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Les Lavandières de Brocéliande

Les Lavandières de Brocéliande

Titel: Les Lavandières de Brocéliande Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edouard Brasey
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y logea les balles dont il avait également fait provision.
    Le chien noir poussait de petits jappements, comme s’il se doutait qu’il allait se passer quelque chose d’inhabituel.
    – Ne t’en fais pas, mon vieux Kidu, je ne vais pas te laisser seul. Qui s’occuperait de toi ? Viens ici, mon bon chien…
    Rassuré par le ton de son maître, Kidu agita la queue et lui lécha la main.
    – Ca ne sera pas long, tu vas voir…
    Hubert appliqua l’extrémité de l’arme sous la jugulaire du chien et actionna la détente. Le coup partit et Kidu s’écroula à terre presque sans un cri, baignant dans une mare de sang.
    Puis le baron plongea le canon ensanglanté du pistolet dans sa bouche grande ouverte et tira.
    La détonation retentit dans tout le château.

47
    Philippe entendit les deux coups de feu claquer, immédiatement suivis par le criaillement d’un envol de corneilles.
    Il se précipita à l’intérieur du château, sans prendre garde à ses bottes crottées, et grimpa quatre à quatre les hautes marches de l’escalier. Il ouvrit la porte du bureau où s’enfermait son père des heures durant et s’arrêta net, figé par la stupeur.
    Le baron, affalé dans son fauteuil, bras en croix, nuque cassée en arrière, n’avait plus qu’un trou noir et sanglant à la place du visage. À ses pieds, le chien était resté fidèle à son maître jusque dans la mort.
    Écœuré par cette vision de cauchemar et ce sang répandu, Philippe faillit battre en retraite afin d’appeler un domestique à l’aide.
    C’est alors qu’il vit l’enveloppe à son nom.
    Malgré sa répugnance, il approcha du cadavre, en prenant soin de ne pas regarder l’atroce blessure, prit l’enveloppe avec deux doigts, extirpa la lettre qui s’y trouvait et lut.
    – Le salaud…, gronda-t-il.
    Le Luger était tombé à terre, près de la mare de sang. Philippe s’en saisit et, après l’avoir rapidement nettoyé avec le chiffon demeuré sur le bureau, le glissa dans sa ceinture et sortit.
    Françoise et les domestiques étaient déjà en haut des escaliers, alertés eux aussi par les détonations.
    – Philippe ! Que se passe-t-il ? Ton père ? s’alarmait déjà la baronne.
    – N’y allez pas, mère, ce n’est pas un spectacle pour vous. Laissez-moi passer…
    Le jeune noble se fraya un chemin et dévala les escaliers dans un grand martèlement de bottes.
    En quittant le château, il entendit un hurlement.
    C’était sa mère qui venait de découvrir le corps sans vie de son époux, feu le baron Hubert Gaël de Montfort Brécilien.

    – Vous avez tué mon père ! Vous l’avez poussé au suicide avec vos manigances. Vous n’êtes qu’un lâche, un fourbe !
    Après avoir galopé d’une traite jusqu’à Mauron, Philippe avait forcé l’entrée de l’étude de Maître Le Bihan et ouvert la porte de son bureau à la volée. Le notaire, plongé dans ses dossiers, n’eut que le temps de relever la tête pour se retrouver nez à nez avec l’extrémité du Luger que le jeune homme braquait sur lui.
    – Mais… Qu’est-ce qui vous prend ? Baissez cette arme, voyons…
    – Je ne la baisserai que lorsque vous aurez détruit sous mes yeux l’acte indigne que vous avez fait signer de force à mon père. Il m’a tout révélé avant de se donner la mort…
    De sa main libre, Philippe extirpa la lettre du baron et la jeta sur le bureau du notaire qui, rajustant ses bésicles, en prit rapidement connaissance, malgré l’effroi que lui procurait le pistolet.
    – Tout… Tout cela est parfaitement en règle, commenta le notaire d’une voix légèrement tremblante. Monsieur le baron de Montfort a signé librement et en pleine possessionde ses moyens la subrogation de ses biens en faveur de l’héritière légitime du domaine, Gwenn de Montfort, votre cousine, la fille unique du frère aîné de votre père, Edern de Montfort.
    Ce discours formaliste et faussement doucereux ne fit que raviver la rage qui animait Philippe.
    – Je n’entends rien à ces combines ! hurla le jeune aristocrate. Gwenn n’est pas ma cousine. Je l’aurais su, tout de même… Et mon père ne m’a jamais parlé d’une quelconque descendance laissée par mon oncle mort à la guerre. Il s’agit là de mensonges et de faux que vous avez montés de toutes pièces pour condamner notre famille à la ruine et mon père au suicide. Vous avez voulu vous venger, voilà tout ! Mais je saurai bien vous contraindre à reconnaître

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