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Les grandes dames de la Renaissance

Les grandes dames de la Renaissance

Titel: Les grandes dames de la Renaissance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Guy Breton
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demoiselles de mauvaise vie, jeunes filles vertueuses, dames mariées… L’une de ces liaisons donna d’ailleurs à l’Église l’un de ses plus nobles représentants. C’est, en effet, des extravagances érotiques du duc d’Orléans et d’une jolie blanchisseuse de la Cour que naquit le digne cardinal de Bucy [22] …
    Au bout d’un an, Louis d’Orléans put s’enorgueillir d’avoir mis dans son lit toutes les femmes qui vivaient à la Cour d’Amboise.
    Oui, toutes, sauf une. Celle-là même qui, précisément, eût désiré devenir sa maîtresse. Je veux parler de M me  Anne de France, fille aînée de Louis XI.
    Il y avait longtemps qu’Anne aimait son cousin. Ils s’étaient connus enfants et la grâce de Louis, sa beauté, ses manières douces et élégantes avaient fortement impressionné la fillette. Au point qu’à douze ans elle s’était confiée à son père :
    — Je veux que Louis devienne mon mari.
    Le roi, très inquiet et craignant que cet amour ne vînt contrarier ses desseins, s’était immédiatement mis en quête d’un époux pour la précoce enfant. Il avait alors fixé son choix sur un de ses conseillers intimes, Pierre de Beaujeu, âgé de trente-trois ans, qui était « paisible, bénin et de bon vouloir ». Leur mariage avait été célébré le 30 novembre 1473.
    Aussitôt, Anne s’était prise d’amitié pour cet époux plein de douceur qui ne semblait préoccupé que du désir de lui plaire. Pourtant, elle avait continué d’aimer Louis d’Orléans et, lorsque celui-ci, trois ans plus tard, s’était marié avec Jeanne, elle n’avait pu cacher sa tristesse… Puis Louis s’était lancé dans la débauche, pour apaiser avec des maîtresses de passage une ardeur dont il ne voulait pas faire bénéficier la pauvre Jeanne, et Anne avait espéré qu’il jetterait les yeux sur elle. Hélas ! l’adolescent n’avait pas semblé comprendre ce que signifiaient les regards de sa jolie belle-sœur et il ne se livra, à son endroit, à aucune de ces voies de fait que la morale qualifie d’outrageantes, mais qu’elle espérait dans le secret de son cœur [23] …
     
    Pendant quelques années, Louis XI eut grand-peur que Louis d’Orléans, alléguant l’impossibilité d’avoir des rapports normaux avec Jeanne, ne fît casser son mariage par le pape. Aussi, tous les six mois, obligeait-il son gendre à se rendre au château de Lignières, en Berry, où vivait la malheureuse infirme, et à lui prouver ses bons sentiments.
    Naturellement, ces voyages étaient pour Louis de véritables corvées. Il arrivait, fort irrité à la pensée des belles amies qu’il avait abandonnées à Blois ou à Amboise, et considérait d’un œil méprisant cette enfant souffreteuse et bossue qu’on lui avait donnée. Comme elle voulait l’embrasser, car elle l’adorait, il la rejetait brutalement :
    — Sauvez vous ! criait-il. Je vais me coucher seul. Le voyage m’a fatigué.
    Le lendemain, il trouvait toujours de nouvelles raisons pour se soustraire au devoir conjugal. Alors, les gardes, sur l’ordre de Louis XI, l’emmenaient faire quelques longues parties de paume dans le but « d’eschauffer sa chair et de le mettre en un état propice à l’amour ». Ce moyen donnait généralement des résultats satisfaisants. Et Louis, aveuglé par le désir, courait retrouver Jeanne dans sa chambre.
    Aussitôt, un messager partait pour le Plessis-lez-Tours afin d’informer Louis XI qui, au reçu de la nouvelle, se frottait les mains en ricanant.
    Mais à malin, malin et demi. Un jour, l’adolescent, comprenant qu’il était victime d’une manœuvre déloyale, fit venir une courtisane à Lignières. Et, après les parties de paume, ce fut avec elle qu’il alla s’enfermer dans une chambre de la grosse tour…
     
    Le désaccord du jeune ménage fut bientôt connu non seulement en Berry et sur les bords de la Loire, mais encore à Paris, où tout le monde se livra à des commentaires passionnés. Les uns plaignaient la jeune duchesse d’Orléans, les autres défendaient Louis « qui avait été marié par force », et tous tombaient d’accord pour accuser Louis XI d’avoir fait le malheur de deux êtres…
    Pendant quelques semaines, la foule oublia pourtant les difficultés conjugales des Orléans. Ce fut pour s’intéresser aux détails d’un beau crime passionnel : le meurtrier avait titre de sénéchal, et l’une des victimes était l’aînée des filles

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