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Les hommes naissent tous le même jour - L'aurore - Tome I

Les hommes naissent tous le même jour - L'aurore - Tome I

Titel: Les hommes naissent tous le même jour - L'aurore - Tome I Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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Rejoignez la Maison de notre Ordre à Lima. Vous saurez là-bas ce que j’ai décidé pour vous.
    Le père Cartillo, au moment où Bertolini s’engageait dans l’escalier, le retint.
    — Pour aimer les hommes, dit Cartillo, tous les hommes, il faut n’être lié à aucun en particulier.
    Bertolini ne répondit pas. Il traversa la place sans que les Indiens lèvent les yeux vers lui. Il écrivit à sa sœur pour l’avertir de ses dispositions testamentaires, l’enjoignant d’avoir à les faire exécuter, lui demandant de faire envoyer à Maître Trevijano une forte somme afin qu’il recherche Dolorès et la suive tout au long de sa vie. Au notaire, il se contenta de répéter :
    — Vous serez payé, mais je veux que vous la trouviez et que vous la protégiez.
    Il devinait l’ironie dans les yeux rusés de Trevijano. « Ta fille, porc », semblait dire le notaire, « ta fille, née d’une Indienne des quartiers d’en haut. »
    — Ce que vous imaginez a peu d’importance, dit Bertolini. Mais agissez.
    Le soir, Giulio Bertolini partait pour Lima. Quelques jours plus tard, il embarquait à Callao à destination de San Francisco. De là, il gagnerait, par les lignes régulières, Shanghai puisqu’il était affecté à la Mission de Chine.
    « Dans cette mer humaine, lui avait écrit le père Cartillo, vous comprendrez combien il est fou, pour nous dont la passion est de témoigner et de guider les autres vers le souverain bien, de choisir par orgueil et vanité un être afin qu’il nous soit reconnaissant de ce que nous ferons pour lui. Celui qui aime n’attend rien. Et l’être aimé doit ignorer qui lui donne. Notre joie est profonde parce que notre vie personnelle est offerte à Dieu. À vous, en Jésus-Christ Notre Seigneur. »
    En courant vers les docks Jim Gallway et son frère Allen Roy bousculèrent Giulio Bertolini qui un sac de cuir noir posé devant lui hésitait, cherchant la direction des quais d’Extrême-Orient. Il embarquait dans quelques heures pour Sanghai. Allen Roy glissa, buta sur le sac et tomba lourdement. Un camion chargé de balles de coton klaxonna, obligeant Bertolini à se déplacer. Il aida Allen Roy à se redresser. Jim se tenait à quelques pas, sur ses gardes.
    — Tu as mal ? demanda Bertolini.
    Il écartait les cheveux blonds de l’enfant qui couvraient le front. Une bosse commença à se former. Allen Roy secoua la tête. Il avait la peau très brune des gosses qui vivent dans la rue.
    — Quel âge as-tu ?
    Bertoloni s’était baissé.
    — Mon frère, dit Jim.
    Il s’était approché et avait pris la main de Allen Roy.
    — Tu le protèges, dit Bertolini.
    — Il a cinq ans, dit Jim.
    Il regardait Giulio Bertolini, intrigué par la soutane noire différente de celle des prêtres.
    — Vous êtes prêtre ? demanda-t-il d’un ton soupçonneux.
    — Un peu, dit Bertolini.
    Il avait posé sa main sur la tête de Allen Roy, le caressant.
    — Tu as mal ? répéta-t-il.
    Mais Jim tira son frère vers lui, « Viens Allen, viens », cria-t-il. Il se souvenait des conseils de sa mère : « Méfie-toi, Jim, sur les docks on vole les enfants, les Chinois on ne sait pas ce qu’ils en font, échappe-toi si quelqu’un essaie de te parler. Tu écoutes, Jim ? » Jim avait haussé les épaules. « Nous ils ne nous prendront pas », avait-il répondu. « Vous comme les autres. »
    Jim retrouvait les paroles de sa mère, il s’éloignait de Giulio Bertolini, entraînant Allen Roy avec brutalité : « Viens, toi, viens. »
    — Les quais d’Extrême-Orient, cria Bertolini, tu connais ?
    Jim fit un geste vague vers la gauche avant de s’élancer dans la direction opposée.
    Il savait comment éviter les postes de douane, les rondes des gardiens qui surveillaient les entassements de sacs de riz ou de planches, les fûts. Des bandes de gamins vifs comme des oiseaux, avides comme des rats, hantaient les docks, crevant les sacs, volant le riz, s’égaillant dans les allées, au milieu des marchandises, quand surgissaient les gardiens la matraque au poing. Jim ne faisait partie d’aucune bande. Sa mère, Magrit Gallway, travaillait à la blanchisserie Petersen et il devait s’occuper de Allen Roy. Il le dressait, coups de pied, bourrades dans l’épaule, il l’obligeait à courir vite mais Allen Roy s’essoufflait et Jim devait l’attendre : « Flemmard », « trouillard », criait-il. Allen se laissait tomber par terre, levant vers

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