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Les foulards rouges

Les foulards rouges

Titel: Les foulards rouges Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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que monsieur l’archevêque envisage
de louer prochainement et…
    Nissac le gifla à deux reprises.
    — Tu expliques beaucoup pour mieux m’égarer !…
Parle-moi de cette jeune femme que tu suis depuis des jours.
    Les mâchoires douloureuses, Theulé n’en
protesta pas moins :
    — Je la suis… et la perds !… Car
elle est très fine et m’a deviné plus d’une fois. Ce n’est que d’hier que je
crois connaître son logis, situé en face de cette taverne.
    — Tu la suis pour le compte de cet homme
dont tu ignores le nom et que tu crois seigneur ?
    — C’est cela.
    — Comment reconnaître cet homme ?
    Theulé fit un visible effort de mémoire, puis :
    — Son visage est très ordinaire. Une
chose, pourtant, chez lui est bien remarquable : ses avant-bras. Ils sont
rayés de dizaines de cicatrices, toutes d’une grande finesse et ce n’est point
là l’œuvre d’une épée, trop grossière, ou même d’un poignard… Sa tenue est de
bonne allure, justaucorps et haut-de-chausses de couleur sombre. Une fois, pourtant,
comme il était pressé, je le vis en un habit de cocher, ce qui me surprit fort
car je jurerais que cocher, il ne l’est point.
    Nissac observa un court silence, le temps de
graver ces paroles en sa mémoire. Certes, ces choses paraissaient sans ordre
mais, à la lumière d’autres détails, pouvaient un jour se révéler d’importance.
    Il reprit, un peu moins sèchement :
    — Que savais-tu exactement de cette jeune
femme devant que de la suivre ?… Pas son nom, j’imagine ?…
    Une voix, venant de l’escalier, fit sursauter
les trois hommes :
    — Il n’en avait point besoin, disposant
de beaucoup mieux.
    À sa grande surprise, Nissac reconnut Jérôme
de Galand, lieutenant de la police criminelle, suivi du commis.
    Le lieutenant salua le comte puis, s’adressant
à Joseph :
    — Votre commis est un des mes archers. Comme
vous ne l’ignorez point, habitant en vis-à-vis, madame de Santheuil est d’une
grande importance pour des gens puissants.
    Joseph toisa son commis puis, s’adressant à
Jérôme de Galand :
    — Sachant que monsieur le comte de Nissac
est au service du cardinal, il ne m’était pas difficile d’imaginer que madame
de Santheuil n’est point différente en ses obligations…
    Nissac, impatient, le coupa :
    — Lieutenant, que vouliez-vous dire en
arrivant ?
    Le lieutenant de police criminelle sortit de
son habit un portrait qui semblait très exactement celui de Mathilde :
    — Je l’ai trouvé sur le corps d’un
maquereau poignardé. J’ai trouvé le même, quoique délavé, sur le corps d’un
tire-laine noyé en la rivière de Seine.
    Theulé, qu’on avait presque oublié, se rappela
brusquement à l’attention de tous :
    — C’est que… L’homme aux cicatrices m’a
remis le même avec pour mission de retrouver la femme qui servit de modèle.
    Nissac et Galand échangèrent un regard, puis
le comte entraîna le policier à l’écart :
    — Vous pensez à l’Écorcheur ?
    — Comment n’y point songer ? répondit
Galand à mi-voix avant d’ajouter : Tous ces portraits distribués à la canaille,
imaginez-vous combien c’est coûteux ? Or l’Écorcheur est riche, et a des
gens.
    Des cris leur firent tourner la tête.
    Trop tard, l’ancien commis, archer de Jérôme
de Galand, tentait de retenir le bras de Joseph qui, à deux reprises, avait
plongé son poignard dans le cœur de Theulé ; celui-ci mourut en se cabrant.
    Nissac, furieux, s’approcha du tavernier.
    — Es-tu fou ?
    L’autre soutint son regard.
    — Non point, monsieur le comte, mais
ainsi suis-je sûr qu’il ne reverra jamais ses maîtres malfaisants.
    Le comte eut quelque peine à maîtriser sa
colère :
    — Pour un voisin aimable, tu verses dans
l’excès !
    Le lieutenant de police criminelle, un vague
sourire aux lèvres, posa une main apaisante sur l’avant-bras de Nissac :
    — Il a peut-être ses raisons…
    Puis, toisant Joseph :
    — Des raisons personnelles, familiales…
    Joseph serra les mâchoires, hésita visiblement
puis, s’adressant au seul comte de Nissac :
    — Dix ans, j’ai cherché dix ans !… Mon
épouse et mes quatre enfants étaient morts, mais il me restait peut-être une
fille… Ah, ne me jugez point trop durement, il n’est de nuit où je ne m’accable
de reproches !
    — Parle, à la fin ! cria le comte
qui entrevoyait la vérité.
    Joseph s’appuya contre un grand fût de

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