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Les murailles de feu

Les murailles de feu

Titel: Les murailles de feu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Steven Pressfield
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miennes et nos regards se croisèrent.
    — Tu vois donc, Xéon, tout est comme il faut. Tu crois que tu as failli à ma défense, mais ce que tu as fait m’a défendue, comme tu me défends ici même.
    Elle tira des plis de sa robe la lettre d’Aretê.
    — Sais-tu ce qu’elle dit ? Que ta mort sera honorée, comme toi et moi avons honoré Bruxieus, ce jour d’octobre où nous avons bâti son bûcher, et comme nous trois avions honoré nos parents.
    La maîtresse des lieux apparut sur le pas de la cuisine ; les enfants de Diomaque attendaient à l’intérieur ; mon jeune guide avait fini son repas et était impatient de repartir. Diomaque se leva et me tendit les mains. La lampe éclairait doucement son visage et lui restituait la beauté que j’avais admirée avec les yeux de l’amour dans ces trop brèves années. Je me levai aussi et l’étreignis. Elle rabattit le voile sur ses cheveux coupés, puis sur son visage.
    — Qu’aucun de nous n’ait pitié de l’autre, dit-elle en me quittant. Nous sommes ce que nous devons être et nous ferons ce qu’il faut faire.

5
    Suicide me réveilla deux heures avant l’aube.
    — Regarde ce qui s’est introduit par un trou.
    Il indiquait la butte derrière le camp des Arcadiens, où les déserteurs perses étaient interrogés devant les feux de camp. Je plissai les yeux, mais ne vis rien.
    — Regarde bien. C’est ton ami rebelle, le Coq. Il te demande.
    Alexandros et moi y allâmes. C’était bien le Coq. Il était venu des lignes perses avec un groupe d’autres déserteurs. Le Skirite l’avait attaché nu à un poteau. Ils se préparaient à l’exécuter. Il avait demandé à passer un moment avec moi avant qu’ils lui tranchent la gorge.
    Le camp s’éveillait de toutes parts. La moitié de l’armée était déjà à ses postes et l’autre moitié s’armait. On entendait au loin, sur la route de Trachis, les trompettes de l’ennemi qui sonnaient le rassemblement pour le deuxième jour. Le Coq se trouvait près d’un couple de Mèdes qui en avaient tant dit qu’on les récompensait d’une collation. Mais pas le Coq. Le Skirite l’avait tellement torturé qu’il avait fallu le soutenir, ligoté au poteau où on lui trancherait la gorge.
    — C’est toi, Xéon ? il cligna des yeux, gonflés et pourpres comme ceux d’un boxeur.
    — J’ai emmené Alexandros avec moi.
    Nous parvînmes à lui faire boire un peu de vin.
    — Je regrette pour ton père.
    Ce furent ses premiers mots à Alexandros. Il avait été pendant six ans le servant d’Olympias et avait sauvé sa vie à Oenophyta en l’arrachant à la cavalerie thébaine.
    — C’était l’homme le plus noble de la cité, sans compter Léonidas.
    — Qu’est-ce qu’on peut faire pour toi ? lui demanda Alexandros.
    Le Coq voulait savoir qui d’autre était resté en vie. Je citai Dienekès, Polynice et quelques autres et je récitai la liste de ceux qui étaient morts.
    — Et tu es également vivant, Xéon ?
    Ses traits se déformèrent dans un sourire.
    — Ton protecteur Apollon t’épargne sans doute dans un but extraordinaire.
    Le Coq n’avait qu’une seule requête : c’était que nous fassions parvenir à sa femme une monnaie ancienne de son pays, la Messénie. Il avait, disait-il, porté cette obole usée toute sa vie. Il me la confia et je promis de la remettre au prochain messager. Il me serra la main pour me remercier et, baissant la voix, nous fit signe de nous rapprocher, Alexandros et moi.
    — Écoutez bien. Voici ce que je suis venu vous dire.
    Il parla rapidement. Les Hellènes ne défendraient pas le défilé plus d’un jour, pas plus. Sa Majesté offrait la rançon d’une province à tout guide qui lui indiquerait un chemin de montagne par lequel les Murailles de Feu pourraient être encerclées.
    — Les dieux n’ont créé aucune montagne si escarpée qu’un homme ne puisse l’escalader, surtout quand il est éperonné par l’or et la gloire. Les Perses vont trouver moyen de vous contourner par l’arrière et, même s’ils n’y parvenaient pas, leur flotte briserait le blocus athénien le jour suivant. Il n’y aura pas de renforts en provenance de Sparte. Les éphores savent qu’ils seraient également encerclés. Ni Léonidas ni aucun de vous ne s’en sortira mort ou vivant.
    — Et tu t’es fait tabasser rien que pour nous apporter ces nouvelles ?
    — Écoutez-moi. Quand je suis allé chez les Perses, je leur ai dit que

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