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Les fontaines de sang

Les fontaines de sang

Titel: Les fontaines de sang Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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poignées… Il te faut assortir les prises et les lames.
    Guesclin entra dans l’atelier, écartant violemment Quesnel qui venait d’apparaître sur le seuil. Tristan, Paindorge et Ogier d’Argouges suivirent.
    Orriz avait déposé sur l’enclume encore chaude quatre paires de quillons en fer, quatre pommeaux et leurs boutons de fixation. Les fusées des épées fortement allongées permettraient aux possesseurs de ces armes de les manier indifféremment avec une ou deux mains. Quant aux lames, assez plates et à double talus sur chaque face, leur pointe aiguë permettrait des estocades qui, bien envoyées, fausseraient les cuirasses ou briseraient les mailles.
    « Il bave de plaisir à la seule idée des coups qu’il portera avec ces armes nouvelles ! » songea Tristan en faisant, à reculons, un pas vers le seuil.
    Ogier d’Argouges ouvrit son escarcelle :
    – Je prends les pointes de sagettes. Combien les vends-tu, Ledentu ?
    – Fort cher ! grommela Guesclin, mettant ainsi le fèvre dans l’embarras.
    – Nous reviendrons, dit Tristan.
    Il craignait un tençon 169 . Guesclin commença d’essayer les soies des lames aux fusées.
    – Olivier !
    Comme un boulet tiré d’une bombarde, le cousin du Breton jaillit du dehors au dedans.
    – Bertrand ?
    – Regarde tout cela et dis-moi ton avis.
    Guesclin se tourna vers Ledentu, immobile entre son enclume et sa forge :
    –  Vulcain serait jaloux s’il pouvait te connaître !… Bon Dieu ! Ce sont de bonnes lames, compère, que celles-ci. Elles vont remplacer avantageusement celles que j’ai usées depuis Melun, Meulan, Cocherel et Auray.
    – Je te croyais captif des Anglais, dit Tristan tout en revenant au centre de l’atelier.
    –  Je l’étais. Le roi a ouvert son escarcelle.
    – Son coffre, veux-tu dire.
    – Il m’aime bien.
    Tristan fut tenté de dauber sur l’amour. Il ne l’osa. Cependant, une phrase toucha ses lèvres, définissant Guesclin comme un serpent qui se fût enorgueilli de son venin. Il serra les dents, puis, tout de même :
    – Ce roi que l’on nous dit plus cupide qu’un Juif doit t’amourer farouchement pour payer tes rançons chaque fois que tu te fais prendre !
    Le Breton leva ses grosses mains calleuses à force d’avoir serré les épées, les haches, les fléaux et la plupart des outils mortels.
    – Hé ! Hé ! Oui, Charles m’aime bien. Si vous êtes marris des faveurs qu’il m’octroie, allez-vous en plaindre à lui.
    Puis froidement :
    – Messires, il va y avoir bientôt une rude besogne pour des preux de votre espèce… et vous aussi, les écuyers !
    Guesclin regardait furieusement Luciane que l’impatience et la curiosité venaient de ramener dans les murs, et sa vaste main, sans doute, le démangeait d’arracher le camail dont était enveloppée cette tête imberbe, trop avenante pour être celle d’un guerrier. Qu’eût-il vu ? Elle avait soigneusement amassé ses cheveux sous la calette. Aucun n’en dépassait. Quant à sa poitrine, susceptible de révéler son sexe, elle avait pris grand soin de la serrer dans une bande de drap naïf 170 .
    – Je viens, messires, de recevoir les messages 171 du roi.
    Tristan n’osa demander quels hommes composaient cette délégation. Au reste, il lui importait moins de connaître leurs noms que d’apprendre l’objet de leur mission.
    –  Hier, 22 août, j’ai donné mon accord pour conduire les Compagnies en Espagne.
    – Pour quelle raison ?
    – Pour asseoir Henri de Trastamare sur le trône de Pedro le Cruel. Les négociations avec le roi d’Aragon, – ennemi de Pedro lui aussi – ont commencé en Avignon le mois dernier pour se poursuivre à Paris. Le roi Charles m’a enjoint d’être fidèle à ma promesse de mener les Compagnies en Castille.
    – La Castille n’est pas notre ennemie, dit Tristan. Plutôt que de pousser sur son sol une calamité telle que les Compagnies, nous ferions mieux de les exterminer nous-mêmes. Par le saint sang du Christ ! Nous n’avons rien à gagner à nous allier à des malandrins et à envahir l’Espagne. Nous allons perdre notre honneur dans cette guerre en même temps que des vies humaines.
    – Rien à gagner ? ricana Guesclin. Cent mille florins d’or promis par le Pape, assortis de sa bénédiction. Et que veux-tu que nous perdions ? L’honneur dont tu me parles est une pourriture. Les vies humaines ?… Nenni ! Les Espagnols sont des rustiques. Ceux qui seront

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