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Les noces de fer

Les noces de fer

Titel: Les noces de fer Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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frère, lui, porta sa dextre à sa bouche tandis que Philippe VI se courrouçait :
    — Vous avez tenu un an ! dit le roi sur le ton d’une semonce. Pour quoi croyez-vous que nous sommes venus ?… On m’a dit que les Calaisiens se battaient bien, ce qui suppose de bons bras et une vaillance à laquelle je rendrai hommage…
    — Les bras étaient solides au début, sire, et la vaillance à toute épreuve, mais devant moi, Jean de Vienne vous a adressé un message [350] par lequel il vous faisait connaître l’extrême disette dont nous avions à souffrir, pire encore que la mauvaiseté de nos assiégeants !
    — Je ne l’ai jamais reçu.
    — Vous m’en voyez marri, sire !
    Le roi broncha et se détournant à peine :
    — Beaujeu et Saint-Venant…
    — Sire ? firent avec un ensemble parfait les deux hommes en se portant devant le roi.
    Le duc Jean observait son père avec un mépris à peine dissimulé ; le duc d’Orléans regardait la pointe de ses pédieux, effilée en poulaine et, tout autour, un grouillement de fourmis dont les sabots de son cheval avaient ruiné le nid. Il semblait s’ennuyer ou mépriser la guerre. Le roi avait pris familièrement Beaujeu et Saint-Venant par l’épaulière :
    — Vous êtes maréchaux de France et j’ai grande foi en vous… Ainsi, vous allez regarder et considérer les passages et les détroits et me direz comment nous pourrons avancer…
    Bellebrune eut un sursaut :
    — Sire, je vous l’ai dit : les marais sont profonds ! Nul n’y pourra passer !
    Le roi se courrouça. Pour que Bellebrune pût mieux voir sa colère, il ôta son bassinet et le tint sous bras :
    — Je décide souverainement et fais ce que bon me semble, messire. Et pour cette fin de jour, la première action que je dois accomplir, c’est de planter mon pavillon en ce lieu…
    Les chevaliers et écuyers qui étaient demeurés à cheval mirent aussitôt pied à terre. Un commandement retentit, hurlé par Geoffroi de Charny :
    — Qu’on plante la tente du roi !
    Ogier pensa : « L’attente du roi », mais pouvait-il faire reproche à Philippe VI de prendre son temps après avoir péché, à Crécy, par excès contraire ? Les chevaliers parlaient entre eux ; les hommes d’armes allaient et venaient ; c’était la vie d’Hesdin qui peut-être, disaient certains, allait reprendre. On rassemblait les chevaux, on assemblait les chariots en piquant les bœufs au sang car sur ces herbes molles, les jantes glissaient plutôt qu’elles ne roulaient ; on allait lentement : chaque geste avait d’autant plus de poids et d’importance qu’on pouvait demain, si le roi décidait de donner l’assaut, être roide à jamais, la face et le ventre dans la vase salée.
    — Sire, dit Bellebrune, ceux qui vous ont vus, vous et votre ost immense, du haut des aleoirs [351] et aux archères des courtines sont pleins d’une espérance…
    — Je sais, je sais, interrompit Philippe VI… Et moi également !
    Geoffroi de Charny, souriant, et comme accroché des deux mains à la hampe de l’oriflamme, se pencha vers Eustache de Ribemont et le duc d’Athènes, resplendissants dans leurs coquilles de haut prix où leurs ombres grisaillaient :
    — Toutes ces femmes, aux créneaux… Savez-vous à quoi elles doivent penser en voyant nos milliers d’hommes ?
    — Que leur délivrance est pour demain, dit Gauthier de Brienne, approuvé par Ribemont.
    — Ta ta ta, dit Charny en secouant la tête tandis que son sourire s’agrandissait. Ces femmes et filles de mariniers et de manants recrus par ce long jeûne doivent se dire que ça en fait, des braquemarts, à leur disposition !
    — Et le double de couillons ! dit le duc de Bourbon qui, passant, avait tout entendu.
    Tous s’esclaffèrent si fort que le roi et ses fils se retournèrent.
    — Hé hé ! dit Philippe VI, je vois qu’il y a de la liesse dans l’air… Je vous avoue que j’y suis sensible.
    Au lieu de prendre les dispositions nécessaires à un assaut victorieux, on commençait à jangler et langager, et l’on pensait plus aux femmes et à leurs appas sans doute décharnés qu’aux Goddons et à leurs armes. Ogier fut heureux qu’aucun de ses hommes ne se fût ébaudi bruyamment de la plaisanterie de Charny. Ce fut avec plaisir qu’il vit Bellebrune quitter le roi et son entourage.
    — Fenouillet ! Vous êtes en bon état, à ce que je vois… J’en suis moult heureux !
    — Mon vrai nom est

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