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Les larmes du diable

Les larmes du diable

Titel: Les larmes du diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christopher John Sansom
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d’apprendre ce qui se passe avec lady Honor ?
    — Oui, j’irai à Lincoln’s Inn en sortant de chez moi. »
    Je lui avais parlé du nouveau mystère qu’avait fait surgir la conversation au bord du fleuve. Mais je me rendais compte que, quand il s’agissait de lady Honor, j’avais besoin de l’opinion de quelqu’un dont l’esprit n’était pas obscurci par ses sentiments. Barak m’avait dit qu’il fallait que j’interroge Marchamount pour essayer d’avoir une idée plus précise sur ce qui se passait entre eux trois, lady Honor, le duc de Norfolk et lui. J’avais accepté de mauvais gré, car il me déplaisait fort de passer à nouveau au crible les relations de lady Honor avec Marchamount. « Peut-être aurai-je enfin des nouvelles de Bealknap », ajoutai-je, car nous ne savions toujours rien de lui. Au moins, en revenant de ma promenade au bord de la Tamise, j’avais trouvé un message de Guy me disant qu’il était rentré et qu’il attendait ma visite le lendemain.
    À la table, de l’autre côté de la salle, le jeune homme s’était laissé persuader de recommencer une autre partie. Je saisis un accent de la campagne. De l’Essex, comme celui de Joseph. Je songeai à Elizabeth en train de dépérir dans la basse-fosse, à son oncle, qui devait être fou d’angoisse et se demander ce que je faisais. « Il faut que nous retournions voir ce puits, chuchotai-je.
    — Je sais. Avec les chiens, c’est risqué. » Il fronça les sourcils. « Je réfléchirai à la meilleure façon de procéder.
    — Merci. Je suis votre obligé.
    — Il paraît que les anabaptistes ont fait amende honorable. On ne parle que de ça.
    — Les gens ne sont-ils pas déçus d’être privés du divertissement que leur offre le bûcher ?
    — Certains, si. Mais, pour la plupart, ils n’aiment pas assister à ce genre de spectacle.
    — Quand je suis arrivé à Londres pour mes études, la mode voulait qu’on fût en faveur de la Réforme. Thomas More lui-même en était partisan. Mais c’est alors que les ouvrages luthériens défendus ont fait leur apparition, et quand More a été nommé chancelier, il a envoyé beaucoup de gens au bûcher. Ilcroyait fermement que le feu purifiait du péché et créait la terreur. Sur ce dernier point, il avait raison. Le temps est venu où rares étaient ceux qui n’avaient jamais assisté à ce supplice, même si les gens n’y allaient que pour éviter les ragots.
    — Je ne me souviens guère de l’époque qui a précédé le luthéranisme, j’étais trop jeune alors, dit Barak. Je ne me rappelle que l’odeur de merde qui accompagnait mon père partout. Quand il approchait, je me sauvais au grenier pour y faire mes devoirs alors que le pauvre gueux voulait seulement me caresser la tête.
    — Vous faisiez vos devoirs pour l’école de St Paul ?
    — Oui. Les vieux moines étaient des hommes bons, mais, pardieu, ils vivaient bien !
    — Je sais. Moi aussi, j’ai fréquenté une école monastique.
    — J’ai aperçu l’un de mes anciens maîtres il y a deux jours, en train de mendier dans la rue, dit-il en soupirant. Il avait l’air complètement égaré. C’est l’un de ceux qui ont mal supporté de devoir affronter le monde extérieur. C’était horrible à voir. » Il me regarda, l’air perplexe. « Où cela va-t-il nous mener, vous pouvez me le dire ?
    — Non. Je crains seulement que les changements incessants des dernières années n’aient miné la foi de nombreuses personnes, dis-je en pensant à lady Honor.
    — Je n’ai jamais eu une foi capable de déplacer les montagnes.
    — Moi si, autrefois. Chaque jour, pourtant, elle devient plus incertaine.
    — Lord Cromwell a la foi. Et il voudrait aider les pauvres. Mais tous ses projets… Entre ce que veut le roi et ce que veut le Parlement, ils ne voient jamais le jour.
    — C’est curieux. Lady Honor a dit quelque chose de semblable ce matin. » Je le regardai. Il venait encore de se découvrir sous un nouvel aspect : réfléchi et, comme beaucoup d’autres dans le royaume d’Angleterre, perplexe et inquiet.
    Il hocha la tête en direction de la porte. « Je crois que nous pouvons y aller maintenant. » Il se leva et assura son épée à sa ceinture. Je le suivis dans la nuit.
    Le couvre-feu avait sonné et les rues étaient désertes. La nuit était chaude et calme, sans un souffle d’air. Çà et là luisait une chandelle derrière une fenêtre, mais la maison des Gristwood, plongée dans

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