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Les foulards rouges

Les foulards rouges

Titel: Les foulards rouges Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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de la Fronde. Pendant leur marche, les deux
hommes avaient échangé quelques paroles sur les campagnes désolées, puis le
jeune marquis en vint à parler de ses amours :
    — J’aime, monsieur, femme très jolie mais
hélas du parti de la Fronde.
    Le comte réfléchit à ces paroles.
    — Monsieur, querelle politique ne sépare
point durablement ceux qui s’aiment. À ce propos, vous aime-t-elle en retour, car
n’est-ce point là la seule question qui vaille ?
    — Je le crois, sans être affermi en cet
état par preuve qui ne laisse point place au doute. Un aveu, par exemple. Mais
nos regards sont doux et ardents.
    — Je connais fort bien cet état ! répondit
le comte en souriant à la pensée de Mathilde de Santheuil.
    Le jeune marquis, qui paraissait ému d’avoir
évoqué celle qu’il aimait et, par ailleurs, touché de l’intérêt que le comte de
Nissac portait à ses affaires, lâcha un instant la bride à son cheval et, le
geste large, prit à témoin le ciel d’un bleu limpide :
    — Ah, Charlotte, comme on vous aime !…
    Le comte sursauta. Il avait beau se convaincre
qu’en tout le royaume des Lys il se trouvait certainement plus d’une Charlotte
qui fût du parti de la Fronde, un doute le prit :
    — Charlotte !… Il en est plusieurs, me
semble-t-il, qui aient quelque grâce.
    — Sans doute, mais il n’en est point une
qui ait la beauté de Charlotte de La Ferté-Sheffair, duchesse de Luègue !
    Nissac hésitait sur la conduite à tenir. Il
devait absolument conserver bon esprit en les rangs des Foulards Rouges appelés
à affronter bien des dangers. Mais il se faisait une haute idée de l’honneur d’un
gentilhomme qui ne doit point mentir, fût-ce par omission, à un ami.
    Il s’éclaircit la voix :
    — Marquis, j’ai connu autrefois la
duchesse de Luègue. En des circonstances particulières, et pour un temps très
bref. Elle était alors bien jeune et, pour m’avoir vu lors d’un duel en les
jardins du Palais-Royal, pensait sans doute que n’étaient point révolus les
temps de la chevalerie ancienne. Moi, j’étais fort sot, imaginant, sur des
paroles mal comprises, que la femme que j’adorais me mentait en aimant ailleurs.
La connaissance que le duchesse et moi eûmes l’un de l’autre n’excéda point
quelques heures, et nous ne nous sommes jamais revus.
    Le marquis arrêta son cheval et, cherchant le
regard du comte, posa une main légère sur l’avant-bras de celui-ci :
    — Cher comte, cette histoire ne m’était
point inconnue, toute la Cour, à l’époque, ayant eu à connaître l’aventure dont
vous parlez.
    — Mais alors ?… questionna Nissac.
    — J’attendais… J’espérais tenir cela de
vous-même.
    — C’était donc un piège ?… C’est insultant !…
remarqua froidement le comte.
    — Ne l’entendez point ainsi, je ne
désirais pas vous blesser !… Je brûlais de savoir si votre amitié serait
assez forte pour trouver en ses racines le rare courage qui fut le vôtre car
tel récit n’est point facile d’un homme qui posséda une femme à un autre homme
follement épris de la même femme.
    — Allons donc ! répondit Nissac, assez
gêné.
    — J’insiste, cher comte. Il entrait en ma
manière de procéder attitude feinte et sans sincérité mais soyez assuré que l’objectif
poursuivi n’était point vil : je désirais vous admirer une fois encore car
je ne doutais point de vous un instant.
    — Allons donc, monsieur, balivernes, que
tout cela. Je ne voulais pas mésintelligence entre nous et vous pouvoir
regarder en face.
    — C’est encore très flatteur, cher comte,
et je vous en remercie.
    Ils reprirent leur traversée de la capitale au
pas lent de leurs chevaux. Le marquis, cependant, précisa :
    — Charlotte prend souvent nouvel amant
mais je n’en suis point jaloux. Je crois qu’elle cherche ce qu’elle n’a point
encore trouvé… ou qu’elle a perdu… et que je lui donnerai sans doute car je l’aime
sans calculs, sans la vouloir changer si elle ne le désire point. Il faut avoir
le courage d’aimer telle qu’on vous plut, fût-ce avec mauvaise réputation.
    — Voilà paroles fort sages, marquis, et
qu’on n’attendrait point de votre jeunesse.
    — Cher comte, c’est qu’elles me sont
dictées par une passion jusqu’ici sans aboutissement mais qu’éclaire l’espoir
comme un falot en la nuit.
    Ils arrivèrent peu après en l’hôtel de
Carnavalet et l’endroit séduisit

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