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Les murailles de feu

Les murailles de feu

Titel: Les murailles de feu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Steven Pressfield
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femmes ravagea la cité. Une délégation d’épouses et de mères se présenta devant les éphores exigeant que ce fussent elles qu’on envoyât la prochaine fois, armées d’épingles à cheveux et de quenouilles, étant donné qu’elles ne pourraient se déshonorer davantage que les fameux Dix Mille, ni en faire moins qu’eux.
    Dans les réfectoires, les humeurs étaient encore plus âcres. Combien de temps le Congrès des Alliés tergiverserait-il ? Et combien de semaines encore les éphores temporiseraient-ils ?
    Je me rappelle avec précision le matin où la proclamation fut enfin faite. Ce jour-là, le régiment Héraklès s’entraînait dans le lit asséché d’une rivière appelée le Corridor, un chenal irrégulier entre des bancs de sable, au nord du village de Limnai. Les hommes pratiquaient des exercices d’impact à deux sur un et trois sur deux, quand un vieillard distingué, Charilaos, ancien éphore et prêtre d’Apollon, mais désormais conseiller et émissaire, apparut au sommet de la berge ; là, il prit en aparté le polémarque Derkylide, commandant de régiment. Charilaos était plus que septuagénaire et il avait perdu une jambe dans une bataille ancienne ; pour qu’il eût pris la peine de faire un aussi long trajet en s’appuyant sur son bâton, il fallait qu’un événement d’importance fût advenu.
    Néanmoins, les exercices se poursuivirent et personne ne regarda les deux hommes. Tout le monde avait compris. Les hommes de Dienekès furent informés par Latéride, commandant du peloton voisin, et la nouvelle passa de proche en proche.
    — Ce sont les Portes…
    Les Portes Chaudes. Les Thermopyles. On ne fit pas d’appel et, à la surprise générale, le régiment fut débandé. Les hommes avaient tout le reste de la journée pour eux.
    Pour autant que je m’en souvienne, pareil congé n’avait été concédé qu’une demi-douzaine de fois et, d’habitude, les pairs se séparaient d’excellente humeur et rentraient chez eux dare-dare. Cette fois-ci, personne ne bougea. Le régiment entier sembla cloué au site, bourdonnant comme une ruche dans les parages étouffants de la rivière asséchée.
    Le message était le suivant : quatre morai, c’est-à-dire cinq mille hommes, seraient mobilisés pour les Thermopyles. Cette colonne, renforcée par quatre régiments et servants de paquetage, ainsi que des hilotes armés, à raison de deux pour un guerrier, se mettrait en marche dès que les Karneia, la fête d’Apollon qui interdisait de porter les armes, aurait pris fin. C’était dans deux semaines et demie.
    Cette force représenterait vingt mille hommes au total, deux fois plus qu’on en avait envoyé à Tempé, et elle se concentrerait dans un défilé dix fois plus étroit.
    De trente à cinquante mille hommes de l’infanterie alliée seraient mobilisés à la suite de cette force initiale, tandis qu’une force principale de marine alliée, cent vingt navires de guerre, bloquerait les détroits à l’Artémision et à Andros, ainsi que le détroit de l’Euripe ; elle protégerait l’armée aux Thermopyles d’une attaque latérale par la mer.
    C’était une mobilisation générale et si massive qu’elle en paraissait suspecte. Dienekès et tous les autres le comprirent. Mon maître rentra en ville avec Alexandros, qui était désormais un guerrier de front du peloton, ses camarades Bias, Léon le Noir et leurs servants. Au tiers du chemin, nous dépassâmes Charilaos, qui boitait péniblement, soutenu par un assistant aussi vieux que lui, Sténisthe. Léon le Noir tirait un âne par le licou ; il insista pour que Charilaos le montât, mais le vieil homme déclina l’offre et permit que son assistant montât à sa place.
    — Épargne-nous les discours, veux-tu, mon oncle ? lança Dienekès au fonctionnaire, affectueusement mais avec l’impatience d’un soldat qui veut savoir la vérité.
    — Je ne dis que ce que j’ai été chargé de dire, Dienekès.
    — On ne peut pas mettre cinquante mille hommes aux Thermopyles. On ne peut pas en mettre cinq.
    Une expression moqueuse se peignit sur le visage parcheminé du vétéran.
    — Je vois que tu as une plus haute opinion de tes capacités de stratège que de celles de Léonidas.
    Un fait devint évident, même pour les servants. L’armée perse se trouvait actuellement en Thessalie. C’était à quoi, dix jours de marche des Portes ? Moins ? Dans deux semaines et demie, leurs millions

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