Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les lions diffamés

Les lions diffamés

Titel: Les lions diffamés Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
Vom Netzwerk:
Lorsque nous saurons où sont ces bêtes, nous chasserons un petit peu avant de remonter. Cet après-midi, nous descendrons avec la meute.
    L’office achevé, Ogier avait l’intention de parfaire les ornements de son écu. Quant à Titus, ils devaient encore se familiariser l’un l’autre. À Pâques, en revenant à Rechignac après une absence plus longue que les précédentes, Bressolles lui avait fait don du rapace en même temps qu’il en offrait un, Roland, à Guillaume. « Je connais le grand fauconnier de Cordes et j’ai pensé que ce seraient des présents dignes de vous. » Qui était Bressolles ? Quelles attaches avait-il avec la Langue d’Oc ?
    Ogier tapota la croupe terne, poussiéreuse, du Noiret :
    — Non, Vivien… Je regrette mais j’ai trop à faire… Vous feriez mieux de laisser ce sanglier herbeiller ou fouger [176] … Gardez-vous aussi des Anglais !
    À son tour sollicité, Blanquefort refusa net, sans explication. Guillaume, invité ensuite, crut bon de modérer l’impatience de son ami :
    — Attends d’avoir mangé, Vivien !… Nous irons tous chasser avec Tancrède.
    L’estropié, dont la manche volait au vent, eut un sursaut :
    — Tancrède !… Parlons-en !… As-tu vu ce qu’elle est devenue à Lubersac ? Par ma foi, j’irai demain trouver ma parente et lui demanderai si son couvent n’est point un repaire de…
    — Laisse donc, coupa Guillaume. Je vais la marier en hâte. Ainsi, elle recouvrera le bon sens et les robes !… Quant à chasser et même errer sur nos terres, attends que nous ayons dîné… Seul et manchot, tu ne pourras rien au débucher d’un sanglier. Hier matin, en sortant, nous avons aperçu une harde. Hein, mon neveu ?
    Ogier acquiesça :
    — Je ne sais, Vivien, si les cerfs sont nombreux, mais les bêtes noires pullulent : les Goddons ont dû les chasser de leurs bauges et elles fuient de notre côté.
    — Restez donc, messire, conseilla Griveau, de loin. Le Noiret a besoin d’un bon coup d’étrille.
    Podensac sourcilla et parut sur le point de se courroucer.
    — N’ayez crainte, tous… Si j’aperçois ces porcs poilus comme des boucs, je passerai au large.
    — Nous t’aurons prévenu, dit Guillaume.
    Déjà, le manchot guidait le cheval vers les tours portières. Et Griveau se signait en disant : « Il est fol ! » Guillaume l’approuva d’un mouvement de tête.
    Podensac, talonnant le Noiret, dispersa des oies et des canards groupés devant l’abreuvoir.
    — Viens, mon neveu.
    Guillaume allait entrer dans la chapelle. Il s’immobilisa pour en laisser sortir Bressolles.
    — Le bonjour, messires. Enfin, du soleil !… Il me tarde d’être à dimanche. Pourvu que nous ayons ce temps-là pour partir !
    — Et les Anglais ? demanda Guillaume. Ne les craignez-vous pas ?
    — Je les crains, certes. Mais que voudriez-vous qu’ils viennent faire ici ?
    — La guerre, messire, la guerre !
    Ogier s’était gardé de prendre part à cet échange. Il dévisageait le maître maçon. Non seulement il le trouvait vieilli depuis sa dernière absence – des rides fripaient ses joues, les coins de sa bouche et de ses paupières –, mais de plus, Bressolles semblait accablé par une espèce de mal de l’âme. Les besogneux dans la cour, les volailles sur le fumier, les trois chênes près du puits, les granges et surtout les murailles et les tours érigées sous sa surveillance, rien ne l’intéressait plus autant qu’autrefois. C’était comme s’il avait fait – sans doute en son pays – une rencontre essentielle, déterminante, et que dorénavant tout ce qui existait en dehors d’elle et de ses prolongements importait peu. Ses yeux même avaient perdu leur singulier éclat car leur vie était tout intérieure. Bressolles s’était toujours enveloppé de mystère. Ogier craignit de l’importuner en lui demandant la raison de son pèlerinage au Mont-Saint-Michel.
    — Si les Anglais se montrent, messire Girbert, il nous faudra différer notre départ…
    Le garçon laissa sa phrase en suspens, car Tancrède apparaissait.
    Elle s’était vêtue en femme : pareille à celle d’un soir lointain, une robe blanche flottait autour d’elle. Assis sur la margelle du puits, Didier lui lança une sornette que Renaud et Haguenier soulignèrent de leurs rires. Tancrède cracha dans leur direction, prolongeant ainsi une hilarité qui la poursuivit longtemps sans qu’elle parût s’en émouvoir.
    — Si

Weitere Kostenlose Bücher