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Les Lavandières de Brocéliande

Les Lavandières de Brocéliande

Titel: Les Lavandières de Brocéliande Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edouard Brasey
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de Concoret. Si au moins cette guerre finissait…
    Au printemps de l’année 1917, Edern bénéficia d’une permission spéciale de quinze jours. Le général Nivelle préparait une offensive qui devrait être décisive pour le sort de la guerre. Elle aurait lieu au Chemin des Dames, dans l’Aisne, à la mi-avril. Le 35 e régiment d’artillerie y participerait. Avant de prendre part à cette mission, les artilleurs avaient bien mérité un peu de repos.
    Edern revint à Brocéliande. Mais cette fois-ci, il ne se contenterait pas de projets ou de promesses.
    Cette fois-ci, il épouserait Solenn.
    Il ne voulait pas retourner au front sans se savoir uni à celle qu’il aimait par les liens indéfectibles du mariage.
    Il voulait faire mentir les épilles jetées dans la fontaine de Barenton.

8
    Concoret, avril 1917
    Au début du mois d’avril, l’adjudant-chef Edern de Montfort était de retour à Concoret. Après quelques journées consacrées à des négociations mystérieuses, il alla rendre visite à Yann, accompagné de Solenn.
    – Nous allons nous marier, lança le jeune artilleur d’un ton sans réplique. Veux-tu être notre témoin, Yann ?
    – Vos familles ont enfin accepté ? se réjouit Yann.
    – Non, répliqua Edern, le visage fermé. Nous nous passerons de leur bénédiction.
    – Mais… Solenn est mineure, argumenta Yann. Elle n’a que dix-neuf ans. Il lui faut encore attendre deux ans si elle veut t’épouser sans le consentement de sa famille.
    – C’est la guerre, Yann ! s’emporta Edern. Tu ne t’imagines pas comment cela se passe, là-bas, sur le front ! Ces derniers temps, on était presque peinards dans la Somme. Mais nous repartons vers l’est dans quinze jours et je t’assure que ça va barder ! S’il m’arrive quoi que ce soit, je veux que Solenn soit ma femme. Au moins, elle touchera une pension de veuve de guerre et ne sera plus obligée de s’abîmer les mains au lavoir.
    – Ne parle pas comme ça, Edern ! supplia Solenn. Je ne pourrai pas vivre sans ta présence à mes côtés. Ne reparspas, je t’en supplie ! Tu t’es suffisamment battu. Tu as donné trois ans de ta vie à la France et tu as risqué mille fois la mort. Cela suffit, non ?
    Edern prit Solenn dans ses bras et caressa tendrement sa longue chevelure rousse.
    – Si je ne retourne pas à mon poste au jour dit, je serai considéré comme déserteur. Tu sais ce qu’on leur fait, aux déserteurs, Solenn ?
    Elle secoua la tête, sans rien dire.
    – J’ai vu des gars, au front, qui laissaient pendre leur main par-dessus la tranchée dans l’espoir d’être blessés et rapatriés à l’arrière. J’en ai vu se tirer volontairement une balle dans le pied, invoquant ensuite une maladresse, ou se replier trop vite lors d’un assaut de toute façon perdu d’avance. Certains prolongeaient leur permission d’un jour ou deux ou refusaient de retourner là-bas. D’autres, enfin, n’avaient rien fait. Ils s’étaient simplement trouvés là, au milieu d’une mutinerie collective, et avaient été choisis au hasard pour payer l’insubordination de leurs camarades. Pour l’exemple. Tous ces gars, Solenn, ont été condamnés comme déserteurs, radiés de leur grade et exécutés dans les vingt-quatre heures après une parodie de procès organisée par le commandant du régiment assisté de deux officiers. C’est cette fin que tu désires pour moi, Solenn ?
    La jeune fille ne répondit rien. Il n’y avait aucune porte de sortie, aucune solution pour échapper au piège infernal de la guerre. Et la paix n’était encore qu’un rêve lointain.
    – Comment allez-vous faire pour le mariage ? demanda Yann pour changer de sujet.
    – J’ai trouvé un brave prêtre qui consent à nous unir. La cérémonie aura lieu ce soir.
    – À Concoret ?
    – Non, bien sûr. Ni à Concoret, ni à Paimpont. Les recteurs de ces paroisses-là ont trop peur de se mettre à dos ma famille ou de se placer en infraction vis-à-vis du droit. Il est vrai qu’ils pourraient être poursuivis pour avoir célébré une cérémonie religieuse en l’absence d’un mariage civil préalable. Ils encourent six mois de prison, sans compter l’amende. Article 433-21 du code pénal.
    – Mais alors, qui ?
    – Un curé de la minuscule paroisse de Tréhorenteuc. Son église est presque en ruine, ses paroissiens ne viennent jamais à la messe.
    – Comment as-tu fait pour le convaincre ?
    Edern afficha un

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