Les joyaux de la sorcière
l’ombre d’un sourire. Voilà qui est séduisant ! Savez-vous que j’ai donné le nom de « Joyaux de la Sorcière » à la fameuse parure de Bianca Capello ? Et Salem n’est pas tellement loin de Rhode Island ? Mais vous en étiez à un amoureux possible…
— Pas vraiment surprenant avec une fille aussi belle mariée à un homme beaucoup plus âgé et plutôt quelconque. Sa passion assouvie, l’amant pour éviter les ennuis aurait exécuté sa maîtresse avant de prendre la poudre d’escampette avec les bijoux…
— Possible sans doute…
— Mais hautement improbable car le drame s’est reproduit pratiquement de la même façon deux ans après et presque jour pour jour… Il y a vingt-quatre mois donc, Ricci après avoir mené un deuil impressionnant, a décidé de se remarier. Cette fois, il s’agissait d’une Américaine, une fille de dix-neuf ans qu’il avait rencontrée à Central Park où elle donnait à manger aux oiseaux. Elle s’appelait Anna Langdon et elle était vendeuse chez Woolworth…
— …sans aucune famille, blonde tirant sur le roux avec des beaux yeux sombres.
— Comment le savez-vous ?
— Je ne sais pas : j’imagine. Cela me paraît couler de source.
— Une vraie Cendrillon en effet dont Ricci a fait une éblouissante créature. Et le scénario s’est renouvelé. Le mariage a été annoncé. Il devait avoir lieu comme le premier à six heures du soir et se terminer par un bal.
— En costumes d’époque, j’imagine ?
— Tout à fait. Ricci avait demandé à ses invités de faire ce petit effort en mémoire de sa première épouse si tragiquement disparue.
— Et ils ont marché ?
— Presque tous. La première fête avait été sublime, d’une rare somptuosité. Elle avait laissé de tels souvenirs – même dans un lieu aussi fabuleux que Newport ! – qu’ils ont eu envie de la renouveler. Par pure curiosité j’y suis allé, moi aussi, bien que je n’eusse pas été invité et j’avoue que le coup d’œil était féerique.
— La mariée portait-elle des bijoux ?
— Naturellement, mais ce n’étaient pas ceux de la première fois.
— Tiens donc ? J’aurais cru pourtant…
— Ne laissez pas s’envoler votre imagination : si la parure de Maddalena lui a été volée par celui qui l’a tuée, comment voulez-vous que Ricci puisse l’offrir à sa nouvelle fiancée ? Elle avait sur la gorge un énorme rubis au bout d’une chaîne d’or, des perles et des rubis plus petits, rien aux oreilles, rien aux bras mais à la main droite, il y avait un autre rubis de la même taille.
— Que s’est-il passé ensuite ?
— Pratiquement le même scénario. Ricci est entré avec sa jeune épouse dans la chambre. À dû en ressortir environ une demi-heure après, appelé par un télégramme à La Nouvelle-Orléans. Il en a montré paraît-il une vive contrariété mais l’affaire, une fois encore, était d’importance et il est parti en recommandant à ses serviteurs la plus grande vigilance…
— Il y a quelque chose que je ne comprends pas. La Floride comme la Louisiane sont des territoires plutôt agréables pourquoi donc n’y emmenait-il pas ses compagnes ? Un voyage de noces comme un autre ? Étrange qu’il n’y en ait pas eu au programme ?
— Mais c’était prévu : le couple devait partir pour l’Italie la première fois, pour Paris la seconde au matin suivant la nuit de noces. D’après ce que j’ai pu entendre des domestiques ni l’un ni l’autre ne souhaitait se lancer dans un voyage d’affaires sans grand attrait surtout après une journée si fatigante. Après le départ de l’époux la porte de la chambre s’est refermée sur Anna comme elle s’était refermée sur Maddalena… et plus personne ne l’a revue vivante. Au matin elle avait disparu ne laissant derrière elle que ses atours de mariée et sans que rien ait été dérangé dans la pièce.
— Elle est partie en chemise de nuit comme la première ?
— Et avec les bijoux. Quatre jours plus tard, son corps mutilé de la même façon que l’autre était découvert à la pointe de l’île. Vous imaginez l’effet sur la population. L’affaire a fait un bruit énorme et cette fois, le F. B. I. s’en est mêlé. Le coupable a été retrouvé…
— Ah bon ? Et c’était ?
— Un pêcheur des environs. Un beau type, entre parenthèses, dont on pouvait comprendre qu’une femme puisse s’éprendre, surtout si on
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