Les mannequins nus
conditions y étaient plus stables qu’à Auschwitz II – Birkenau, par exemple. C’est là que se trouvait l’administration centrale S.S. ; par conséquent, le nombre de détenus qui travaillaient dans les bureaux S.S. était plus élevé. Ainsi, le kommando desservant l’infirmerie des S.S. acquit pour le groupe une grande importance, car le médecin S.S. Wirths se laissait influencer ; en 1944, il fut mis au courant de l’existence d’une organisation clandestine des détenus, et il l’aida en maintes choses. Il a été possible de la sorte de mettre un terme aux sélections à l’hôpital. Ce médecin a aussi sauvé la vie à un membre de la direction du groupe de combat. L’infirmière national-socialiste Maria Stromberger, une pieuse catholique autrichienne, a également apporté une aide courageuse aux détenus (…).
— Il fallait s’attendre à ce que les S.S. ne reculassent devant rien, pour ne pas laisser tomber vivants entre les mains des Alliés les témoins des crimes d’Auschwitz. Il ne fallait pas que les détenus se laissent assassiner sans résistance, au dernier moment. C’est pourquoi le groupe de combat organisa un état-major militaire, dont les chefs seuls se trouvaient en contact avec la direction du groupe. Des détenus sûrs furent affectés aux kommandos qui présentaient un intérêt particulier, du point de vue militaire ; le train, les kommandos qui travaillaient dans les locaux S.S., et qui, en cas de nécessité auraient pu se procurer des armes par la force, et ainsi de suite. Cependant, on s’astreignait à garder relativement bas le nombre de ceux qui participaient directement à l’organisation.
— À l’approche du front, il fallait compter soit avec une liquidation complète du camp, c’est-à-dire avec l’assassinat de tous les détenus, soit avec une évacuation. Quel que soit le cas, une liaison étroite avec l’organisation de résistance militaire polonaise, la Armia Krajowa, était une condition indispensable pour une action armée. Celle-ci envoya dans la région d’Auschwitz un officier chargé d’établir la liaison avec les partisans des environs, et de coopérer étroitement avec l’organisation de combat du camp.
— À cette époque, c’est-à-dire en août 1944, l’organisation envoya au-dehors un rapport sur la situation militaire, qui a été conservé. D’après ce rapport, les camps du complexe d’Auschwitz comptaient à ce moment 65 900 détenus et 39200 détenues.
Friemel, Burger, Duzel, Piaty, Raynoch, Swierczyna et Yesely, « patrons » du groupe de combat d’Auschwitz, ont élaboré patiemment un plan d’action militaire. De l’extérieur, ils sont aidés par deux anciens évadés (120) et des partisans (121) .
Ce « Comité restreint » est élargi à Mala et Galinski qui s’évaderont pour transmettre les dernières instructions aux partisans. Cette action du « groupe de combat » d’Auschwitz, la plus importante préparée dans un camp de concentration, ne sera probablement jamais connue, car tous les membres du « Comité » ont été arrêtés et exécutés. Ce que l’on sait se résumé aux grandes lignes du projet. Au matin du jour J, toutes les femmes refusent de se rendre à l’appel. Cette révolte doit mobiliser la plupart des réserves S.S. Les kommandos des crématoires profitent de l’agitation pour faire sauter les fours et s’évader. Troisième phase enfin, les partisans armés attaquent les postes de garde de la grande ceinture alors que le groupe de combat d’Auschwitz force les barbelés du premier cercle et facilite l’évasion de masse. Les cent hommes et les cent femmes recrutés depuis plusieurs mois par le « comité directeur » ne recevront leurs instructions que la veille au soir du jour choisi. Les « cent » femmes pour obliger leurs compagnes à la plus grande détermination leur diront simplement quelques minutes avant l’appel : « Le camp va être liquidé au lance-flammes après l’appel. Il ne faut en aucun cas se rendre à l’appel. Les hommes ont des armes, ils vont attaquer les S.S. »
— Je (122) ne sais si dans le camp des femmes nous étions nombreuses dans la confidence. Mala qui était devenue ma meilleure amie le jour où j’avais pu lui offrir un recueil de poèmes de Verlaine, découvert au Canada, me dit au début de l’été : « Je vais m’évader, je crois que tout est presque prêt. On prépare ça pour moi. Mais après,
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