Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les murailles de feu

Les murailles de feu

Titel: Les murailles de feu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Steven Pressfield
Vom Netzwerk:
suspendue ? Son roi étant mort, l’armée perse ne se débanderait-elle pas ? Les Perses ne renonceraient-ils pas à leur projet de conquérir l’Hellade ?
    Puis Votre Majesté accéda au trône. L’armée de l’ennemi ne se débanda pas. Sa flotte ne se dispersa pas. Bien au contraire, la mobilisation de l’Empire s’accéléra. Le zèle d’un prince fraîchement couronné brûla dans la poitrine de Sa Majesté. Xerxès, fils de Darius, ne serait pas tenu pour inférieur à son père ni à ses illustres ancêtres, Cambyse et Cyrus le Grand. Ceux-là, qui avaient conquis toute l’Asie, se verraient rejoints au panthéon de la gloire par leur descendant Xerxès, qui ajouterait bientôt l’Europe et la Grèce à la liste des provinces de l’Empire.
    Phobos avança dans toute l’Hellade, comme un tunnel creusé par un mineur. On en reniflait la poussière dans le calme du matin et l’on en percevait l’avancée au-dessous de sa maison dans le sommeil. De toutes les puissantes cités de la Grèce, seules Sparte, Athènes et Corinthe résistèrent. Elles envoyèrent légation sur légation aux cités défaillantes pour les exhorter à rejoindre l’Alliance. Mon maître fut chargé en une seule saison de cinq ambassades différentes outre-mer. J’ai vomi par-dessus les bastingages de tant de bateaux que je ne saurais distinguer l’un de l’autre.
    Partout où ces ambassades touchaient, Phobos nous avait précédés. La peur rendait les gens incontrôlables. Certains vendaient toutes leurs possessions ; d’autres, insouciants, les achetaient.
    — Que Xerxès nous épargne l’épée et nous envoie sa bourse, s’écria mon maître écœuré, quand une ambassade de plus eut échoué. Les Grecs se piétineront les uns les autres dans leur course à qui vendra sa liberté le premier.
    Tout au long de ces expéditions, je guettais des nouvelles de ma cousine. À trois reprises alors que, dans ma dix-septième année, j’étais au service de mon maître, je passai par Athènes ; chaque fois je demandai l’adresse de la femme que nous avions rencontrée ce matin-là, Diomaque et moi, sur la route des Trois Coins ; c’était là que cette femme avait enjoint à Diomaque de se rendre dans sa maison et d’y prendre du service. J’avais bien retrouvé le quartier et la rue, mais non la maison.
    Une fois, lors d’une réunion de l’Académie d’Athènes, une ravissante jeune femme de vingt ans apparut et je fus un instant certain que c’était Diomaque. Mon cœur battit si violemment que j’en défaillis presque. Mais ce n’était pas elle. Ce n’était pas elle non plus que je vis un an plus tard à Naxos, ramener de l’eau de la source. Ni l’épouse du médecin que je rencontrai six mois plus tard à Histiée.
    Par une brûlante soirée d’été, deux ans avant la bataille aux Thermopyles, le navire qui transportait la légation de mon maître fit une brève escale à Phalères, un port d’Athènes. Notre mission ayant pris fin, il nous restait deux heures avant la marée haute. On m’accorda une permission et je trouvai enfin la maison de famille de la femme des Trois Coins. La maison était fermée ; la peur avait chassé ses occupants dans ses terres de Iapygie, ou du moins ce fut ce que m’apprit une escouade d’archers scythes, ces bandits que les Athéniens emploient pour faire leur police. Oui, ces voyous se rappelaient Diomaque ; qui eût pu l’oublier ? Ils me prirent pour l’un de ses soupirants et m’entretinrent dans le langage vulgaire de la rue :
    — L’oiseau s’est enfui, dirent-ils. Trop sauvage pour sa cage.
    L’un d’eux déclara qu’il l’avait revue au marché, avec son mari, un officier de marine.
    — Sacrée putain ! s’esclaffa-t-il. S’acoquiner avec un coureur de dauphins alors qu’elle aurait pu m’avoir !
    De retour à Lacédémone, je décidai d’arracher de mon cœur cette nostalgie, comme un fermier brûle une racine obstinée. Je dis au Coq qu’il était temps pour moi de prendre femme. Il en trouva une, Thereia, sa cousine du côté maternel. J’avais dix-huit ans et elle en avait quinze quand nous fûmes unis à la mode messénienne, qui est celle des hilotes. Dix mois plus tard, elle accoucha d’un garçon et plus tard d’une fille, alors que j’étais en campagne.
    Marié, je me promis de ne plus penser à ma cousine. Je ne me laisserais plus aller à des rêveries. Les années filèrent. Alexandros avait achevé son

Weitere Kostenlose Bücher