Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les masques de Saint-Marc

Les masques de Saint-Marc

Titel: Les masques de Saint-Marc Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nicolas Remin
Vom Netzwerk:
sur le campo San Maurizio.
    Arrivé sur la place Saint-Marc, Königsegg prit congé d’Andreotti peu avant minuit. Il songea un court instant à lui demander s’il ne voulait pas l’accompagner le lendemain matin sur le campo San Maurizio en apportant son hachoir par prudence. Cependant, il résolut d’y aller seul. Ils en viendraient inévitablement à parler de la coagulation du collier et il préférait malgré tout ne pas trop initier Ercole aux secrets de ses affaires.

22
    — Ah, pauvre Yorick ! s’exclama Tron.
    Bossi, le fossoyeur, posa son outil sur le bord de la tombe et s’essuya le front. Puis il pencha la tête en arrière et regarda son supérieur.
    — Je croyais qu’il s’appelait Montinari.
    Le commissaire sourit.
    — Vous avez raison. Seulement, vos coups de bêche me rappelaient Hamlet . Vous en avez encore pour longtemps ?
    — Cinq minutes tout au plus.
    Ils avaient retrouvé la sépulture sans peine car la couche de nuages s’était déchirée peu avant minuit, découvrant un pâle quartier de lune à l’est de la lagune. S’il avait fait nuit noire, pensait Tron, ils auraient eu beaucoup plus de mal à s’orienter sur l’île des morts. À l’inverse, avec une pleine lune, on aurait pu les voir. Mais là, les conditions atmosphériques étaient parfaites, d’autant qu’une nappe de brouillard qui leur arrivait à la poitrine flottait au-dessus des tombes et amortissait les bruits. Quoique détrempée par la pluie des jours précédents, la terre semblait meuble. Bossi ne donnait pas l’impression de beaucoup se fatiguer. Jusqu’ici, leur plan fonctionnait à merveille. La seule chose qui gênait Tron était le bruit de la bêche chaque fois qu’elle raclait le couvercle du cercueil. L’inspecteur releva la tête vers le commissaire qui tenait la lanterne, debout au bord du trou.
    — Vous pensez qu’on peut nous entendre ?
    Tron secoua la tête.
    — On ne s’attarde pas sur de mystérieux bruits sortant de tombes à minuit, Bossi.
    — Et si jamais quelqu’un voit la lanterne ?
    — Il la prendra pour une flammerole.
    — Une flammerole ?
    Il n’avait pas l’air de connaître le mot.
    — Pour un feu follet, précisa le commissaire. Ce sont les esprits des morts qui se retirent à nouveau sur le coup d’une heure du matin.
    Il ne distinguait pas le visage du jeune homme, mais il eut l’impression que cette explication le rassurait. Leur promenade dans le cimetière nocturne semblait lui avoir mis les nerfs à vif. Tron s’accroupit et abaissa la lanterne au niveau du couvercle. Son assistant avait presque fini d’enlever la terre. La surface métallique brillait dans la lumière.
    — Vous arrivez à voir s’il est soudé ?
    — Je crois… commença Bossi avant de toussoter.
    Il se pencha. Le commissaire l’entendit gratter avec son ongle.
    — Qu’est-ce que vous croyez ?
    — Je crois qu’il n’est pas soudé, répondit l’inspecteur.
    — Et l’a-t-il été ?
    — Ça, je ne peux pas vous le dire, avec si peu de lumière ! En tout cas, on peut faire glisser le couvercle.
    — Alors, faites, mais attention ! Juste quelques centimètres.
    Tron ne pouvait pas voir ce que son subalterne bricolait. En revanche, il entendait sa respiration de plus en plus rapide ainsi qu’un frottement métallique.
    Bossi reprit son souffle et redressa la tête. Apparemment, il avait réussi.
    — Commencez par sentir, inspecteur.
    — Sentir ?
    — Oui, sentir. Avec le nez.
    — C’est très contagieux, le choléra ?
    — Le choléra ne se propage pas par les miasmes. Vous pouvez mettre votre nez dans le cercueil sans crainte.
    — Des miasmes ?
    — Oui, des émanations pestilentielles, expliqua Tron. Beaucoup de gens croient encore que les épidémies se répandent dans l’air. En règle générale pourtant, c’est par l’eau.
    Bossi lui adressa un regard méfiant.
    — Vous êtes sûr, commissaire ?
    — Sûr et certain. Allez, respirez !
    Tron frappa dans ses mains. Dans le silence du cimetière, ce bruit fit l’effet d’un coup de pistolet. Bossi sursauta.
    — C’est un ordre !
    L’inspecteur hésita encore un instant, puis se pencha au-dessus du cercueil et baissa la tête.
    — Alors ?
    — Rien, dit Bossi en se redressant.
    — Quoi, rien ?
    — Je ne sens rien du tout.
    — Dans ce cas, ouvrez-le un peu plus et glissez votre bêche à l’intérieur.
    — Moi ?
    — Oui, vous. Je vous rappelle que c’est votre bêche.
    Bossi poussa le couvercle du talon

Weitere Kostenlose Bücher