins que, lui sachant bon gré d’avoir contri bué à sa libération, elle ne lui infligeât un vigoureux démenti.
    Lorsqu’ils avaient rompu, d’un mouvement du bras par-dessus son épaule, il s’était soulagé d’une pesanteur d’échecs qu’il subissait depuis quelques mois ainsi que du courroux dont son cœur débordait. Il s’était composé un nouveau caractère et forgé des armes pour l’avenir. Il ne s’éprendrait plus d’une autre femme. Il en jouirait, simplement, et passerait son chemin. Et voilà qu’une chevauchée imprévisible l’avait conduit à Cocherel pour y revoir Thierry. Voilà qu’une autre l’avait mené au château Ganne avant qu’une troisième, sans doute – et même certainement -, le ramenât sur le seuil de Gratot.
    « Que fais-tu donc de tes résolutions ?… Tu te remues les sangs plus encore que lorsque tu l’as connue ! »
    Ces armes intangibles sur l’efficace desquelles il s’était bel et bien illusionné l’encombraient désormais. Sans même avoir échangé un baiser avec Luciane, il se sentait envers elle dans un état de dépendance que le bon sens trouvait intolérable. Hélas ! Il n’existait aucun antidote à cette espèce de vassalité.
    Il enjamba le corps de l’huissier, franchit le seuil de l’enceinte et ne vit rien devant lui.
    – Où sont-elles ? s’inquiéta Ogier d’Argouges.
    – Assez loin et dissimulées par crainte que les Navarrais n’aient eu le dessus sur nous et qu’ils ne les reprennent. Sitôt qu’elles nous verront, elles apparaîtront.
    – Il me faut vous dire…
    Il y avait des louanges dans l’air. Tristan les refusa sans même se retourner :
    – Ne me regraciez point, messire. Ce que j’ai fait, vous l’eussiez fait à ma place.
    Puis faisant face, le temps d’évaluer la fatigue d’un visage d’où se retirait la fureur de vaincre :
    – Voyez-vous, je conçois que l’on soit pour Navarre. La plupart des coquins que nous venons d’occire devaient la féauté à leur seigneur. Toutefois, ce que j’abomine, c’est que des capitaines d’aventure aient pris des femmes en otagerie pour contraindre des prud’hommes de grand ou de petit estoc 91 à participer à une bataille où leur honneur n’était point engagé.
    Ogier d’Argouges acquiesça. Ils éprouvaient toujours quelques difficultés à se parler. Le regret sincère du tençon qui les avait opposés n’empêchait pas qu’il y eût entre eux un soupçon de malaisance. Ils se sentaient coupables à des degrés divers. Leurs voix conservaient une sorte d’acerbité dont Tristan se demanda s’ils s’en guériraient un jour.
    – Ils venaient de Bricquebec. Le maître suzerain en est Adam Ruiz… Si le chevalier au Vert Lion 92 voyait cela !… Ruiz dispose, dit-on, d’un sergent d’armes

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