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Les Lavandières de Brocéliande

Les Lavandières de Brocéliande

Titel: Les Lavandières de Brocéliande Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edouard Brasey
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le front avec un large mouchoir blanc qu’il tira de son gilet.
    – Que voulez-vous dire ?
    – Je dis que la justice est lente et n’est pas toujours juste, surtout en ces temps troublés. Même si Philippe est inculpé, il faudra attendre de longs mois avant qu’un procès en assises ait lieu. S’il a lieu. Philippe, comme son père, a de solides appuis du côté de l’armée d’occupation…
    Maître Le Bihan serra les mâchoires jusqu’à ce que ses lèvres deviennent blanches.
    – Les salauds ! Criminels et collabos… Cela va bien ensemble… Mais je vous rassure. La Bretagne et la Francene seront pas éternellement aux mains des Allemands. Je puis vous jurer que le procès de Philippe aura lieu dans une France libre. Et il payera pour tous ses crimes…
    Yann plissa les yeux d’un air dubitatif.
    – Comment pouvez-vous en être si sûr ?
    Maître Le Bihan reprit de nouveau le ton de la confidence :
    – Voyez-vous, lorsque j’ai exigé la rupture des fiançailles de Rozenn et que j’ai pris mes distances avec la famille Montfort, j’ai beaucoup réfléchi… Sur mes fautes passées, ma lâcheté, mon aveuglement. Toute ma vie, je me suis laissé corrompre. J’ai éprouvé le besoin de me racheter…
    – De quelle façon ?
    Maître Le Bihan baissa encore la voix.
    – En m’engageant.
    Yann Luzel manifesta une légère surprise, mais ne fit aucun commentaire. L’autre poursuivit, avec des airs de conspirateur :
    – Vous avez entendu parler de l’Armée secrète ?
    L’étonnement de Yann ne fit que s’accroître. Il acquiesça d’un clignement d’yeux.
    – Je me suis rapproché d’elle, par l’intermédiaire des gendarmes de Vannes. Ils sont tous acquis à la cause de Londres et leur commandant est le chef secret de cette armée de l’ombre pour le Morbihan.
    – Le fameux Yodi ?
    – Lui-même. Bien entendu, cela doit rester entre nous, car la Gestapo le surveille de près et se doute de quelque chose. Mais je peux vous dire de source sûre que le débarquement aura lieu d’ici quelques semaines. Et ici même, en Bretagne, dans le Morbihan. Les maquisards de Concoret qui se cachent au Val-sans-Retour y participeront activement. Ces maquisards parmi lesquels se trouve ce pauvreLoïc Le Masle, le charbonnier que Hubert et Philippe ont dénoncé aux Allemands…
    Le garde forestier se demandait s’il devait accorder foi au retournement du notaire. Ne s’agissait-il pas d’un piège ? Maître Le Bihan ne cherchait-il pas à gagner sa confiance pour obtenir des informations ? Il savait peut-être qu’il fréquentait le nouveau recteur de Tréhorenteuc, qui lui-même protégeait les maquisards du Val-sans-Retour. Il décida de jouer la carte de la prudence.
    – Je ne vois pas en quoi ces révélations ont un quelconque rapport avec les intérêts bafoués de Gwenn, maître.
    Le notaire perçut la réserve de Yann et eut un sourire navré.
    – Vous ne me faites pas confiance, n’est-ce pas ? Vous pensez que je ne suis peut-être qu’un espion ? Après tout, n’ai-je pas trahi toute ma vie ? Pourquoi changerais-je tout à coup ?
    Il déplia son mouchoir et se moucha bruyamment avant de poursuivre.
    – Au fond, vous n’avez pas tort… Je ne suis pas un espion, mais mon engagement dans l’Armée secrète n’est pas exempt d’intérêt personnel, je dois l’avouer… Je ne vous ai pas menti quand je vous ai parlé d’une libération prochaine de la Bretagne et de la France. Lorsque les Allemands seront chassés, chacun aura des comptes à rendre. Les miens ne sont pas très nets. Si je puis prouver que j’ai aidé, dans la mesure de mes moyens, l’Armée secrète, même à quelques semaines de la fin de la guerre, j’aurais plus de chance de passer au travers des règlements de comptes qui auront lieu alors. Comme vous le voyez, mes nobles intentions sont encore dictées par des considérations égoïstes…
    – Je vous reconnais enfin, maître…, répliqua Yann. Pardonnez-moi, mais vous n’avez guère la stature d’un héros.
    – Certes... Mais certaines guerres se gagnent moins par les hauts faits des héros que par les revirements des lâches, ne croyez-vous pas ?
    Yann savoura la réponse, mais il n’était pas venu pour parler politique.
    – Et si nous revenions au testament d’Edern, maître ?
    Maître Le Bihan se leva et se dirigea vers une large armoire qui contenait ses archives.
    – Vous avez raison. Nous avons perdu trop

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