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Les Mains du miracle

Les Mains du miracle

Titel: Les Mains du miracle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Joseph Kessel
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secours
au docteur. Il s’agissait toutefois d’une question très différente.
    — La Suisse est prête, dit M me  Imfeld,
à recueillir vingt mille internés juifs si on réussit à les tirer des camps de
concentration. Ce plan a été conçu par quelques grands industriels suisses qui
travaillent avec la Croix-Rouge. Ils ont l’accord du gouvernement de Berne.
    Kersten s’engagea à soumettre ce
projet à Himmler et à le soutenir auprès de lui.
     

2
    Le 17 août 1944, rappelé
par le Reichsführer qui désirait, ses soins, Kersten prit une fois de plus, à
Berlin, le train spécial pour le Q.G. de Prusse-Orientale.
    À peine fut-il arrivé à Hochwald
qu’il s’informa du sort de Karl Venzel auprès de Brandt. Celui-ci avait trouvé
le dossier du grand propriétaire terrien. Il le laissa lire à Kersten.
    Le docteur vit alors que les pires
craintes sur le sort de Venzel étaient justifiées. La Gestapo l’avait arrêté le
31 juillet, à Halle. On l’accusait d’avoir participé au complot contre
Hitler, en qualité d’ami intime du docteur Gördeler, l’un des principaux
conjurés du 20 juillet, et qui devait prendre la place du Führer à la tête
d’un gouvernement provisoire. Dans ce gouvernement, Gördeler – disait le
rapport de la Gestapo – avait choisi, pour le ministère de l’Agriculture,
Karl Venzel.
    Quand Kersten eut pris connaissance
de ces accusations terribles, Rudolph Brandt lui dit :
    — Le document est ultra-secret.
Il m’est interdit de le montrer à qui que ce soit, même à vous. Feignez de
l’ignorer et interrogez Himmler lui-même.
    Kersten posa la question au cours du
premier traitement qu’il donna au Reichsführer. La réponse fut d’une violence
et d’une grossièreté extrêmes. Himmler, ce qui lui arrivait très rarement,
éclata contre Venzel en insultes obscènes, ordurières. Puis il cria :
    — C’est un des pires traîtres
et des pires ennemis du Führer. Un ignoble ! Il n’a pas le droit de vivre.
    Kersten calma Himmler, en lui
rappelant que rien n’était plus mauvais pour son système nerveux que ces accès
de rage, puis il dit solennellement :
    — Reichsführer, je connais bien
mon ami. Il n’a jamais proféré un mot soit contre Hitler, soit contre
vous-même. Tout ce qu’on lui reproche n’est que le fruit de calomnies et
d’intrigues.
    — Je suis certain du contraire,
répliqua Himmler. Mes rapports proviennent d’hommes sûrs et objectifs.
    La discussion –
passionnée – se prolongea pendant tout le traitement et continua même
lorsqu’il fut achevé. Au bout d’une heure, Himmler y mit fin par cette
déclaration :
    — Tout ce que nous pouvons dire
n’a aucune valeur. Hitler lui-même, personnellement, m’a donné l’ordre
d’arrêter Venzel. Et cet ordre, il me l’a fait répéter par son officier
d’ordonnance.
    Kersten vit qu’il n’y avait aucun
espoir de faire libérer son ami. Du moins essaya-t-il d’éviter le pire. Il
dit :
    — Je vous comprends,
Reichsführer. Il vous est impossible de relâcher Venzel. Mais ce que vous
pouvez faire, c’est épargner sa vie. Après la guerre et la victoire dont vous
êtes toujours sûr, n’est-ce pas ? vous aurez tout loisir d’être généreux à
son égard.
    — Bon, bon, c’est entendu,
soupira Himmler avec lassitude.
    Puis il hocha la tête et dit :
    — Vraiment, vous n’avez que des
gens de mauvais aloi pour amis.
    — Vraiment ? demanda
Kersten. Mais vous alors, Reichsführer ? N’êtes-vous pas aussi mon
ami ?
    Himmler se mit à rire.
    — Oh, dit-il, vous en avez tout
de même quelques-uns d’acceptables…
    Il considéra très affectueusement le
gros homme qui lui donnait bonne santé, bonne humeur et ajouta :
    — Je vous promets de traiter le
cas de Venzel dans l’esprit le plus généreux.
    — Donnez-moi votre main, dit
Kersten avec solennité. Et votre parole de chef germanique de tenir cette
promesse.
    — Vous l’avez, dit Himmler.
     

3
    Une semaine plus tard, en pleine nuit
et alors que Kersten dormait profondément dans son compartiment, le train
spécial de Himmler se mit en marche. Il conduisit le Reichsführer et son
état-major jusqu’au Q.G. de l’Ouest, à Berchtesgaden. Himmler y occupa un petit
chalet très simple.
    C’est là que, plaidant une fois de
plus en faveur du plan élaboré par Gunther et lui-même à Stockholm, le docteur
obtint enfin de Himmler cette réponse :
    — Pour les Danois et

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