Les joyaux de la sorcière
quelque temps sinon comment expliquer qu’ils se soient retrouvés au cou de la cantatrice ? Mais poursuivez je vous en prie et pardonnez-moi de vous avoir interrompu.
— Le mal n’est pas grand : votre intervention ne manquait pas d’intérêt mais revenons au mariage ! Vers le milieu de la nuit, les époux se sont retirés, les invités aussi… et une semaine plus tard, le corps de Maddalena, nu, disloqué et éventré était retrouvé sur une plage au sud de Newport. Je ne dirais pas assassiné mais massacré… Même pour moi le spectacle était difficile à supporter.
— Comment se fait-il dans ce cas que Ricci ne soit pas sous les verrous depuis quatre ans ? gronda Aldo révulsé d’horreur.
— Simplement parce qu’il ne pouvait pas être l’assassin. Il était en Floride au moment du meurtre. Il y était parti au matin qui suivit ses noces et il avait une collection de témoins tous plus sérieux les uns que les autres.
— Payés sans doute ?
— Non. Des gens très bien, hôteliers, serveurs, conducteurs de train, etc.
— …de même qu’il était à bord du Leviathan au moment où Jacqueline Auger était écrasée devant le Ritz… S’il n’a pas agi en personne il a commandé le crime. Vous avez dû enquêter. Vous n’avez rien trouvé ?
— Rien ! Pas ça ! fit Anderson en faisant claquer l’ongle de son pouce entre ses dents. On a visité son énorme baraque, le Palazzo Ricci comme il l’appelle, depuis les caves jusqu’aux toits sans détecter la plus petite trace, le moindre indice. Les jardins aussi et le hangar à bateaux. On a fouillé chez les domestiques, on les a passés au gril et, tenez-vous bien : ceux-ci ont vu Maddalena entrer dans la chambre nuptiale, menée par Ricci mais ensuite ils n’ont pas revu la jeune femme.
— Comment cela ?
— Elle n’est jamais ressortie de cette chambre. Du moins à leur connaissance car il a bien fallu qu’elle en sorte pour qu’on la retrouve une semaine plus tard sur les rochers. Ricci, lui, apparemment désolé d’être obligé de s’éloigner s’est fait conduire à New York dans son yacht d’où il a pris le train pour la Floride. Naturellement avant de partir il avait recommandé que l’on veille sur son épouse mais lorsque la femme de chambre est venue réveiller Maddalena avec une tasse de thé il n’y avait personne et la chambre était dans l’état exact où elle l’avait elle-même laissée quand vers la fin de la journée elle était venue l’examiner afin d’être sûre que tout était en ordre. La couverture du lit nuptial était faite, les vêtements intacts, la robe de noces étalée sur un fauteuil. Seuls manquaient les bijoux, la chemise de nuit et le déshabillé assorti en batiste et dentelles blanches ainsi que les mules de velours rouge.
— Autrement dit Maddalena serait partie faire un tour dans cet appareil un peu succinct – au fait, c’était quand ?
— En juillet donc en été et il faisait chaud, une espèce de chaleur orageuse un peu étouffante.
— Qui expliquerait l’envie de faire un tour dans la fraîcheur de la nuit mais après une fête les domestiques se hâtent habituellement de remettre tout en ordre et quelqu’un aurait pu la voir si – et c’est le plus probable – elle était descendue vers la mer.
— Mais personne ne l’a vue et croyez-moi il y avait du monde : rien qu’au Palazzo, ils sont vingt à demeure et il y avait aussi des extra. Cela faisait une cinquantaine de personnes…
— Et elle a disparu comme ça : en chemise et saut-de-lit mais avec les joyaux ? Que s’est-il passé ensuite ?
— On a prévenu le mari par télégramme et il est accouru en donnant tous les signes d’une profonde désolation. Il avait l’air à moitié fou, exigeait que l’on mène une enquête serrée, promettant même une forte récompense à qui ferait prendre l’assassin et je vous prie de croire qu’il y a eu du monde mais, comme d’habitude en pareil cas, toutes ces bonnes volontés n’ont fait que gêner notre action.
— Je veux bien le croire. Et vous dites qu’on l’a retrouvée nue les bijoux envolés bien entendu.
— Eh oui ! On a avancé alors l’hypothèse que la malheureuse était allée rejoindre un amoureux. Par quel chemin on n’en a rien su à moins qu’elle n’ait eu la possibilité d’emprunter le balai des sorcières ou de se faire pousser des ailes…
— Les sorcières ? fit Morosini avec
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