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Les lions diffamés

Les lions diffamés

Titel: Les lions diffamés Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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les faisant occire, en hâte ou lentement, deviendrait-elle plus grande avant le petit jour ? Non ! Vos hommes ont commis cette nuit force maux et tueries. Ne sont-ils pas repus de sang ? N’ont-ils pas atteint cette satiété dont vous parliez à messire Briatexte ? Et puis, quelque puissant que vous soyez pour le moment, épargnez-moi vos appréciations sur la vaillance… Elles me paraissent d’autant plus déplacées que celle de vos champions, avant d’entamer ce combat inégal, a commencé par se manifester dans les trous à merde !
    Un lourd murmure d’indignation parcourut les rangs des routiers. Des cris fusèrent :
    — À mort !
    — Branchons-les tous les quatre !
    — Laissez-moi ce puceau et j’en fais mon affaire !
    Des éclairs de lames fendirent l’obscurité. Enguerrand de Briatexte dégaina son épée, mais ce fut pour en placer la pointe sous le menton de Barbiéri qui hurlait à nouveau :
    — Laissez-moi ce puceau !
    — On ne vous a rien demandé, messire le pastoureau !
    Le chevalier à l’armure noire s’exprimait lentement, d’une façon courtoise, cordiale même, mais péremptoire. Il ajouta, tandis que le forcené reculait en grognant, ainsi que ses voisins :
    — Je pense, moi, que ce puceau est doté d’un cœur dont vous n’êtes pas pourvu, Barbiéri, et que son allusion sur les latrines, tout bien pesé, n’est pas si hardie en ce qui vous concerne. Car si mon nez ne me joue pas un tour, vous puez fortement l’étron et le pissat.
    Robin Canole s’esclaffa. Cela suffit pour transformer l’outrage en facétie. La voix du chef des routiers devint condescendante :
    — Enguerrand, mon bon, laissons là ces histoires nauséabondes.
    Puis sèchement :
    — Au large, Barbiéri. Allons, je vois un puits : va donc t’y démerder… Quant à toi, Argouges, il te faut ces trois couards ? Je te les accorde… Et je vais te prouver que j’apprécie ton audace… Veux-tu cette ribaude pour te payer du bon temps la nuit prochaine et, si tu y tiens, les suivantes ?
    — Pourquoi dirais-je non ? J’accepte avec plaisir.
    — Elle est mienne ! hurla Barbiéri en surgissant de la foule des guerriers dans laquelle il venait à peine de s’enfoncer.
    Le drôle fit quelques pas en direction de son chef. Il semblait désespéré :
    — Robin, tu ne peux donner cette fille à ce galopin !… Ces trois couards, je veux bien mais…
    Dans un cliquetis de chaînes, Canole croisa les bras.
    — Je t’ai dit d’aller laver ta merde, compère… Et n’essaie pas de reprendre cette ribaude en te faisant aider.
    Un géant chevelu et barbu apparut, portant sur son épaule une enclume. Il posa son fardeau, l’équilibra sur le sol et tira un marteau coincé entre sa ceinture et ses haut-de-chausses. Des torches s’approchèrent.
    — J’ai tardé, Rob, mais je ne trouvais pas la forge.
    Canole s’agenouilla et posa une main retournée sur l’enclume.
    — Frappe fort, Tranchelion.
    Deux coups rompirent les bracelets de fer. Libéré, le routier tâta ses poignets et leva les yeux au ciel. Cessant de l’observer, Ogier s’aperçut que la pluie avait cessé, puis comme, se sentant épié, il se retournait, ses yeux rencontrèrent ceux de Saint-Rémy. La méchanceté luisait, toujours aussi destructrice, dans le regard du vieillard, et dessous, il y avait un sourire de haine. Renaud et Haguenier, tête nue, en mailles et tabard boueux, avaient un aspect misérable.
    — Il faut en finir ! hurla Barbiéri.
    La rage, à moins que ce ne fût un essoufflement dû à quelque maladie, gonflait spasmodiquement ses joues poilues. Il essuya ses mains contre ses hanches.
    — Nous devons flamber ce châtel branlant après y avoir pris tout ce qui nous convient. Puis nous irons assiéger son voisin !
    — Est-ce toi qui commande ? interrogea Canole dont la fureur, soudain, enrouait la voix.
    On se tut peu à peu. Très loin, un éternuement fit comme un bruit de tissu qu’on lacère et de nouveau tout fut tellement silencieux qu’Ogier en profita :
    — Passez au large de Rechignac avec vos routiers, messire Canole… Il appartient à ma famille.
    —  Goddam !… Que de volonté ! s’exclama l’Anglais, le poing levé. Je me suis décidé à conquérir ce castle dès que je l’ai vu. Et je m’en suis approché sans que nul d’entre vous ne m’aperçoive. Eh oui : la vigilance de tes regards [243] laisse à désirer.
    Ogier reçut ce trait sans

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