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Les foulards rouges

Les foulards rouges

Titel: Les foulards rouges Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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célèbres Foulards
Rouges :
    — J’étais avec vous à Lens, monsieur le
comte.
    Le visage de Nissac se radoucit :
    — C’était au vingtième jour d’août, capitaine,
et nous avions temps plus agréable. À vous revoir sous meilleur jour !
    Le comte porta la main à son chapeau à plumes
et dépassa l’officier et les mousquetaires, qui saluèrent en se découvrant.
    Dans le morne paysage, et toujours sous la
neige qui tombait dru, Nissac songea à Charlotte, sa petite duchesse gourmande
de plaisirs inconnus, parfois insolente et cependant très tendre, davantage, en
tout cas, qu’elle ne pensait le laisser paraître.
    Il dut admettre que Charlotte aurait toujours
place en son cœur – comme toutes celles qui furent siennes –, même si un
événement inattendu avait remis bien des choses en leur situation d’origine.
    Il revit tout cela tandis que les flocons de
neige, très denses, obscurcissaient la vue.
    Les adieux interminables et baignés de larmes
de la très jeune duchesse puis cette jarretière ôtée de sa cuisse et qu’elle
lui plaça comme un brassard en disant :
    — Je veux que chacun sache que je fus
vôtre car j’en ai grande fierté, monsieur le général et chef des brigands du
cardinal qui portent foulards rouges ! Gardez cette jarretière à votre
bras jusqu’à minuit, car ce jour de votre vie est à moi tout entier.
    Il avait traversé la grande galerie et on s’était
retourné sur ce comte ténébreux, haut botté, foulard rouge au cou et jarretière
rose en brassard. Chacun sachant déjà par les domestiques que le comte de
Nissac et la duchesse de Luègue se trouvaient enfermés dans une chambre depuis
de longues heures, le port de la jarretière confirmait le plus angoissant des
doutes et ce ne fut partout que tristesse, soupirs, et lamentations.
    Les dames se trouvaient au bord de l’évanouissement
au motif qu’elles n’avaient pas été choisies par « la plus fine lame du
royaume ». Les messieurs auraient pleuré de rage à l’idée que ce militaire
bourru rescapé des champs de bataille avait été le premier amant de « la
plus belle femme de la Cour ».
    Mais l’on se tut, les unes craignant l’« ironie
mordante » du comte, les autres redoutant son épée.
    Nissac et ses hommes se trouvaient en l’écurie
à seller leurs chevaux lorsqu’ils reçurent visite inattendue en la personne du
Premier ministre.
    Celui-ci, le regard malicieux, décida de ne se
point formaliser de la froideur inhabituelle du comte qu’il tira à l’écart en
lui disant :
    — Comte, vous êtes mon seul ami. Or on n’est
point Premier ministre du royaume de France si l’on n’est pas perspicace et
pareillement, on n’est point franc-ami si l’on ne devine les tourments d’un
courageux compagnon.
    — Je n’ai nul tourment exceptionnel, monsieur
le cardinal.
    — Allons donc ! Ce matin, j’ai vu
votre visage.
    — Tout à la joie de repartir au combat.
    Le cardinal sourit.
    — Cette joie-là, qui vous fit soudainement
bien sombre figure, on la rencontre d’habitude aux funérailles.
    Le comte observa ses hommes qui, là-bas, tenaient
les montures sellées et n’attendaient plus que lui.
    Il laissa un instant parler son cœur :
    — Des funérailles… Peut-être, en effet. Peut-être
ce matin ai-je enterré un rêve.
    — C’est bien ce qu’il me semblait !…
Mais ce fut là de votre part grande précipitation et pure folie. A-t-on idée d’ensevelir
ce qui n’est point mort ?
    Nissac fronça les sourcils.
    — J’avoue, monsieur le cardinal, que vos
explications m’égarent et que je n’entends point ce que vous tentez de me dire.
    Le cardinal s’amusait. Il considérait le comte
comme un homme subtil mais tenait généralement que les affaires de cœur obscurcissent
les esprits les plus remarquables. En outre, et bien qu’il lui fût très attaché,
il éprouvait sans déplaisir la détresse de Nissac car ce soldat trop parfait, cet
homme trop fort, atteignait ainsi une dimension humaine dont le cardinal, qui n’était
point exempt de nombreux défauts, appréciait qu’elle les rapprochât.
    Il reprit :
    — Votre visage, cher comte, est devenu
sinistre lorsque, vous parlant de la belle Mathilde de Santheuil, je vous ai
dit : « Je l’aime », avant que d’ajouter : « Et je
pense être payé de retour. »
    Le comte fit effort méritoire pour conserver
son sang-froid :
    — Je n’ai point remarqué cela n’ayant

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