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Les grandes dames de la Renaissance

Les grandes dames de la Renaissance

Titel: Les grandes dames de la Renaissance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Guy Breton
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l’évêque de Valence. »
    Cette nuit fut décisive. Marie, qui était d’origine flamande, sut se montrer « experte aux jeux de Vénus » et, le lendemain, Charles IX, absolument sous le charme, demandait à sa sœur Marguerite de prendre l’Orléanaise en qualité de femme de chambre, afin d’avoir un prétexte pour lui faire suivre la Cour.
    Alors on vit le roi se promener avec sa maîtresse sous les ombrages de Chambord, à Blois, à Amboise, à Chécy ; et le bon peuple du val de Loire composa une petite chanson narquoise que l’on chante encore de nos jours entre Beaugency et Châteauneuf…
     
    C’est Marie d’Orléans,
    Touchez là, ma commère, touchez là,
    C’est Marie d’Orléans,
    Qui a de beaux bras blancs.
     
    En son jardin d’amour,
    Touchez là, ma commère, touchez là,
    En son jardin d’amour,
    Un roi vient tous les jours.
     
    S’en vont jusqu’à Chécy,
    Touchez là, ma commère, touchez là,
    S’en vont jusqu’à Chécy,
    Pour y passer la nuit…
     
    Charles IX était extrêmement amoureux de Marie et passait son temps à le lui dire. Il est d’ailleurs curieux de constater combien ce garçon sombre et brutal [187] montrait de délicatesse avec sa maîtresse. Un jour, il vint lui offrir un petit papier sur lequel Marie Touchet lut ces mots : « Je charme tout. »
    Et, comme elle ne semblait pas comprendre, il expliqua :
    — C’est une anagramme de votre nom que j’ai trouvée tout à l’heure [188] .
     
    Mais ces folles nuits et ces marques de tendresse ne suffisaient pas à l’ardente Marie, qui continuait d’entretenir des relations avec son premier amant, Montluc.
    De bonnes âmes avertirent le roi, qui eut beaucoup de peine et chercha à savoir jusqu’où allait son infortune. Un soir, on lui dit que l’infidèle cachait dans sa bourse une lettre fort amoureuse de Montluc. Aussitôt, il imagina un curieux stratagème pour s’emparer de ce billet.
    Sortant de sa chambre en feignant une grande gaieté, il annonça qu’il organisait sur l’heure un dîner auquel il conviait quelques jolies dames. Marie était naturellement du nombre.
    Puis il commanda à Lachambre, capitaine d’une troupe d’Égyptiens, d’amener avec lui une douzaine de coupeurs de bourses des plus habiles dans leur métier, de faire couper celles de toutes les dames pendant le repas et de les lui apporter fidèlement à son coucher.
    « Lorsqu’on eut servi, nous dit Sauval, il fit placer M lle  Touchet auprès de lui, de peur qu’elle ne détournât le billet qu’il vouloit avoir entre ses mains. Les coupeurs de bourse s’acquittèrent de leur commission avec beaucoup d’adresse, et Lachambre ne manqua pas d’apporter au roi tout le butin comme il le lui avait ordonné.
    « Ce prince n’eut pas de peine à distinguer la bourse de sa maîtresse des autres et, l’ayant ouverte avec précipitation, y trouva le billet dont on lui avait parlé. Il le montra le lendemain à son infidèle, qui voulut désavouer qu’il s’adressât à elle parce qu’il n’avoit point de suscription. Mais elle ne put méconnaître plusieurs autres choses qui étoient dans sa bourse avec le billet et n’eut point d’autre parti à prendre que d’avouer la faute en pleurant et de demander pardon [189] . »
    Le billet ne contenait rien de grave, et le roi promit d’oublier à condition que Marie rompît définitivement avec Montluc.
    Ravie de s’en tirer à si bon compte, la belle jura de ne jamais revoir cet homme et tint d’ailleurs parole.
     
    Après cet incident, Charles fut plus amoureux encore de sa maîtresse. Voulant lui plaire, il désira s’occuper de politique, briller, commander, être vraiment le roi , malgré l’hostilité de Catherine de Médicis qui entendait régner seule.
    Flattée de voir son amant agir en homme, Marie l’encouragea et, tout de suite, exerça sur lui une influence considérable, surtout dans le domaine religieux. En effet, elle était huguenote et pensait qu’un rapprochement amical entre Charles IX et les chefs de la Réforme aboutirait à une conciliation et à une paix générale.
    Sur son conseil, le roi fit donc bonne mine à Coligny, avec qui Catherine était alors en pourparlers.
    Mais le vieil amiral était rusé. C’était lui qui parvint à séduire Charles et à le mettre dans son jeu.
    Le faible adolescent, voulant plaire à Marie, se laissa berner par Coligny, qui obtint, en échange de sourires et de bonnes paroles,

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