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Les foulards rouges

Les foulards rouges

Titel: Les foulards rouges Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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république contre la monarchie, les
idées nouvelles contre le féodalisme. Il faudra bien un jour s’organiser en
sociétés secrètes, nous reconnaître à certains signes, dépasser nos frontières
car l’homme est partout semblable en tous les pays du monde…
    Les deux hommes s’immobilisèrent et
échangèrent un long regard qui scella à jamais leur amitié, celle qui unit deux
cœurs purs et généreux en un but dépassant leurs pauvres vies.
    Cet instant merveilleux fut difficile à
surmonter, tant il ouvrait de rêves sur un avenir radieux mais il le fallait
pourtant : en ce mois de mai 1652, à Paris, on vivait sous la domination
de la Fronde.
    Jérôme de Galand prit l’initiative :
    — Paris est ville frondeuse, mais elle se
trompe de révolte. En attendant, cette ville a longue mémoire et n’oublie rien.
Ainsi, la façon dont le prince de Condé, alors au service du roi, l’assiégea. Ainsi
encore la faim, le carnage de la bataille de Charenton, le massacre des
prisonniers… Cher ami, le 12 avril, le parlement reçut monsieur le prince de
Condé avec extrême froideur. Le 23 de ce mois d’avril, une assemblée de
notables parisiens refusa l’union avec les princes, acceptant tout au plus de
députer au roi pour lui demander de bannir Mazarin, sachant que Louis le
quatorzième n’accepterait jamais. Le même jour, qui n’était point faste pour
monsieur le prince de Condé, il fut reçu très mal par la chambre des comptes et
la cour des Aides. Peu après, monsieur le prince, mal inspiré, ordonna à ses
agents de mener tapage en les rues et, avec l’aide du peuple aveuglé, d’apeurer
les bourgeois et les représentants de la ville… mais ceux-là ne pardonneront
jamais eu égard à la peur qui fut la leur.
    Le comte de Nissac écouta avec grand intérêt, mais
une chose, cependant, échappait à son entendement :
    — Je ne comprends point : si la
ville n’aime point le prince, que ne le rejette-t-elle ?
    Galand soupira :
    — Elle n’aime point le prince mais a de l’affection
pour Gaston d’Orléans. C’est toute la complication de la situation.
    — Je comprends mal.
    — Gaston d’Orléans est toute indulgence
envers les Parisiens. Il est même faible, et donc très populaire. Malheureusement,
il n’est point le meneur de la Fronde et suit monsieur le prince, sans doute
par faiblesse, une fois encore.
    — Ne peut-on susciter opposition entre le
prince et Gaston d’Orléans ?
    — On ne peut agir de l’intérieur. Pour la
Fronde, ses puissants seigneurs, ses armées, nous ne sommes rien. Mais en
ruinant ses opérations, en comptant sur le prince pour se rendre impopulaire et
sur le roi revenu près de Paris, nous pouvons espérer hâter les choses.
    — Au moins servirons-nous à cela ! répondit
Nissac.

57
    Le comte de Nissac avait choisi Maximilien
Fervac. Dépouillé de ses attributs d’officier en les Gardes Françaises, simulant
une grande vulgarité dans l’expression et se souvenant très à propos de Manon, qui
vendait ses charmes à de vieux et riches bourgeois, Fervac s’affichait avec sa
protégée en certain quartier mal famé du Faubourg Saint-Marcel.
    La jeune femme, heureuse de revoir le seul
homme pour lequel elle éprouvait tendre et ardent sentiment, au point qu’il n’eut
jamais à délier sa bourse pour la posséder, profitait de son bonheur et ne
posait pas de questions. En retour, Fervac ne l’interrogeait point sur son
déplaisant métier, ayant compris que la jeune femme n’avait pas d’attaches avec
ce qu’elle vivait quatre ou cinq fois la semaine en compagnie de ses vieux
habitués.
    Aucun homme n’est certes parfait et le
serait-il, on s’ennuierait profondément en telle compagnie.
    À regarder du côté de ses qualités, Fervac
était beau, bien fait et charmeur, courageux, fort et très drôle, à quoi s’ajoutait
qu’il faisait délicieusement l’amour.
    À considérer ses défauts, du seul point de vue
de la jeune femme, on pouvait le juger songeant trop à l’ordre, ne supportant
point les affaires traînant ici ou là quand il existait une place pour chaque
chose. En outre, il faisait montre d’une grande logique en la parole, vous
écoutant attentivement, reprenant une expression maladroite, expliquant par le
menu les raisons de votre comportement si bien qu’avec lui, on se sentait
quelquefois comme une marionnette entre les mains du montreur qui l’anime et
lui donne don de parole.
    Pour Manon,

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