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Les masques de Saint-Marc

Les masques de Saint-Marc

Titel: Les masques de Saint-Marc Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nicolas Remin
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charmante.
    — Le problème est de savoir si j’en aurai l’occasion. La sécurité du couple impérial a été confiée à la police militaire. Nous n’avons rien à voir avec cela.
    — Parce qu’on ne vous fait pas confiance ?
    Il abonda dans son sens.
    — Cela m’en a tout l’air.
    — Et il n’y aura pas de gala ?
    Le commissaire haussa les épaules.
    — Jusqu’ici, personne n’a le programme. Pour des raisons de sécurité, nous n’apprendrons l’emploi du temps de François-Joseph qu’au tout dernier moment.
    — N’est-ce pas un peu stupide ? demanda la comtesse.
    — Pas forcément, répondit son fils. Des rumeurs d’attentat courent dans la ville.
    La comtesse se pencha au-dessus de la table, l’air outré.
    — Quoi ? Et toi, tu prends ici ton petit déjeuner en toute tranquillité ?
    Tron bâilla. Ce café léger n’était pas fait pour le requinquer.
    — Bossi s’en occupe, dit-il d’une voix lasse.
    Cette réponse suscita un long regard inquisiteur de la part de la comtesse, qui finit par secouer la tête avec un air de reproche.
    — Tu sais de quoi tu manques le plus, Alvise ?
    « Aucune idée. De dents de castor pour mordre dans tes petits pains, peut-être ? Ou de goût pour les mouches ? »
    — Non, mais tu vas sûrement me le dire.
    — D’ambition professionnelle ! lâcha-t-elle d’une voix résignée. Exactement comme ton père.
    Elle lui adressa un sourire forcé et leva sa tasse de café.
    — Quel est ton programme aujourd’hui ?
    À en juger par son profond soupir, elle supposait qu’il allait encore perdre son temps. Dans ces conditions, Tron jugea préférable de passer l’ Emporio della Poesia sous silence.
    — Spaur m’a chargé d’élaborer un plan pour assurer la sécurité du couple impérial, prétendit-il, au cas où la Kommandantur nous appellerait en renfort à la dernière minute.
    La comtesse hocha la tête d’un air satisfait.
    — Il serait fâcheux qu’il arrive quoi que ce soit à l’empereur.

34
    Dans la nuit, une violente averse s’était abattue sur la Hofburg. Le martèlement des gouttes contre les vitres avait réveillé Élisabeth à deux reprises ; chaque fois, elle avait eu du mal à se rendormir. Cependant, la pluie avait diminué au cours de la matinée. Vers midi, elle se limitait à un faible ruissellement. Par ailleurs, le niveau de l’eau dans le bec du baromètre de Goethe avait monté de manière sensible. Pour des raisons qu’elle n’avait jamais comprises, cela signifiait que le temps allait changer. Du reste, il avait déjà changé. Cela la rassurait car l’idée de devoir se rendre à la gare de Glocknitz sous une pluie battante lui répugnait.
    En s’approchant d’une fenêtre des appartements du tsar Alexandre, peu après midi, et en écartant le rideau, elle constata que les nuages couleur d’ardoise s’étaient métamorphosés en un ciel bleu lavande. La place du Jeu-de-Paume à ses pieds était toujours parsemée de flaques, mais la plupart des fiacres avaient déjà abaissé leurs capotes, signe incontestable qu’il n’allait pas se remettre à pleuvoir de sitôt. Sissi lâcha le rideau en tulle légèrement déchiré et se retourna.
    Le centre du grand salon était envahi par les bagages : des coffres, des malles, des valises et des sacs remplis de chaussures et de vêtements. Au total, vingt-quatre – tous numérotés avec soin, enregistrés sur une liste et posés dans l’ordre les uns à côté des autres. Cela faisait presque une semaine que la comtesse Königsegg passait dix heures par jour à préparer leur voyage à Venise.
    Le dernier, tout à droite, une petite valise en cuir insignifiante, venait encore de Possenhofen ; sur le devant, on distinguait les armoiries des ducs de Bavière. Sissi l’avait préparée elle-même ; c’était le bagage le plus important. Il contenait trois robes de promenade toutes simples, deux manteaux non moins discrets et, dans une boîte à part pour éviter qu’il ne s’écrase, un chapeau gris perle, muni d’une voilette noire.
    Était-il vrai, comme on le racontait, que Pauline Metternich et l’impératrice Eugénie se déguisaient pour prendre l’omnibus à Paris ? En fumant comme des sapeurs ? Dans le cas de Pauline Metternich, pensa Sissi, cela paraissait peu probable ; c’était une vraie sotte. Eugénie, en revanche, en était bien capable. N’avait-elle pas un jour, en Espagne, remis un prix à un torero avec une cigarette aux lèvres ? Et un

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