Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les foulards rouges

Les foulards rouges

Titel: Les foulards rouges Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
Vom Netzwerk:
pas,
monsieur le cardinal, à juger de vos amours.
    — Comme je ne juge pas des vôtres ! répondit
le cardinal en effleurant d’un doigt bagué la jarretière de la duchesse de
Luègue.
    — Aussi bien, nous voilà donc quittes !
répondit Nissac d’un ton glacé.
    Le cardinal partit à rire malgré lui et
rétorqua :
    — Point du tout ! Si vos amours avec
la très jeune duchesse de Luègue ne prêtent aucunement à confusion, je crois, pour
ce qui me concerne, que vous vous abusez gravement.
    — Mais encore, monsieur le cardinal ?
demanda le comte, brusquement pris d’un doute.
    — Ma !… Quel enfantillage !… Voyons,
comte, parlant de Mathilde, j’ai montré de l’affection, comme elle m’en porte
et me l’a prouvée. Il n’entrait dans ces paroles rien qui fût charnel !
    — Mais…
    Le cardinal coupa la parole au comte :
    — Mathilde de Santheuil est la fille d’un
ami. Je l’estime pour cela, pour ce qu’elle est et pour ce qu’elle fait avec
grand courage. Point davantage.
    — Mais alors, qu’ai-je fait ?
    — Voyons, Nissac, ce n’est point là
trahir. À moins… Votre cœur, lui, a-t-il trahi ?
    — Pas un instant, je vous en fais le
serment.
    — Vous voyez bien !
    Mazarin observa Nissac avec une soudaine
gravité :
    — Moi aussi, j’aime. Et ce n’est point
chose facile quand tout le monde vous épie, que la guerre vous sépare, que les
libelles insultent un amour très beau et très profond. L’amour est chose
délicate et grave, quoi qu’on en dise. Votre escapade avec la duchesse est
sujet sans importance. Ayez la paix en votre esprit, Nissac, et soyez prudent, nous…
La reine, le dauphin et moi-même tenons beaucoup à vous.
    Le comte ne doutait
pas un instant du cardinal, qu’il savait follement épris d’Anne d’Autriche. Mais
il s’interrogeait sur cette confusion, ce mouvement de colère un peu trop vif
pour être tout à fait honnête et qui l’avait jeté en les bras de Charlotte. Quelle
étrangeté, tout cela ! Quelle diablerie !
    Il se sentait coupable, mais coupable de quoi ?
Pour trahir, encore faut-il que quelque chose existât ? Or, rien de tel ne
le liait à Mathilde, si ce n’est… Des sentiments jamais exprimés, des promesses
jamais dites, des rêves sensuels demeurés en leur état de rêves. Donc, il était
libre de disposer de lui-même et de faire l’amour à qui lui plaisait.
    Un souvenir imprécis lui revenait, que les
caresses de la duchesse avaient réveillé. Un autre corps, tout aussi beau, la
fièvre, des délices que Charlotte ne lui avait point procurées avec semblable
force. Que s’était-il passé réellement, cette fameuse nuit où son esprit
divaguait, entre Mathilde de Santheuil et lui ?
    La petite troupe des Foulards Rouges arriva
aux derniers avant-postes tenus par les Condéens de l’armée royale.
    Sur leurs chevaux qui allaient au pas, ils
saluèrent d’un geste las les soldats et l’un d’eux, voyant les cavaliers
disparaître dans la tempête de neige, se signa en disant :
    — Mon Dieu, protégez-les car c’est en
enfer qu’ils retournent !

29
    Nissac et ses compagnons attendirent l’aube en
une ferme abandonnée.
    Ils auraient dû entrer dans Paris par la Porte
Mont Marthe mais la proximité de celle-ci avec leur base de la rue du Bout du
Monde risquait, en cas d’incident, de compromettre à jamais la sûreté de leur
refuge.
    Obliquant vers l’est par rapport à leur axe de
marche, le comte préféra risquer le détour par la Porte Saint-Denis.
    La neige ne tombait plus, le froid perdait de
sa vivacité et le ciel, d’une luminosité métallique, baignait les remparts d’une
lumière qui semblait irréelle.
    Les quatre gardes et leur officier allèrent au-devant
de Nissac qui leur délégua le baron Sébastien de Frontignac.
    L’officier, un Frondeur entre deux âges, observa
longuement le passeport exécuté la veille par Nicolas Louvet, puis l’homme
porta la main à la garde de son épée :
    — Monsieur, je ne nie point qu’il s’agisse
de fier document et qu’on y reconnaisse la signature de monseigneur le prince
de Conti…
    Il eut, à l’endroit de ses hommes, signe de
connivence puis, d’une voix forte :
    — Cependant, monsieur, ce document porte
la date d’hier et monseigneur le prince de Conti se trouve depuis trois jours à
prendre médecine et n’a point signé un seul passeport, ce qui fut cause d’embarras
mais me permet de vous démasquer comme

Weitere Kostenlose Bücher